Manifestations

Des sanctions imposées aux financiers du Hezbollah

Nohad Topalian à Beyrouth

Des soutiens des partis libanais du Hezbollah et d'Amal affrontent des manifestants dans le centre-ville de Beyrouth. [Nabil Ismail/Al-Mashareq]

Des soutiens des partis libanais du Hezbollah et d'Amal affrontent des manifestants dans le centre-ville de Beyrouth. [Nabil Ismail/Al-Mashareq]

Lors d'une nouvelle série de sanctions contre le Hezbollah, le Département du Trésor américain a désigné la semaine dernière trois hommes d'affaires libanais (Nazem Said Ahmad, Saleh Assi et Tony Saab) pour leur implication dans le financement direct du parti.

Dans un communiqué du 13 décembre, le Trésor a déclaré que son Bureau de contrôle des avoirs étrangers avait sanctionné les principaux blanchisseurs d'argent et leurs sociétés affiliées opérant au Liban et en République démocratique du Congo (RDC).

Certaines de ces sociétés « ont généré des dizaines de millions de dollars pour le Hezbollah, ses financiers et leurs activités malveillantes », a précisé ce communiqué.

« Ces désignations soulignent l'étendue des activités économiques illicites du Hezbollah et de ses affiliés qui privilégient les intérêts économiques du groupe terroriste par rapport à ceux du peuple libanais », a-t-il ajouté.

Des manifestants libanais affrontent des partisans du Hezbollah et d'Amal dans le centre-ville de Beyrouth. [Nabil Ismail/Al-Mashareq]

Des manifestants libanais affrontent des partisans du Hezbollah et d'Amal dans le centre-ville de Beyrouth. [Nabil Ismail/Al-Mashareq]

« Le Hezbollah continue d'utiliser des entreprises en apparence légitimes comme sociétés-écrans afin de lever et blanchir des fonds dans des pays comme la RDC où il peut faire appel à la corruption et aux connexions politiques pour obtenir un accès injuste au marché et frauder le fisc », a expliqué le secrétaire au Trésor Steven T. Mnuchin.

Les États-Unis « continueront à agir contre les financiers du Hezbollah comme Nazem Said Ahmad et Saleh Assi, qui ont utilisé des systèmes de blanchiment d'argent et d'évasion fiscale pour financer des actions terroristes et leur propre style de vie somptueux alors que le peuple libanais souffre », a-t-il déclaré.

Selon le Trésor, Ahmad, qui réside au Liban, possède une grande collection d'œuvres d'art qu'il utilise comme couverture pour ses activités de blanchiment d'argent. Il est l'un des plus grands donateurs du Hezbollah et travaille dans le commerce de diamants.

« Les marchands d'art et de produits de luxe doivent faire attention aux manœuvres des blanchisseurs d'argent qui cachent des fonds personnels dans des actifs de grande valeur afin de tenter d'atténuer les effets des sanctions américaines », a déclaré le secrétaire adjoint Justin G. Muzinich.

Assi, qui habite en RDC, a blanchi de l'argent par l'intermédiaire de ses sociétés de commerce de diamants et a fourni un appui financier au financier du Hezbollah Adham Hussein Tabaja, qui figure sur la liste des sanctions américaines.

Saab, un comptable vivant au Liban, avait aidé Assi.

Violence contre les manifestants

Alors qu'il subit la pression des sanctions économiques, le Hezbollah s'est lancé dans une série d'attaques verbales et physiques contre les civils libanais qui participent à des manifestations principalement pacifiques contre la crise économique du pays.

Le chercheur et militant politique Luqman Salim a rapporté à Al-Mashareq que la violence du Hezbollah contre les manifestants est organisée et sert un programme politique, derrière lequel se trouve l'Iran et son Corps des Gardiens de la révolution islamique (CGRI).

Le Hezbollah « a menacé de recourir à la violence depuis les premiers jours des manifestations, et l'a utilisée de plusieurs façons, notamment avec des raids à moto sur la place des Martyrs », a précisé Salim.

Mais ce qui est plus dangereux encore que les tentatives du Hezbollah pour étouffer les manifestations à Beyrouth et dans ses bastions du sud, c'est la justification de la violence politique par le chef du Hezbollah, Hassan Nasrallah, a-t-il affirmé.

Selon Salim, le Hezbollah « connaît une crise du discours politique ».

Dans un discours prononcé le 13 décembre, Nasrallah a accusé les États-Unis d'essayer de « faire chanter » le peuple libanais, de salir l'image de son parti et de diffuser de « fausses informations » sur les violences perpétrées par ses partisans lors des manifestations.

Le 11 décembre, a ajouté Salim, les partisans du Hezbollah ont brûlé la tente qu'il avait montée sur la place des Martyrs de Beyrouth, où il avait dirigé des sessions de dialogue et des séminaires.

Impact des sanctions

Nasrallah « était trop fier lorsqu'il a affirmé que son parti était au-dessus des sanctions et ne serait pas touché par celles-ci », pour ensuite faire marche arrière et dire que l'impact est collectif et que les sanctions ont atteint le peuple libanais et son parti, a indiqué Salim.

Ce qui a un plus grand impact sur le Hezbollah que les sanctions américaines est « l'effondrement économique de tout le réseau de corruption », a affirmé Makram Rabah, maître de conférence au département d'Histoire de l'Université américaine de Beyrouth.

Les sanctions économiques « ont un impact sur le Hezbollah et l'Iran », a-t-il indiqué à Al-Mashareq, ajoutant qu'elles ont amoindri la capacité de l'Iran à venir au secours des factions affiliées dans les pays où il est présent.

Le Hezbollah intensifie les violences pour mettre fin aux manifestations politiques, a-t-il expliqué, car il pense pouvoir convaincre la société civile que le chaos est bien pire que de voir son parti rester dans le système.

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