Environnement

Désastre possible au Yémen alors que les Houthis empêchent l'entretien du pétrolier Safer

Nabil Abdoullah al-Tamimi à Aden

Image tirée d'une vidéo publiée par le gouvernement yéménite pour illustrer les risques d'une éventuelle marée noire du pétrolier Safer amarré au large du Yémen, mise en ligne le 14 juillet 2019. [Primature yéménite/Twitter]

Image tirée d'une vidéo publiée par le gouvernement yéménite pour illustrer les risques d'une éventuelle marée noire du pétrolier Safer amarré au large du Yémen, mise en ligne le 14 juillet 2019. [Primature yéménite/Twitter]

Alors que le conflit au Yémen fait rage, le pétrolier FSO Safer amarré au large du Yémen en mer Rouge est dans un état de délabrement avancé, créant une menace environnementale, économique et humanitaire potentiellement catastrophique.

Les Houthis (Ansarallah) et leur commanditaire, le régime iranien, sont responsables, car ils n'ont pas permis l'entretien du pétrolier, a déclaré à Al-Mashareq le vice-ministre des Droits de l'homme Nabil Abdoul Hafeez.

« Dieu nous en préserve, si une catastrophe se produit, elle touchera non seulement le Yémen mais aussi tous les pays de la région », a-t-il affirmé.

Bombe à retardement

L'Unité flottante de production, de stockage et de déchargement (FSO) abandonnée, qui contient 1,1 million de barils de pétrole brut, a été décrite comme une « bombe flottante », car sa coque s'est corrodée et l'on estime que ses barils ont libéré des gaz inflammables durant ces cinq dernières années.

Le FSO Safer est amarré à environ huit kilomètres au large du Yémen. [Photo fournie par l'Observatoire des conflits et de l'environnement]

Le FSO Safer est amarré à environ huit kilomètres au large du Yémen. [Photo fournie par l'Observatoire des conflits et de l'environnement]

Une explosion sur le FSO Safer pourrait couler tous les navires à proximité et provoquer une marée noire massive et une catastrophe environnementale, aggravant encore la crise humanitaire au Yémen, avertissent les experts.

Les Nations unies ont tenté d'envoyer une équipe technique pour visiter le navire en juillet 2019 afin d'évaluer l'étendue des dégâts, mais les Houthis ont bloqué ces tentatives.

En fonction de la période de l'année et des courants, une fuite du pétrolier pourrait atteindre le canal de Suez et potentiellement jusqu'au détroit d'Ormuz, a fait savoir Mark Lowcock, secrétaire général adjoint des Nations unies aux affaires humanitaires et coordinateur des secours d'urgence, au Conseil de sécurité des Nations unies.

Les Houthis s'étaient opposés au déploiement d'une équipe d'évaluation et de matériel des Nations unies à Djibouti sur la côte du golfe d'Aden en août, sur la base d'un accord préalable avec les autorités houthies, a-t-il déclaré dans un rapport de septembre 2019.

« Le FSO Safer est une catastrophe en attente et une bombe à retardement, parce qu'il n'a pas reçu les travaux de maintenance nécessaires depuis cinq ans », a déclaré Abdoul Hafeez.

Le gouvernement yéménite a demandé aux Nations unies « par le biais de communications officielles d'intervenir pour empêcher une catastrophe et faire pression sur les Houthis pour qu'ils permettent à l'organisation d'envoyer une équipe technique pour effectuer des travaux de maintenance ».

« Mais la milice houthie ne leur permettra pas de le faire, car le FSO Safer est amarré dans sa zone de contrôle, la milice contrôlant les trois ports d'al-Hodeidah : les ports d'al-Hodeidah, al-Saleef et Ras Issa. »

Une dangereuse monnaie d'échange

Le régime iranien, par le biais de la milice houthie, a plusieurs objectifs qu'il espère atteindre en laissant le navire en mauvais état, a déclaré Abdoul Hafeez.

« Le premier est que le FSO Safer est une bombe à retardement avec laquelle ils peuvent menacer tout le monde », a-t-il expliqué.

« L'Iran a utilisé le FSO Safer comme une menace et une pression en sa faveur par le biais des Houthis contre tous les pays de la région », a-t-il précisé.

Le deuxième objectif « est de se voir payé la valeur du pétrole brut stocké dans le FSO Safer au cas où il serait donné pour être vidé, pour laquelle les Houthis avaient demandé par le passé 70 millions de dollars ».

Les Houthis ont menacé de faire sauter le FSO Safer lorsque l'armée yéménite a lancé son opération pour libérer la province d'al-Hodeidah, a déclaré l'analyste politique Faisal Ahmed à Al-Mashareq.

Cela a incité les Nations unies à intervenir et à mettre fin à l'opération militaire pour des raisons humanitaires, en vertu de l'Accord de Stockholm signé en décembre 2018.

Le fait que l'Iran ne soit pas intervenu et ait poussé les Houthis à autoriser des travaux de maintenance sur le pétrolier confirme « la possibilité qu'il l'utilise comme une carte dans sa guerre contre les pays de la région », a-t-il déclaré.

Le régime iranien pourrait également l'utiliser « pour assouplir les sanctions économiques qui lui sont imposées, car l'explosion du pétrolier stopperait l'exportation de pétrole d'Arabie Saoudite et d'autres pays du Golfe », a-t-il ajouté.

Ahmed a appelé les Nations unies à agir rapidement pour faire pression sur les Houthis « et à ne pas attendre que la catastrophe se produise, car les dommages causés au Yémen et aux Yéménites en seraient une catastrophe humanitaire qui exacerberait les tragédies de la guerre, qui est entrée ce mois-ci dans sa sixième année ».

Risques sanitaires, environnementaux et économiques

Le FSO Safer risque de devenir « la plus grande catastrophe environnementale » du monde, a déclaré le ministre de l'Information Mouammar al-Eryani.

Si le pétrolier explose ou si les barils fuient, la marée noire pourrait être quatre fois et demie plus importante que celle de l'Exxon Valdez en 1989, a déclaré le Conseil atlantique dans un rapport d'avril 2019.

Une telle fuite entraînerait la fermeture du port d'al-Hodeidah pendant plusieurs mois et créerait une pénurie de carburant et de produits essentiels, a déclaré al-Eryani dans un communiqué le 15 mars.

Le FSO Safer est exploité par la Yemeni Oil Company depuis près de 30 ans, mais il a été « laissé sans entretien pendant toutes les années de guerre », a rapporté l'économiste Abdoul Aziz Thabet à Al-Mashareq.

« Le climat de la région, qui est caractérisé par une température et une humidité élevées, fait qu'il se corrode plus rapidement », a-t-il déclaré.

Une marée noire endommagerait gravement la diversité biologique de la mer Rouge, y compris le récif corallien et les poissons, ce qui aurait des conséquences sur les moyens de subsistance des pêcheurs, a-t-il ajouté.

Une fuite poserait également un risque pour la navigation internationale et les exportations de pétrole, a déclaré Thabet, ajoutant qu'une telle catastrophe réduirait de 15 % les exportations d'énergie vers le monde, ce qui aurait un impact négatif sur l'activité commerciale mondiale.

Les conséquences pour l'économie mondiale seraient désastreuses, a-t-il conclu, exhortant la communauté internationale à faire pression sur les Houthis pour qu'ils autorisent les travaux de maintenance sur le pétrolier.

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Nous félicitons le peuple yéménite et tous les peuples arabes et musulmans au début du mois sacré de Ramadan. Meilleurs vœux! Le peuple libre du Yémen.

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