Santé

Des dizaines de médecins yéménites victimes du virus

Nabil Abdoullah al-Tamimi à Aden

Des travailleurs yéménites utilisent une pelleteuse pour creuser des tombes sur un terrain réservé aux victimes de la COVID-19, le 14 juin dans un cimetière de Taez. [Ahmad al-Basha/AFP]

Des travailleurs yéménites utilisent une pelleteuse pour creuser des tombes sur un terrain réservé aux victimes de la COVID-19, le 14 juin dans un cimetière de Taez. [Ahmad al-Basha/AFP]

Plus de 50 médecins ont perdu la vie lors de la pandémie mondiale du nouveau coronavirus (COVID-19) qui ravage le Yémen, selon le Syndicat des médecins et pharmaciens yéménites.

Le personnel médical et les travailleurs de santé ont été entravés dans leur réponse à la crise sanitaire par un secteur de santé déjà défaillant et un manque d’équipements médicaux, y compris des équipements de protection, a fait savoir le syndicat.

Les branches provinciales du syndicat ont signalé le décès de plus de 50 membres du personnel de santé, dont des médecins, des laborantins, des infirmières et des pharmaciens, a indiqué à Al-Mashareq le dirigeant du syndicat, le Dr Abdoul Qawi al-Shamiri.

Ils sont tombés malades en soignant des patients dans des hôpitaux et des centres de confinement.

Un médecin dans une cabine de désinfection au Laboratoire central de santé de Sanaa le 14 juin. [Mohammed Huwais/AFP]

Un médecin dans une cabine de désinfection au Laboratoire central de santé de Sanaa le 14 juin. [Mohammed Huwais/AFP]

Le coronavirus s’est rapidement répandu au Yémen, a-t-il rapporté, en raison du manque généralisé de sensibilisation à la maladie et du non-respect des consignes sanitaires.

L’état général du secteur de la santé au Yémen a contribué à son accélération.

« La guerre a détruit le secteur de la santé et il fonctionne maintenant à moins de 50 % d’efficacité », a indiqué al-Shamiri, soulignant que le secteur de la santé était déjà mal en point avant le début du conflit actuel.

« Le Yémen possède un cadre médical réputé », a-t-il ajouté. « Le problème du secteur de la santé réside dans les institutions et les équipements qui doivent permettre aux cadres de remplir leur devoir envers les patients. »

« Les médecins yéménites examinent au moins 20 patients [par jour], et la moyenne est de 50 patients ou plus », a-t-il fait savoir. « Mais dans d‘autres pays, le taux est de cinq à sept patients par médecin. »

« Cela augmente la charge de travail des médecins et les rend très vulnérables aux infections », a-t-il poursuivi.

Il a appelé les agences des Nations unies qui aident les pays à lutter contre la pandémie « à intensifier [...] et accélérer la fourniture d’aide au Yémen, pour le secteur dans son ensemble et pour le personnel de santé, avec les équipements et le matériel nécessaires pour lutter contre le coronavirus ».

Les médecins ont besoin d’aide

« Le Yémen perd au moins un médecin par jour » dans l’exercice de ses fonctions, a rapporté le Dr Eshraq al-Sebai, porte-parole de la Haute Commission d’urgence du Yémen pour la lutte contre le coronavirus.

« Le Yémen a perdu beaucoup de ses meilleurs médecins et consultants spécialisés, en plus de nombreux membres du personnel infirmier, qui sont morts en luttant contre l’épidémie et en essayant de sauver des patients », a-t-elle fait savoir à Al-Mashareq.

« Il faudra au moins dix ans au Yémen pour remplacer ce grand nombre de personnel médical », a ajouté al-Sebai.

Elle s’est dite préoccupée par le nombre de membres du personnel médical qui contractent des infections auprès de patients à cause du manque d’équipements de protection, notant que cela se répercute sur le fait qu’il y a moins de médecins pour soigner les patients.

Le personnel médical travaillant en première ligne devrait également bénéficier d’incitations financières, en particulier ceux qui travaillent dans des centres de confinement, a-t-elle déclaré, afin « de renforcer leur moral face à cette pandémie ».

L’Organisation mondiale de la santé doit intensifier la formation des cadres yéménites « pour faire face aux pires scénarios d’épidémie, que même les systèmes de santé des pays développés n’ont pas été en mesure de contenir », a-t-elle déclaré.

Énormes sacrifices

Abdoul-Raqeeb al-Haidari, vice-ministre adjoint de la Santé publique et de la Population, a également souligné la nécessité d’encourager les membres du personnel médical, en particulier ceux qui travaillent dans les centres de confinement.

« Certains membres du personnel médical ont travaillé dans les centres de confinement nuit et jour ces derniers temps sans en sortir, afin de protéger leurs familles et de ne pas leur transmettre l’infection », a-t-il rapporté à Al-Mashareq.

« Des dizaines de médecins et de membres du personnel médical ont été infectés par la COVID-19 dans l’exercice de leurs fonctions et en sont morts, et certains sont toujours sous traitement dans des centres de confinement, tandis que d’autres se sont rétablis », a-t-il déclaré.

« Cela est dû au manque d’équipements de protection », a-t-il ajouté.

Plusieurs envois de fournitures médicales sont arrivés aux aéroports d’Aden et de Seiyun, a-t-il indiqué, soulignant que le personnel médical sera mieux loti une fois que les équipements de protection lui auront été distribués.

Pendant ce temps, dans les régions du Yémen qui échappent au contrôle du gouvernement, les Houthis (Ansarallah) soutenus par l’Iran entravent les opérations humanitaires et mentent sur la gravité de la pandémie de COVID-19, a déclaré al-Haidari.

« Les Houthis éludent la question et empêchent le versement des salaires des médecins dans les zones sous leur contrôle sous de faux prétextes », a-t-il conclu.

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