La pose de mines par la milice houthie soutenue par l'Iran au Yémen depuis le coup d'État de 2014 est l'un des plus graves crimes contre l'humanité et crimes de guerre commis par la milice contre les Yéménites, aujourd'hui et à l'avenir.
Les Houthis ont posé des mines dans toutes les zones dont ils se sont emparés ou dont ils se sont retirés, ainsi que celles encore sous leur contrôle et dans les zones de contact militaire. Ils l'ont fait sans discernement et sans faire de différence entre les sites militaires et civils. Ces mines ont été posées dans des maisons, des écoles, des mosquées, des marchés, des zones de pâturage et d'agriculture, et autour des ressources en eau, des institutions publiques, des routes principales et secondaires, des aéroports, des ports, et même des eaux territoriales et des voies de navigation internationales.
Selon le Programme national de déminage, ces mines ont mutilé ou tué plus de 7000 personnes, pour la plupart des femmes et des enfants, laissant des milliers d'amputés avec des handicaps physiques permanents. Des milliers de têtes de bétail ont également été tuées par ces engins, les vaches, les moutons et les chameaux des zones de pâturage des gouvernorats d'al-Hodeidah, Marib, al-Jawf, al-Dhale et Shabwa ayant souffert de la présence des mines.
Les mines houthies sont à l'origine de centaines d'histoires tragiques de victimes civiles, parmi lesquelles des femmes, des enfants et des personnes âgées ; l'une de ces histoires est celle de Nasser Mouhammad, âgé de 13 ans, qui a perdu un œil et subi de multiples blessures lorsqu'une mine a explosé alors qu'il jouait près de chez lui, et qui porte encore de profondes cicatrices sur le corps.
La répartition géographique des victimes de mines et des EEI au Yémen entre juillet 2014 et décembre 2019 montre que le gouvernorat de Taiz se classe au premier rang pour le nombre de victimes avec un total de 417 morts et 162 blessés parmi les enfants, femmes et personnes âgées, sur 1699 morts et 604 blessés dans les gouvernorats de Taiz, al-Hodeidah, Hadramaout, Marib, al-Bayda, Lahj, al-Jawf, Amanat Sanaa, al-Dhale, Aden, Abyan, Shabwa, Ibb, Sanaa, Hajjah, Saada, Amran, Dhamar et al-Mahweet.
L'organisation Rights Radar, basée aux Pays-Bas, a publié début 2020 un rapport sur les victimes des mines au Yémen, intitulé « Yémen : Jardins de la mort », qui révèle qu'entre 2015 et 2020, les mines des Houthis ont coûté la vie à 580 personnes, dont 104 enfants et 60 femmes, et blessé 457 personnes, dont 288 hommes, 113 enfants et 56 femmes.
Selon Rights Radar, le gouvernorat de Taiz arrive en tête de la liste des victimes avec 160 morts, suivi par al-Hodeidah avec 134 morts, et al-Bayda avec 94 morts.
Entre le 1er janvier et le 25 août 2020, al-Hodeidah a connu la plus grande part de victimes des mines houthies, avec un total de 52 morts et 31 blessés sur 132 tués et 127 blessés dans les gouvernorats d'al-Hodeidah, al-Jawf, Taiz, al-Bayda, al-Dhale, Marib, Hajjah, Sanaa, Saada, Aden et Lahj.
Malgré leur gravité, ces chiffres ne reflètent pas l'ampleur de la catastrophe et le nombre réel de victimes des mines des Houthis, qui augmente quotidiennement à cause de la poursuite de la guerre et d'un manque de coordination entre les différents organismes de surveillance, ce qui empêche la communication de chiffres précis. Le Programme national de déminage doit donc élargir sa base de données pour y inclure la documentation des organisations non gouvernementales sur le nombre de victimes de mines sur l'ensemble du territoire yéménite.
Les rapports publiés par le Programme national de déminage ont confirmé que les mines posées par les Houthis ne faisaient pas partie de l'arsenal de l'armée yéménite avant 2014, et qu'elles étaient fabriquées localement par les Houthis sous la supervision d'experts du Hezbollah libanais et du Corps des Gardiens de la révolution islamique (CGRI) iranien. Les rapports indiquent également que ces mines ont été construites avec du nitrate d'ammonium et du TNT.
Le général de brigade Amin Saleh al-Aqili, directeur du Programme national de déminage, a indiqué que la milice houthie utilise du nitrate d'ammonium (un composant important dans beaucoup de types d'explosifs utilisés dans l'exploitation minière, car il est mélangé à du fioul et détoné avec une charge explosive), en plus de TNT comme explosif dans le réceptacle métallique.
Bien que le Yémen ait signé le traité d'Ottawa en 1997 et adopté une législation qui pénalise et interdit la fabrication, la conception, l'importation, l'exportation, la possession, le transfert et la pose de mines, et bien que le stock de mines de l'armée yéménite ait été détruit en 2007 et que le Yémen envisage de déclarer son territoire exempt de mines d'ici 2020, la fabrication et la pose de centaines de milliers de mines par les Houthis ont ramené le Yémen à la case départ.
Pire encore, les Houthis, sous la supervision du Hezbollah et d'experts iraniens, ont transformé des mines antichars en mines antipersonnel en les fixant à une plaque de pression (à pédales) qui sert de système de déclenchement. Ces plaques peuvent être antichars ou antipersonnel, et la pression d'activation peut être de trois à cinq kilos, ce qui signifie qu'un petit enfant peut activer une mine antichar dont le contenu explosif peut atteindre 10 kilos.
Les crimes des Houthis ne s'arrêtent pas là, puisqu'ils ont également fabriqué des EEI à partir d'explosifs conventionnels comme des roquettes, des obus de char ou d'artillerie. Ils ont également camouflé des mines et des EEI en pierres pour qu'ils ressemblent à des éléments naturels, et ont fabriqué des bombes à tubes en chlorure de polyvinyle (plastique) pouvant contenir jusqu'à 30 kilos d'explosifs, un mélange de nitrate d'ammonium plus dangereux que les explosifs classiques.
Les Houthis utilisent souvent la technologie infrarouge pour activer les EEI et les mines camouflées sur les routes publiques sans faire de distinction entre les cibles militaires et civiles, les hommes ou les femmes, les personnes âgées ou les enfants, les personnes ou les animaux. La victime déclenche l'appareil dès qu'elle s'en approche en activant un capteur infrarouge passif.
Les engins explosifs peuvent également être activés par la victime au moyen de fils de pression, semblables à des plaques de pression, qui s'activent lorsque la victime marche dessus ; ou par des minuteries analogiques qui sont les interrupteurs de temporisation d'une machine à laver ou d'anciennes minuteries d'alarme ; ou par détonation à distance.
Dans leurs efforts pour cibler les équipes de déminage et infliger le plus grand nombre de victimes civiles, les Houthis ont modifié les plus grosses mines pour y inclure un dispositif anti-soulèvement, qui les fera exploser dès que l'on tentera de les enlever.
Ce terrorisme houthi soutenu par l'Iran ne se limite pas à la terre ferme, puisque la milice a également fabriqué et installé des mines marines en mer Rouge et dans le détroit de Bab-el-Mandeb pour cibler les navires commerciaux et les pétroliers, et menacer les voies de navigation internationales.
Ces dernières années, des dizaines d'accidents impliquant des navires marchands et des bateaux de pêche entrant en collision avec des mines marines ont été enregistrés, et des centaines de pêcheurs ont été tués et blessés le long de la côte, parmi lesquels le pêcheur Abdoullah Lahji, qui a trouvé la mort dans l'explosion d'une mine marine alors qu'il était en train de gagner sa vie.
La coalition arabe dirigée par l'Arabie saoudite a annoncé avoir détecté et détruit 157 mines marines dans le cadre de ses efforts pour assurer la sécurité de la navigation maritime et des voies de commerce internationales.
Efforts acharnés contre les mines
Le gouvernement légitime, par le biais du Programme national de déminage, des équipes du génie militaire du ministère de la Défense, et en partenariat avec le Programme des Nations unies pour le développement (PNUD), le Projet saoudien de déminage (MASAM) et les États et organisations qui les soutiennent, a fait de grands progrès dans l'élimination et la destruction des mines et la sensibilisation à leurs dangers. Il a également aidé les victimes avec des opérations de chirurgie plastique et en donnant des membres artificiels, ainsi qu'en réhabilitant les victimes et en les intégrant dans la société malgré les conditions économiques, politiques et sécuritaires difficiles au Yémen en raison de la guerre continue déclenchée par le coup d'État des Houthis.
Dans le cadre du plan d'intervention d'urgence approuvé par le gouvernement, le Programme national de déminage a permis de déminer 28 zones (sur un total de 291 333 mètres carrés), de marquer 1 332 006 mètres carrés, de nettoyer et déminer 646 455 mètres carrés supplémentaires et de détruire 14 031 mines antipersonnel, 621 531 mines antichars, des résidus de la guerre et des EEI. De plus, 1 287 170 personnes ont été ciblées par des campagnes de sensibilisation, en coopération avec l'UNICEF, sur les risques posés par les mines.
En outre, les équipes de déminage soutenues par le PNUD ont retiré de janvier à octobre 2019 532 mines antipersonnel, 9081 mines antichars, onze mines navales et 25 842 résidus de la guerre et munitions non explosées.
Du 1er juillet 2018 au 14 août 2020, les équipes du MASAM ont nettoyé une zone totale de 12 965 934 mètres carrés et retiré 2241 mines antipersonnel, 55 126 mines antichars, 117 298 munitions non explosées et 5033 EEI, pour un total de 179 698 objets retirés depuis le début du projet.
Le projet MASAM, affilié au Centre d'aide humanitaire et de secours du Roi Salmane, a joué un rôle majeur pour apporter de l'espoir aux Yéménites en soutenant le Programme national de déminage avec des dispositifs et des équipements d'ingénierie, en mettant en œuvre des activités communes et en établissant des équipes de déminage spécialisées dans toutes les zones libérées. Cela a permis aux personnes déplacées à l'intérieur du pays de revenir dans leurs foyers et leurs régions d'origine. Le MASAM a également fourni des soins médicaux et un soutien humanitaire aux victimes de mines.
L'utilisation excessive par les Houthis de mines antipersonnel, antichars et modifiées, et d'engins explosifs improvisés, ainsi que leur pose aléatoire, sans cartes, dans des villages et des villes peuplés, et la propagation des restes de guerre constituent une menace permanente pour la vie de millions de civils. Ces explosifs perturbent la vie publique et les intérêts des gens et exacerbent leurs souffrances humaines. Ils représentent un obstacle aux efforts de développement, et leurs effets catastrophiques et les risques environnementaux qu'ils posent se feront sentir pendant des décennies, bien après la fin de la guerre.
Bien que la question des « mines houthies » ait été et reste une question centrale des pourparlers de paix et un des points principaux de l'accord de Stockholm, l'envoyé des Nations unies pour le Yémen Martin Griffiths a réitéré dans ses exposés au Conseil de sécurité que la remise des cartes des mines posées par les Houthis soutenus par l'Iran est toujours impossible, tout comme la volonté de la milice de cesser d'utiliser des mines.
Et je me demande si la communauté internationale, les Nations unies et le Conseil de sécurité vont tourner le dos au crime de fabrication et de conversion de mines et de leur pose aléatoire dans des zones peuplées du Yémen, où des milliers d'enfants, de femmes, de personnes âgées et même d'animaux sont victimes de mines. Ou bien vont-ils se tenir aux côtés des victimes et de leurs familles en traduisant les dirigeants houthis en justice et en les obligeant à rendre des comptes ? Après tout, l'utilisation de mines est un crime de guerre et un crime contre l'humanité.