Le Haut‑Commissariat des Nations unies aux droits de l’homme (HCDH) a condamné les nombreuses atteintes aux droits de l’homme dont sont victimes les journalistes « de tous bords » partout au Yémen.
Des journalistes et des militants des droits de l’homme ont déclaré séparément que les Houthis (Ansarallah) soutenus par l’Iran sont en tête de liste des ennemis de la liberté de la presse, par le nombre et la nature des violations, qui comprennent des condamnations à mort.
« Les journalistes sont attaqués de toutes parts », a déclaré le 6 août dans un communiqué Michelle Bachelet, Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme.
« Ils sont tués, battus et disparaissent ; ils sont harcelés et menacés ; et ils sont emprisonnés et condamnés à mort pour avoir simplement essayé de montrer la brutalité de cette crise. »
« La sécurité des journalistes est essentielle à nos droits civils, politiques, économiques, sociaux et culturels à tous, et dans le contexte d’un conflit armé, ils jouent un rôle vital en révélant la vérité et en obligeant les belligérants à rendre publiquement des comptes », a-t-elle déclaré.
« Les journalistes sont également protégés par le droit humanitaire international en tant que civils », a-t-elle ajouté. « Les attaques contre eux peuvent constituer des crimes de guerre, et les responsables de ces crimes doivent être traduits en justice. »
Dans sa déclaration, le HCDH a documenté une série de violations contre les journalistes yéménites depuis le mois d’avril. Celles-ci comprennent un assassinat, un enlèvement, trois cas de détention arbitraire, six peines de prison injustes, trois cas d’agression physique et de menaces de violence physique, ainsi que la condamnation à mort de quatre journalistes.
L’organisme a fait savoir que « l’on craint de plus en plus » que les Houthis exécute quatre journalistes yéménites qu’ils ont accusés de « trahison et d’espionnage pour le compte d’États étrangers ».
Les journalistes, identifiés comme étant Abdoul Khaleq Amran, Akram al-Walidi, Hareth Humaid et Tawfiq al-Mansouri, ont été condamnés à mort par un tribunal contrôlé par les Houthis à Sanaa le 11 avril.
Le gouvernement légitime du Yémen avait à l’époque clairement indiqué que le tribunal qui avait prononcé ces condamnations n’avait aucune autorité légale, car il est dominé par les Houthis, qui avaient pris le contrôle de Sanaa lors d’un coup d’État en 2014.
Selon l’instance de surveillance des médias Reporters sans frontières, ces quatre journalistes ont été enlevés en 2015 et transférés en secret d’une prison à l’autre à Sanaa, subissant des interrogatoires violents aux mains de leurs ravisseurs.
« Ils se sont vu refuser les visites de leur famille, l’accès à leur avocat et aux soins de santé, et sont soumis à des traitements cruels, inhumains et dégradants », a rapporté le HCDH.
« Victimes de violations par tous les camps »
Depuis le début du conflit au Yémen en mars 2015, le HCDH a enregistré 357 cas d’atteintes aux droits de l’homme à l’encontre de journalistes, dont 28 assassinats.
Le Centre des études et des médias économiques (CEME), qui s’identifie comme la première organisation de la société civile au Yémen, enquête sur les violations des droits des journalistes.
« Les journalistes yéménites sont victimes de violations continues des droits de l’homme par tous les camps au Yémen », a déclaré à Al-Mashareq le président du CEME, Moustafa Nasr.
« Ils ont besoin de solidarité, de défense et de soutien », a-t-il déclaré. « Certaines organisations locales et internationales font des efforts pour les aider, mais ces [efforts] ne sont pas à la mesure de l’ampleur des épreuves qu’ils traversent. »
Selon l’Observatoire yéménite de la liberté des médias, a indiqué Nasr, les Houthis sont en tête de liste des violations commises contre les journalistes dans toutes les provinces du Yémen.
L’observatoire a documenté 61 cas de violations contre des journalistes commises par les Houthis, 28 cas par des groupes affiliés au gouvernement, et deux cas par des groupes affiliés au Conseil de transition du Sud (CTS).
Deux autres cas ont été attribués à des « personnes influentes ».
« Les Houthis ont commis toutes sortes de violations contre les journalistes, y compris le fait de les battre, les emprisonner, les déplacer et les tuer », a rapporté Abdoul Rahman Berman, avocat et militant des droits de l’homme, à Al-Mashareq.
« Ces violations vont au-delà des individus et incluent les agences de presse dans les zones contrôlées par les Houthis », a-t-il fait savoir.
Berman a décrit la condamnation par le HCDH des crimes contre les journalistes yéménites comme quelque chose de positif, tout comme la demande de plusieurs organisations pour la libération des journalistes.
Les militants demandent un soutien international
Berman a appelé les Nations unies et les autres organisations internationales opérant dans les zones contrôlées par les Houthis à exercer une plus grande pression sur la milice pour qu’elle libère les journalistes.
Il a déclaré que cela était particulièrement important pour les journalistes dont les affaires sont en suspens depuis longtemps et pour ceux qui sont emprisonnés depuis des années sans avoir été clairement inculpés.
Le politologue Faisal Ahmed a déclaré à Al-Mashareq que les Houthis ont toujours été hostiles aux journalistes, tout comme l’Iran, dont le régime réprime les journalistes et la liberté de la presse.
« Les zones contrôlées par les Houthis sont désormais dépourvues de médias indépendants ou partisans. Il ne reste plus que des médias houthis », a déclaré Ahmed.
Il a noté que certains journalistes yéménites ont quitté la profession par peur, mais qu’ils sont toujours « surveillés de près par les Houthis, et leurs messages sur les réseaux sociaux font l’objet d’une surveillance constante ».
De nombreux militants des réseaux sociaux ont été arrêtés pour avoir critiqué les actions de la milice soutenue par l’Iran, a-t-il conclu.