La reprise des activités terroristes d'al-Qaïda dans la province d'Abyan, dans le sud du Yémen, est le résultat de la situation de sécurité instable que le groupe a exploité à son avantage, ont expliqué des observateurs à Al-Mashareq.
Cette récente recrudescence d'activités néfastes peut aussi être attribuée au soutien financier que le groupe reçoit de plusieurs sources, parmi lesquelles l'Iran, ont-ils déclaré.
Le Corps des Gardiens de la révolution islamique (CGRI) possède des liens étroits avec al-Qaïda, comme le prouve le fait que l'Iran héberge un grand nombre d'éléments d'al-Qaïda recherchés par des autorités internationales de sécurité, ont indiqué des experts.
Le CGRI est aussi l'un des soutiens essentiels des Houthis (Ansarallah) au Yémen, ont-ils précisé, notant que cette aide apportée à la milice a prolongé la guerre et créé des conditions dans lesquelles des groupes extrémistes comme al-Qaïda peuvent prospérer.
L'activité d'al-Qaïda au Yémen avait baissé depuis mars 2015, lorsque les forces yéménites appuyées par la coalition arabe avaient chassé le groupe de toutes les régions qu'il avait capturé, dans le cadre de l'opération Resolute Storm.
Parmi ces zones se trouvaient al-Mukalla, capitale provinciale de l'Hadramaout, ainsi que plusieurs districts dans les provinces d'Abyan et de Shabwa dans le sud du pays.
La bataille n'est pas terminée
« La reprise de certaines des activités d'al-Qaïda, y compris l'attaque de plusieurs postes de contrôle dans la province d'Abyan, prouve que la bataille contre al-Qaïda n'est pas encore terminée », a déclaré Saeed al-Jamahi, spécialiste des groupes extrémistes.
Cela est évident, a-t-il affirmé, « bien que les succès obtenus contre le groupe ont réussi à le mettre dans une situation qui est la pire qu'il connaît depuis des années ».
Quant à la reprise des activités du groupe, en particulier dans les districts d'Ahwar et de Lawdar à Abyan, al-Jamahi a indiqué à Al-Mashareq que cela était prévisible.
Ces zones sont considérées comme les « incubateurs les plus importants » du groupe, a-t-il poursuivi, car c'est là qu'il a établi son petit « État » qui n'a pas duré longtemps.
« Je pense que la situation dans le pays, avec toutes ses complications, ne donne pas l'espoir d'une élimination réelle des groupes terroristes », a-t-il confié. « Cela exige un environnement cohésif, fort et stable, ce qui n'existe pas au [Yémen] à l'heure actuelle. »
Al-Jamahi a ajouté qu'il pense que la situation « continuera à osciller entre des succès partiels et des attaques terroristes ponctuelles ».
« Al-Qaïda se contentera de menaces limitées pour prouver son existence et engendre davantage de chaos », a-t-il fait savoir, ajoutant qu'il sera pourtant difficile pour le groupe de revenir au niveau d'activité élevé qu'il a maintenu par le passé.
« L'élimination complète d'al-Qaïda ne peut être accomplie que par l'existence d'un État stable politiquement, économiquement et socialement, lequel serait capable de combattre l'idéologie extrémiste non seulement sur le plan militaire, mais dans tous les domaines où l'extrémisme et le radicalisme peuvent se développer », a expliqué al-Jamahi.
Exploitation de l'instabilité du Yémen
Au cours des dernières années, al-Qaïda a été la cible d'une guerre organisée menée par les forces yéménites, lesquelles ont contenu le groupe et ont décimé ses rangs, a rapporté le politologue Waddah al-Jalil à Al-Mashareq.
Beaucoup de ses camps et de ses zones d'influence d'Abyan, de Shabwa et de l'Hadramaout ont été pris pour cibles, a-t-il déclaré, notant que plus récemment le groupe a profité de l'instabilité nationale pour se regrouper et se relancer.
« Ayant subi de nombreuses attaques qui ont détruit ses bases, tué nombre de ses éléments et lui ont fait perdre des zones qu'il contrôlait, le groupe a peut-être réussi à se regrouper », a-t-il déclaré.
« Il existe de grands espaces, des zones reculées et des montagnes où il peut se réfugier, sans parler du retour de ses sources de financement », a-t-il indiqué.
L'instabilité politique et le manque de présence sécuritaire dans les provinces du sud a permis à al-Qaïda de refaire son image, a expliqué al-Jalil, « et cela a laissé des failles de sécurité qui ont permis au groupe de former des cellules ».
Al-Qaïda cherche à se regrouper, à créer de nouveaux camps d'entraînement, à former ses combattants et au final à lancer de nouvelles attaques, a-t-il ajouté.
Al-Jalil a prévenu qu'il serait dangereux de permettre à al-Qaïda de se régénérer, notamment car les provinces du sud n'ont pas été en mesure de mettre en place une stabilité suffisante pour contenir le groupe.
« Une fois que l'armée yéménite a annoncé avoir battu le groupe et l'avoir chassé des zones où il était présent, al-Qaïda a tiré parti de la longue guerre pour acquérir de l'argent et des armes », a fait savoir Adel Al-Shujaa, membre du comité général du Congrès général du peuple.
Avec ses attaques contre des postes de contrôle, l'objectif d'al-Qaïda est de renverser la situation avec le gouvernement légitime et faire croire qu'il a échoué, a-t-il conclu pour Al-Mashareq.