Terrorisme

L'Iran est un refuge pour al-Qaïda, affirment des analystes

Waleed Abou al-Khair au Caire

Un poster du FBI demande des informations menant à l'arrestation de Saïf al-Adel, accusé d'avoir orchestré deux attentats suicides contre les ambassades américaines au Kenya et en Tanzanie le 7 août 1998. [Photo diffusée sur les réseaux sociaux]

Un poster du FBI demande des informations menant à l'arrestation de Saïf al-Adel, accusé d'avoir orchestré deux attentats suicides contre les ambassades américaines au Kenya et en Tanzanie le 7 août 1998. [Photo diffusée sur les réseaux sociaux]

Le Corps des Gardiens de la révolution islamique (CGRI) entretient des liens forts avec al-Qaïda, ont indiqué des experts à Al-Mashareq, comme le prouve le fait que l'Iran héberge de nombreux éléments d'al-Qaïda fuyant les autorités de sécurité internationales.

Parmi eux se trouve Saïf al-Adel et Adel Radi ben Saqr al-Wahabi al-Harbi, accusés d'avoir organisé deux attentats suicides contre les ambassades américaines au Kenya et en Tanzanie le 7 août 1998, il y a vingt ans de cela ce mois-ci.

Les relations entre al-Qaïda et l'Iran ont commencé lorsqu'Oussama ben Laden dirigeait le groupe, selon Nabil Naeem, membre fondateur du Djihad islamique en Égypte, qui a depuis renoncé à l'extrémisme.

Ces relations se sont poursuivies après la mort de ben Laden, a-t-il fait savoir à Al-Mashareq.

Un poster publié par le Département d'État des États-Unis offre une récompense de 5 millions de dollars pour l'arrestation d'Adel Radi Saqr al-Wahabi al-Harbi.

Un poster publié par le Département d'État des États-Unis offre une récompense de 5 millions de dollars pour l'arrestation d'Adel Radi Saqr al-Wahabi al-Harbi.

L'ambassade des États-Unis à Nairobi avait été détruite en 1998 par une attaque revendiquée par al-Qaïda. Des enquêtes ont mis en cause Saïf al-Adel et Adel al-Harbi. [Photo diffusée sur les réseaux sociaux]

L'ambassade des États-Unis à Nairobi avait été détruite en 1998 par une attaque revendiquée par al-Qaïda. Des enquêtes ont mis en cause Saïf al-Adel et Adel al-Harbi. [Photo diffusée sur les réseaux sociaux]

« Certaines informations indiquent que ces liens sont nés en 1992 », a-t-il rapporté, précisant que « l'Iran est le refuge principal des éléments et des leaders d'al-Qaïda recherchés internationalement pour terrorisme ».

Le général Qassem Soleimani, commandant de la force Qods du CGRI, « est l'architecte des relations entre le CGRI et al-Qaïda », a affirmé Naeem.

Avant qu'il soit tué en 2008, Imad Mughniyeh, commandant militaire du Hezbollah, a également « joué un rôle important dans la formation des éléments [d'al-Qaïda], particulièrement en ce qui concerne les méthodes de pièges et de pose de bombes », a-t-il poursuivi.

Les rapports qu'al-Qaïda entretient avec le CGRI et les services de renseignements iraniens sont forts, a-t-il déclaré, notant que « le symbolisme de la relation a été manifeste lorsque l'Iran a accueilli la famille d'Oussama ben Laden, l'ancien chef d'al-Qaïda ».

Les deux camps attisent les flammes du sectarisme depuis des années, a fait remarquer Naeem, « le CGRI se présentant comme le protecteur et défenseur des droits des chiites, et al-Qaïda utilisant la même tactique auprès de la communauté sunnite ».

Accueil de terroristes recherchés

Les enquêtes sur les attentats du 11 septembre 2001 aux États-Unis « ont confirmé que l'Iran a fourni un soutien logistique et matériel aux éléments qui ont mené l'attaque, et ont facilité leurs déplacements », a fait savoir à Al-Mashareq le major général Mansoor al-Shehri, ancien attaché militaire saoudien.

« Beaucoup de ceux qui sont recherchés pour des crimes [terroristes] ont été hébergés par l'Iran, dont Adel Radi [ben Saqr al-Wahabi al-Harbi] et Saïf al-Adel, pour leur rôle dans l'attentat à la bombe contre les ambassades américaines du Kenya et de Tanzanie », a-t-il ajouté.

Cela expose l'Iran à des poursuites criminelles internationales, a-t-il précisé, car ces individus « sont recherchés par plusieurs pays, ainsi que par Interpol ».

Adel Radi, qui habite en Iran, est 18e sur la liste des personnes les plus recherchées par l'Arabie saoudite, car « il s'est rendu en Afghanistan pour rejoindre al-Qaïda et a joué un rôle majeur dans la promotion de l'idéologie du groupe sur internet », a poursuivi al-Shehri.

« Il a également été inscrit sur la liste noire du Département du Trésor des États-Unis, qui a offert une récompense de 5 millions de dollars pour toute information menant à son arrestation, la faisant plus tard passer à 10 millions, et Interpol a publié en 2005 une notice rouge pour son arrestation », a-t-il déclaré.

Adel Radi est dorénavant spécialisé dans « la coordination des déplacements des éléments et des fonds à travers l'Iran, et la coordination des déplacements des éléments en Asie du Sud et au Moyen-Orient », a fait savoir al-Shehri .

Son travail est lié à celui d'Ezedin Abdel Aziz Khalil, facilitateur et financier supérieur d'al-Qaïda, mieux connu sous le nom d'Abou Yasin al-Suri, a-t-il précisé.

Le vrai nom de Saïf al-Adel est Mohammed Salah al-Din Zaïdan, a fait savoir al-Shehri, notant que l'on pensait que son nom était Mohammed Makkawi jusqu'à ce que le vrai Makkawi soit arrêté par les autorités égyptiennes en 2012.

Il a alors été découvert qu'al-Adel avait utilisé le nom de Makkawi pour éloigner les autorités de ses traces, a-t-il rapporté.

Saïf al-Adel était officier dans l'armée égyptienne avant de la quitter pour rejoindre al-Qaïda. Il a été responsable des camps d'entraînement du groupe et a été temporairement nommé chef adjoint le 17 mai 2011 après la mort de ben Laden.

« En plus des opérations contre les intérêts américains, parmi lesquelles le double attentat à la bombe au Kenya et en Tanzanie, il avait planifié et ordonné depuis son refuge en Iran l'attaque à Riyad, en Arabie saoudite, en 2003 », a continué al-Shehri.

« Il était à l'époque le leader militaire du groupe. Ces attentats à la bombe ont fait 35 victimes, dont neuf Américains, et la récompense a ensuite été augmentée, passant de 5 à 10 millions de dollars », a-t-il noté.

Un refuge pour al-Qaïda

« Le CGRI a mis en place une zone entière pour servir de protection aux émirs et éléments d'al-Qaïda ayant trouvé refuge en Iran », a déclaré le major général Yahya Mohammed Ali, retraité de l'armée égyptienne, analyste en stratégie et spécialiste des groupes terroristes.

« Cette zone est montagneuse et a été utilisée pendant la guerre entre l'Iran et l'Irak comme camp de détention pour les soldats irakiens », a-t-il indiqué à Al-Mashareq. « Elle se trouve à quinze kilomètres au nord du mausolée de [Ruhollah] Khomeini, près du cimetière de Behesht-e Zahra et de l'autoroute reliant Téhéran et Qom. »

Vient s'y ajouter le camp de la ville de Tang-e Kenesht, dans la province de Kermanshah, et une section spéciale pour al-Qaïda dans le camp de Sahel al-Rouh près du port de Bandar Anzali, sur la côte de la mer Caspienne, a-t-il précisé.

Des rapports des médias et des renseignements confirment « l'existence de camps en Irak pour l'entraînement des éléments d'al-Qaïda par le CGRI, plus spécifiquement dans le district d'Aïn al-Tamr de la province de Kerbala », a poursuivi Ali.

Parmi les éléments importants d'al-Qaïda s'étant réfugiés en Iran au fil des années se trouvait Mohsen Ayed Fadhil al-Fadhli, « l'un des éléments koweïtiens les plus dangereux et l'un des plus éminents leaders d'al-Qaïda en Iran », a-t-il indiqué.

Al-Fadhli a été tué en Syrie en 2015 par une frappe aérienne.

D'autres noms importants incluent Souleiman Bou Ghaith, gendre d'Oussama ben Laden ayant servi de porte-parole pour le groupe, et le Jordanien Abou Mousab al-Zarqawi, premier émir d'al-Qaïda en Irak, tué en 2006.

Se trouvent également sur cette liste Abdoullah Ahmed Abdoullah, aussi appelé Abou Mohammed al-Masri, un « préparateur opérationnel » recherché en lien avec les attentats à la bombe de 1998 au Kenya et en Tanzanie, et Abd al-Aziz al-Masri, instructeur dans les camps afghans d'al-Qaïda ayant participé à une tentative infructueuse de détournement d'un avion de ligne pakistanais en décembre 2000.

Cela inclut aussi Abou al-Leith al-Libi, haut dirigeant d'al-Qaïda en Afghanistan et porte-parole du groupe, et Abou Doujana al Basha, aussi appelé Abou Doujana al-Masri, aujourd'hui disparu, qui était connu comme le soi-disant « commandant caché » ayant joué un rôle essentiel dans la création de la branche d'Asie du Sud d'al-Qaïda.

Parmi eux se trouvait le Libyen Abou Anas al-Libi, aujourd'hui décédé, spécialiste informatique d'al-Qaïda, inculpé pour son rôle dans les attentats à la bombe contre les ambassades en 1998, ainsi que Mohammed Khalil al-Hakaima, auteur du libre « La gestion de la sauvagerie », connu comme dirigeant des médias et de la propagande du groupe en Iran.

Ahmad Hassan Abou al-Khair al-Masri, qui serait le commandant en second du groupe, a été tué en 2017 dans la province syrienne d'Idlib, et est l'un des autres noms qui viennent s'ajouter à la longue liste de chefs d'al-Qaïda ayant un lien avec l'Iran.

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