Terrorisme

Incidences des sanctions contre l’Iran pour les entreprises mondiales

Sina Farhadi

Le Bonita Queen est l’un des navires appartenant à Khadija Ship Management, une filiale de la société indienne Mehdi Group sanctionnée en septembre par les États-Unis pour avoir contourné les sanctions et fait passer en contrebande des millions de barils de pétrole à la Syrie. [Photo diffusée sur les réseaux sociaux]

Le Bonita Queen est l’un des navires appartenant à Khadija Ship Management, une filiale de la société indienne Mehdi Group sanctionnée en septembre par les États-Unis pour avoir contourné les sanctions et fait passer en contrebande des millions de barils de pétrole à la Syrie. [Photo diffusée sur les réseaux sociaux]

En imposant une série de sanctions aux sociétés mondiales affiliées au Corps des Gardiens de la révolution islamique (CGRI) ou qui aident l’Iran à contourner les sanctions, les États-Unis affichent le sérieux de leurs efforts visant à couper les ailes de l’Iran, ont expliqué les experts.

La dernière série des sanctions américaines a porté un coup sérieux à la capacité du régime iranien à obtenir des financements illicites, qu’il utilisait pour alimenter les conflits dans la région par l’intermédiaire de la Force al-Qods du CGRI et de ses intermédiaires, ont-ils indiqué à Al-Mashareq.

Le commerce pétrolier de l’Iran, une source essentielle de revenus pour le pays, est l’un des secteurs les plus surveillés et les plus soumis à des pressions.

L’an dernier, le Trésor américain a imposé des sanctions à un important réseau d’expédition qui est dirigé par la FQ-CGRI et Hezbollah libanais, et et lui procurent un soutien financier.

Des expéditions de plusieurs centaines de millions de dollars ont été effectuées par le biais de ce réseau au bénéfice du régime syrien, du Hezbollah et d’autres acteurs illégaux, a indiqué le Trésor dans sa désignation du 4 septembre.

Rostam Qasemi, haut responsable au sein de la FQ-CGRI et ancien ministre iranien du Pétrole, supervise ce réseau, qui englobe des dizaines de gestionnaires, de navires et de facilitateurs, a ajouté le Trésor.

Ce réseau complexe d’intermédiaires permet à la FQ-CGRI de dissimuler son implication dans la vente de pétrole iranien, a-t-il poursuivi.

« La mesure prise par le Trésor à l’encontre de ce réseau tentaculaire fait apparaître de manière très claire que ceux qui achètent du pétrole iranien supportent directement le bras militant et terroriste de l’Iran, la FQ-CGRI », avait alors affirmé le secrétaire au Trésor Steven Mnuchin.

Ces mesures « devraient servir de fort avertissement à tous ceux qui envisageraient de faciliter les ventes de pétrole de la Force al-Qods que les conséquences en seront immédiates », a-t-il ajouté.

Le Groupe Mehdi démasqué

« La portée vaste et complexe des sanctions américaines a surpris le régime iranien », a expliqué l’économiste Behzad Gonabadi à Al-Mashareq.

Elles comprennent la désignation le 20 main d’un ministre du gouvernement iranien et de hauts responsables de la police et de l’armée pour des violations des droits de l’homme.

En juin dernier, le ministre iranien du Pétrole avait reconnu que les États-Unis avaient rendu plus difficile le non-respect des sanctions, le ton de ses remarques révélant « la portée des pressions intolérables imposées au gouvernement iranien », avait alors affirmé Gonabadi.

Le Groupe Mehdi, une compagnie de transport basée en Inde dirigée par Ali Zaheer Mehdi, a été inscrit dans la désignation du réseau d’expédition en septembre, a-t-il précisé.

Selon le Trésor américain, le Groupe Mehdi exploite des navires et en trouve de nouveaux pour transporter le pétrole iranien, en ventilant la gestion de ces bâtiments sur au moins une dizaine de filiales et de sociétés écrans.

Cette société, créée par la FQ-CGRI, contournait les sanctions et faisait transiter des millions de barils de pétrole vers la Syrie par l’intermédiaire de plusieurs de ses filiales, parmi lesquelles la Khadija Ship Management Private Limited, a poursuivi Gonabadi.

Ce réseau opérait dans plusieurs pays, dont Singapour et le Liban, et l’identification publique de son origine et les sanctions imposées sont vues comme « un coup porté à la Force al-Qods », a-t-il ajouté.

Identification de réseaux secrets

« Des dizaines de réseaux secrets opèrent dans la région et dans le monde, et ont été progressivement identifiés et sanctionnés par les État-Unis », a précisé Gonabadi.

Ces réseaux secrets « dilapident depuis des années les ressources du peuple iranien pour les ambitions puériles du Guide suprême de la République islamique [Ali Khamenei] dans la région en ayant recours à des moyens illégaux », a-t-il poursuivi.

« J’estime que tout comme il est dans l’intérêt du peuple iranien de sanctionner la répression intérieure, le fait d’empêcher le financement des milices et des groupes terroristes favorables à la République islamique dans la région est dans son intérêt », a-t-il ajouté.

Selon des analystes iraniens, désigner les sociétés étrangères qui aident l’Iran à contourner les sanctions a augmenté le prix de cette coopération, et en conséquence, le nombre de groupe prêts à le faire a diminué.

Les sanctions qui visent de telles sociétés « coupent intelligemment les routes de commerce du gouvernement iranien », a expliqué à Al-Mashareq Reza Taghipourian, un politologue iranien.

Les tensions qui entourent la vente de pétrole iranien au Venezuela sont le signe de la grande inquiétude de l’Iran quant à la fermeture des dernières portes de sortie du commerce pétrolier, a-t-il indiqué.

« La réalité est que si le régime se retrouve dans l’impossibilité de lever des liquidités par d'autres moyens, il est possible que ses milices affiliées dans la région disparaissent », a-t-il expliqué.

C’est la raison pour laquelle le régime iranien tente d’obtenir de l’or du Venezuela en échange du pétrole et est prêt à courir un tel risque pour l’obtenir, a ajouté Taghipourian.

Répression contre une société chinoise

Le plus vaste réseau de transport chinois, COSCO, a également été inscrit l’an dernier sur cette liste noire du Trésor américain en raison de sa complicité dans le contournement des sanctions contre l’Iran.

Cette mesure « était inattendue », a précisé Taghipourian, soulignant que COSCO possède environ 4 % de tous les super tankers en circulation dans le monde.

Cet embargo contre COSCO « a immédiatement causé une hausse du prix des expéditions de pétrole en Asie et a renchéri les coûts [globaux] d’environ 30 % », a-t-il ajouté.

« Jusqu’à présent, les sanctions américaines ne concernaient pas des sociétés d’une telle ampleur, et personne n’aurait imaginé que cela se produirait », a-t-il poursuivi.

Cela a désormais atteint un point tel que plusieurs responsables du gouvernement chinois ont demandé la levée de ces sanctions contre cette compagnie pendant les négociations commerciales avec les États-Unis, a-t-il indiqué.

Cela a finalement été en partie le cas, a précisé Taghipourian.

« À mon sens, cela a envoyé à toutes les sociétés non iraniennes dans le monde le message clair que si elles devaient ignorer les sanctions à l'encontre de l’Iran, elles mettraient en danger leurs intérêts économiques », a-t-il conclu.

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