Le 21 novembre, Téhéran et 150 autres villes iraniennes sont entrées dans une période de confinement prolongeable de deux semaines en réponse à la recrudescence des infections au nouveau coronavirus (COVID-19), mettant en évidence le fait que le gouvernement est toujours incapable de gérer la crise.
Téhéran a rejeté les offres d'aide des États-Unis, tout en minimisant constamment le nombre d'infections en Iran.
« La responsabilité première du gouvernement aujourd'hui est de maintenir les gens en bonne santé [...], par conséquent, il n'y a pas d'autre choix que d'entamer une nouvelle série de fermetures [...] pour contrôler le virus », a déclaré le 15 novembre le président iranien Hassan Rohani.
Cela a marqué le revirement complet de son refus, la veille, d'ordonner des fermetures immédiates comme ses conseillers l'avaient exhorté à le faire.
Le retard dans l'action se fait sentir.
Le 9 novembre, Sima Sadat-Lari, porte-parole du ministère de la Santé, a déclaré que près de 693 000 Iraniens étaient infectés par la COVID-19, et que rien qu'au cours des 24 heures précédentes, plus de 10 000 nouveaux cas avaient été enregistrés.
Méfiance croissante à l'égard du régime
Le président du conseil municipal de Téhéran, Mohsen Hashemi, un éminent politicien conservateur modéré et allié du président iranien, a dénoncé l'inaction du gouvernement de Rohani face aux infections au coronavirus et aux décès qui en ont résulté.
« Il semble que les décideurs n'aient pas le courage ni la volonté de faire le nécessaire pour briser la chaîne » des infections au coronavirus, a-t-il déclaré dans un tweet, relayant la frustration du public.
Rohani a mentionné à plusieurs reprises que son gouvernement n'a pas les fonds suffisants pour aider la population en cas de confinement total, accusant les sanctions américaines.
« Le régime iranien ne se soucie tout simplement pas du peuple iranien », a affirmé Farideh Nabovvat, une ancienne administratrice d'école qui vit maintenant aux États-Unis mais dont de nombreux parents et amis vivent toujours en Iran.
Cette méfiance provient du refus du gouvernement iranien d'être transparent sur ses propres échecs récents. En janvier, le CGRI a accidentellement abattu un avion de ligne, mais les responsables iraniens ont nié toute responsabilité dans cet incident pendant plusieurs jours.
Cette tragédie a exacerbé un déficit de confiance existant entre les Iraniens et leur gouvernement, alors que le pays se dirige vers la pire pandémie que le monde ait connue depuis un siècle.
Rohani a lui aussi reconnu le « manque de confiance préjudiciable envers les institutions publiques, et le ministère de la Santé en particulier ».
Plus les gens se méfient de la manière dont le gouvernement gère la pandémie de COVID-19 en Iran, plus notre situation sera mauvaise, a-t-il déclaré lors de l'annonce des dernières fermetures.
Le manque de transparence sur les taux d'infection a également ébranlé la confiance déjà précaire du public dans les données gouvernementales.
Bien que le gouvernement annonce chaque jour les statistiques sur les nouveaux cas d'infection et les décès liés à la COVID, la plupart des membres du public pensent que les chiffres sont beaucoup plus élevés que ce qui est annoncé, comme ce fut le cas en août.
Le CGRI est incapable de gérer le virus
En août, une source iranienne anonyme a divulgué des données officielles à la BBC, indiquant qu'à 415 024, le nombre d'infections à la COVID-19 en juillet était près de deux fois supérieur au chiffre officiel publié par la République islamique.
Et avec environ 44 000 personnes, le chiffre divulgué sur le nombre de décès était trois fois plus élevé que les chiffres officiels.
Les institutions gouvernementales iraniennes ont peu fait pour démontrer leur compétence dans la gestion de la crise, ce qui a encore ébranlé la confiance du public. En mars, le Corps des Gardiens de la révolution islamique (CGRI) avait ainsi annoncé avoir construit un « détecteur de virus » de la COVID-19.
Le ministère iranien de la Santé et l'Agence nationale de l'alimentation et des médicaments ont rejeté la nouvelle, que Hesameddin Ashena, l'un des principaux collaborateurs de Rohani, a qualifiée de « coup de propagande ».
La Société iranienne de physique, un organisme indépendant de scientifiques, a déclaré que cette annonce était « aussi crédible que la science-fiction ».
« Je ne pense pas que l'objectif du CGRI soit d'aider le peuple iranien », a indiqué un ancien analyste de la marine iranienne sous condition d'anonymat.
En mai, le général de brigade du CGRI Ali-Akbar Pourjamshidian avait déclaré que le groupe avait mis en place « cinq centres de tests [de la COVID-19] » en Iran.
Pourjamshidian avait ajouté que le CGRI et l'armée conventionnelle iranienne (l'Artesh) « travaillent main dans la main pour combattre » le virus, et que l'Hôpital des forces terrestres du CGRI « est en train d'être équipé de 45 lits de soins intensifs et peut maintenant examiner 400 patients à la fois ».
« Le CGRI aime intervenir dans ces situations pour améliorer son image », a déclaré l'ancien analyste de la marine. « Ils le font pour leur propre bénéfice. Le gouvernement n'a pas assez de ressources, alors le CGRI intervient et importe des vaccins ou des médicaments de Chine, par exemple. »
Le CGRI stocke les vaccins ou les médicaments importés et les vend au marché noir pour faire des bénéfices. Pendant ce temps, les Iraniens paient des centaines de milliers de rials pour des masques et d'autres équipements, a rapporté l'analyste à Al-Mashareq.
En septembre, Saeed Namaki, ministre iranien de la Santé, a déclaré que la Banque centrale d'Iran (BCI) n'avait toujours pas versé au ministère plus de 700 millions de dollars sur le milliard que le gouvernement de Rohani avait alloué à la lutte contre la COVID-19.
Le gouverneur de la BCI, Abdolnaser Hemmati, avait déclaré à l'époque que « le gouvernement n'avait pas d'autre choix que de refuser certaines demandes, même si elles peuvent être légitimes », un aveu indirect que le gouvernement n'avait pas les ressources financières pour lutter contre le virus. Malgré cela, les partisans de la ligne dure en Iran ont rejeté l'aide de la communauté internationale.