Droits de l'Homme

Les Yéménites exigent l'annulation des condamnations à mort imposées par les Houthis

Nabil Abdoullah al-Tamimi à Aden

Abdoul Qader Murtada, chef de la délégation houthie, assiste à des pourparlers sur un échange de prisonniers avec le gouvernement yéménite le 5 février à Amman, la capitale jordanienne. [Khalil Mazraawi/AFP]

Abdoul Qader Murtada, chef de la délégation houthie, assiste à des pourparlers sur un échange de prisonniers avec le gouvernement yéménite le 5 février à Amman, la capitale jordanienne. [Khalil Mazraawi/AFP]

Des responsables et des militants yéménites se sont joints à des groupes internationaux de défense des droits de l'homme pour dénoncer les condamnations à mort prononcées par un tribunal de Sanaa contrôlé par les Houthis contre 30 universitaires, membres de syndicats et prêcheurs.

Le 9 juillet, le Tribunal pénal spécial a condamné à mort 30 personnes, les accusant d'espionnage et d'avoir fourni des informations et des coordonnées à la coalition arabe pour des frappes aériennes. Six autres ont été acquittés.

Les Houthis ont déclaré avoir l'intention de procéder aux exécutions dans les 15 jours.

Le ministère des Droits de l'homme du Yémen, Amnesty International, l'Association des mères de personnes enlevées et d'autres militants des droits de l'homme ont demandé l'annulation des peines.

Des membres du Comité international de la Croix-Rouge transportent le prisonnier saoudien Musa al-Awaji sur une civière pour l'embarquer dans un avion à l'aéroport de Sanaa après sa libération par les Houthis le 29 janvier, dans le cadre d'un accord conclu entre le gouvernement et les Houthis lors de pourparlers de paix en Suède sous couvert des Nations unies. [Mohammed Huwais/AFP]

Des membres du Comité international de la Croix-Rouge transportent le prisonnier saoudien Musa al-Awaji sur une civière pour l'embarquer dans un avion à l'aéroport de Sanaa après sa libération par les Houthis le 29 janvier, dans le cadre d'un accord conclu entre le gouvernement et les Houthis lors de pourparlers de paix en Suède sous couvert des Nations unies. [Mohammed Huwais/AFP]

Le ministère a qualifié le procès de « farce » et a souligné que le tribunal qui avait prononcé les peines avait été déchu de son autorité il y a 18 mois par le Conseil supérieur de la magistrature.

« Nous dénonçons et condamnons tous les crimes des Houthis, y compris les condamnations à mort prononcées contre 30 universitaires et militants des droits de l'homme », a déclaré à Al-Mashareq Nabil Abdelhafeez, vice-ministre des Droits de l'homme.

Ces condamnations sont un crime et une prolongation du calvaire des accusés, a-t-il déclaré, ajoutant qu'il s'agit de civils enlevés chez eux il y a quatre ans et soumis à la torture.

« Nous en avons appelé à la communauté internationale, aux organisations internationales et à l'envoyé des Nations unies au Yémen pour qu'ils agissent rapidement pour secourir les condamnés », a-t-il fait savoir.

« Ils n'ont commis aucun crime contre autrui ni contre leur pays, si ce n'est leur opposition au système de gouvernement des Houthis, et le fait qu'ils vivent dans des zones sous leur contrôle », a déclaré Abdelhafeez.

« Parodie de justice »

Amnesty International a qualifié les condamnations à mort de « parodie de justice » et de confirmation que le pouvoir judiciaire est devenu un instrument de répression plutôt que de justice.

C'est un schéma systématique consistant à utiliser le pouvoir judiciaire pour régler des comptes politiques, a expliqué Amnesty International, appelant les « autorités de facto » de Sanaa à annuler les peines injustes et cruelles et à relâcher immédiatement ces 30 hommes.

Ce verdict est un crime contre les hommes condamnés et leurs familles, qui vivent dans un état de peur et de deuil extrême, a déclaré à Al-Mashareq Abdoul Rahman Berman, avocat et militant des droits de l'homme.

Les peines ont été prononcées par des juges ayant usurpé leur autorité, et par un tribunal que le Conseil supérieur de la magistrature a aboli il y a un an et demi, lorsqu'il a transféré son autorité au tribunal pénal de Marib, a-t-il déclaré.

Les Houthis ont utilisé les institutions judiciaires dont ils se sont emparés dans les zones sous leur contrôle pour persécuter les militants, les professeurs d'université et les étudiants, comme lors de ce récent procès, a indiqué Berman.

Parmi les accusés figurent Yousouf al-Bawab, professeur de linguistique à l'université de Sanaa et universitaire de renom dans son domaine, et Nasr al-Salami, professeur d'université ayant dirigé le département de fatwa de charia à la Banque islamique CAC.

Berman a indiqué que le tribunal avait acquitté six personnes, parce que l'accusation avait porté plainte contre elles pour des incidents survenus en 2016, alors qu'elles étaient emprisonnées depuis 2015.

C'était une honte pour le tribunal, a-t-il affirmé.

Réprimer les opposants politiques

Les Houthis s'efforcent d'éliminer les intellectuels qui s'opposent à eux pour tenter d'étouffer l'influence de ceux qui s'opposent à leurs politiques, a rapporté Berman.

Cela reflète le mode opératoire du système juridique iranien, a-t-il poursuivi, lequel « est chaque année le pays prononçant le plus grand nombre de sentences contre des responsables politiques et des dissidents ».

Berman a demandé que les Nations unis prennent des mesures pour annuler les condamnations, affirmant qu'elles sapent les efforts de paix et l'accord de Stockholm de décembre 2018.

Les condamnations prononcées par un tribunal illégal à Sanaa contrôlé par les Houthis sont essentiellement une liquidation massive de 30 militants politiques, a affirmé le journaliste Rashad al-Sharaabi à Al-Mashareq.

Ces hommes ont été enlevés il y a quatre ans et soumis à diverses formes de torture psychologique et physique, a-t-il déclaré.

« Ce sont des personnalités civiles, des professeurs d'université, des enseignants, des médecins, des ingénieurs et des étudiants qui ont été enlevés à leur domicile et sur leur lieu de travail », a rapporté Al-Sharaabi.

Les enlèvements font partie du processus d'érosion de la vie politique, a-t-il conclu, notant que les Houthis ont pris le contrôle d'une partie du pays et des institutions de l'État, y compris le pouvoir judiciaire, par les armes.

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