Éducation

Les enfants paient le prix de la guerre dans les zones contrôlées par les Houthis

Nabil Abdoullah al-Tamimi à Aden

Un artiste yéménite travaille sur une fresque murale le 10 avril 2014 à Sanaa dans le cadre d'une campagne visant à mettre fin au recrutement d'enfants-soldats par les milices tribales. [Mohammed Huwais/AFP]

Un artiste yéménite travaille sur une fresque murale le 10 avril 2014 à Sanaa dans le cadre d'une campagne visant à mettre fin au recrutement d'enfants-soldats par les milices tribales. [Mohammed Huwais/AFP]

Dans les régions du Yémen contrôlées par les Houthis (Ansarallah) soutenus par l'Iran, les enfants paient un lourd tribut à la guerre en cours, ont fait savoir des responsables et des observateurs.

La milice a subverti le système éducatif dans ces régions, ont-ils rapporté, transformant les écoles en casernes ou en centres de recrutement.

Elle n'a cessé d'éroder les normes éducatives en remplaçant les enseignants qualifiés par des fidèles au parti et en transformant les écoles en incubateurs idéologiques dans le but d'attirer les enfants au front et de les utiliser comme chair à canon.

Rien que dans la province d'Ibb, selon les médias locaux, la milice a renvoyé plus de 2000 enseignants au cours des deux dernières années.

Al-Arabiya TV a rapporté que le Bureau de l'éducation contrôlé par les Houthis à Ibb a licencié ce mois-ci 788 enseignants dans différents districts.

Pendant ce temps, les fonctionnaires des zones contrôlées par les Houthis, dont les enseignants, n'ont pas perçu leur salaire depuis plus de trois ans et connaissent une situation financière très difficile.

Recrutement des enfants

« Des rapports publiés par des organisations internationales indiquent qu'il y a eu 30 000 cas de recrutement d'enfants dans les zones contrôlées par les Houthis », a indiqué à Al-Mashareq l'avocat et militant des droits de l'homme Abdoul Rahman Barman.

« Ce chiffre est réel », a-t-il affirmé.

Mais « le nombre d'enseignants qui ont été ciblés dépasse le nombre de ceux qui ont été retirés de la liste de paie et remplacés par des loyalistes », a noté Barman.

Les Houthis ont tué 450 enseignants dans les zones sous leur contrôle, a-t-il indiqué, et environ 1500 enseignants ont été détenus dans les prisons de la milice.

Les Houthis ont entrepris de prendre le contrôle du système éducatif yéménite afin de l'utiliser pour leurs propres fins et de promouvoir la doctrine du Wilayat al-Faqih (la Tutelle du Juriste), qui appelle à l'allégeance au Guide suprême de l'Iran.

Ils cherchent par ce biais à contrôler l'esprit des enfants, a-t-il expliqué, soulignant que la milice voit les écoles comme des pépinières de nouveaux combattants, mais ne peut recruter, former et endoctriner les enfants que si les enseignants leur sont fidèles.

Barman a déclaré que les Houthis cherchent à exercer un contrôle exclusif sur les emplois du secteur public et ont licencié des employés dans tous les secteurs, en particulier celui de l'éducation.

Le recrutement d'enfants-soldats par les Houthis est visible « aux postes de contrôle, où l'on peut voir des enfants-soldats, et aussi sur les photos de soldats houthis tués dans les rues, en majorité des enfants », a-t-il indiqué.

Changements apportés aux programmes scolaires

« Les Houthis ont entrepris de détruire le système éducatif en modifiant les programmes scolaires pour les rendre conformes à leur orientation doctrinale et sectaire », a rapporté le chercheur politique Nabil al-Bakiri à Al-Mashareq.

Ils cherchent à contrôler la nomination des directeurs et des enseignants, et à imposer des activités éducatives qui propagent l'idéologie du groupe, a-t-il continué, utilisant tous ces moyens pour mettre en place un modèle éducatif doctrinal.

À travers cela, a-t-il ajouté, les Houthis cherchent à façonner la pensée des enfants et les encourager à être loyaux envers la milice et soutenir son idéologie.

En dehors des heures de cours, les Houthis tentent d'utiliser les camps d'été et les diverses offres d'éducation pour leurs propres besoins, a-t-il fait savoir.

Les colonies traditionnelles ont été transformées en « camps doctrinaux où ces enfants sont formés à l'utilisation des armes et au combat », a déclaré al-Bakiri, l'objectif final étant de les envoyer sur les champs de bataille.

Les conséquences graves du recrutement d'enfants incluent « l'émergence d'une génération d'enfants imprégnés de l'idéologie de la milice », a-t-il déclaré, ce qui déchirera le tissu social du Yémen et mettra à mal la coexistence pacifique.

Des jeunes vies détruites

« Après avoir organisé un coup d'État, les Houthis ont commencé à exercer leur contrôle sur l'éducation en renvoyant les enseignants et en les remplaçant par des personnes qui leur sont fidèles et qui serviront leurs objectifs idéologiques », a déclaré à Al-Mashareq le vice-ministre des Droits de l'homme Nabil Abdoul Hafeez.

Ils ont également cherché à détourner à leur profit l'aide financière qu'ils recevaient pour l'éducation, a-t-il poursuivi, affirmant qu'ils « volent le gagne-pain des enseignants, les affament et détournent cet argent au profit de leurs fidèles ».

« Ce comportement reflète l'idéologie exclusiviste de la milice qui rejette tous ceux qui ne la rejoignent pas, et viole les principes de la fonction publique et les règles de l'emploi public », a ajouté Abdoul Hafeez.

Le ministère des Droits de l'homme suit les cas de recrutement d'enfants « qui ont soustrait les enfants des écoles pour les envoyer sur les champs de bataille et les ont utilisés comme carburant pour leur guerre absurde contre le gouvernement légitime et leur pays », a-t-il déclaré.

Cette décision revient à « détruire leur enfance, leur avenir et l'avenir du Yémen », a-t-il ajouté.

Par ses actions, a-t-il déclaré, la milice « détruit systématiquement l'enfance au Yémen et viole les normes internationales, la Convention internationale des droits de l'enfant et la législation yéménite sur les droits de l'enfant ».

« Dans leur dictionnaire, le mot 'école' est devenu synonyme de camps d'entraînement, de dépôts d'armes et parfois de réunions de commandants militaires », a déploré Abdoul Hafeez.

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