Terrorisme

Des responsables d'Arsal inquiétés par des messages menaçants

Par Nohad Topalian à Beyrouth

Plusieurs responsables d'Arsal ont reçu des SMS menaçants provenant probablement de groupes extrémistes. [Ahmed Aqtai]

Plusieurs responsables d'Arsal ont reçu des SMS menaçants provenant probablement de groupes extrémistes. [Ahmed Aqtai]

Des responsables de la ville frontalière libanaise d'Arsal indiquent à Al-Mashareq qu'ils ont reçu des messages menaçants sur leurs téléphones portables.

Ils présument que ces messages viennent d'extrémistes affiliés avec « l'État islamique en Irak et au Levant » (EIIL) ou le Front al-Nosra (FAN), ont-ils déclaré, et qu'ils pourraient être une réaction à leur coopération avec les forces armées du Liban.

Entre le 25 et le 27 mars, Rima Karnabi, maire adjointe d'Arsal, et les leaders de communauté Mohammed Alouli et Mohammed Saadeddine Ezzeddine ont reçu des menaces de mort sur leurs téléphones portables.

Les agences de sécurité enquêtent sur ce problème, ont-ils expliqué à Al-Mashareq.

Ce n'est pas la première fois que les habitants d'Arsal reçoivent des menaces venant d'extrémistes.

En juin 2016, plusieurs résidents, dont le maire d'Arsal, Bassel al-Hujairi, ont reçu des messages menaçants.

Suite aux élections municipales en mai dernier, qui ont mis en place l'administration locale ayant adopté une position ferme contre les extrémistes, l'EIIL et le FAN, maintenant appelé Front Fatah al-Cham, auraient publié une « liste de cibles » contenant les noms de dix habitants .

SMS de menaces

Karnabi a indiqué avoir reçu le premier message menaçant le 25 mars.

Ce message la qualifiait de « kâfir » (infidèle) et « intimait que je ne serais pas laissée sans châtiment, qui arriverait bientôt », a-t-elle rapporté à Al-Mashareq.

Dans le second message, reçu le 27 mars, on lui disait qu'elle servirait « d'exemple pour tous ceux qui chercheraient l'aide des infidèles ».

Immédiatement après avoir reçu la première menace, « j'ai contacté la direction des renseignements de l'armée, qui s'occupe désormais de l'affaire », a-t-elle fait savoir.

Ils ont le texte des menaces et les examinent, ainsi que les menaces reçues par les dirigeants de la communauté et d'autres résidents, a-t-elle ajouté.

Karnabi n'a pu que spéculer sur la raison pour laquelle elle a reçu ces menaces, présumant que c'est parce qu'elle est une femme, ou parce qu'elle a de bons rapports avec les agences de l'État et de sécurité.

En juillet dernier, Mohammed Alouli, leader de communauté du district d'Aloula, dans le sud d'Arsal, a survécu à une tentative d'assassinat qui lui a causé une grave blessure à la tête pour laquelle il reçoit encore un traitement.

« J'avais reçu une menace avant cette tentative de meurtre, et j'en ai reçu une autre samedi 25 mars sur WhatsApp, dans laquelle ils m'ont dit qu'ils voulaient me tuer », a-t-il signalé à Al-Mashareq.

« Je n'élimine pas la possibilité que la menace vienne d'activistes appartenant à l'EIIL ou au FAN ou à leurs partisans en ville, qui sont peu nombreux », a-t-il poursuivi.

Alouli a déclaré que sa popularité auprès des électeurs et ses bonnes relations avec les agences de l'État et de sécurité ont pu faire de lui une cible pour les extrémistes.

« Certains sont mis à mal par notre rapprochement avec l'État », a-t-il expliqué. « Ces messages sont des messages voilés adressés aux agences de sécurité et à l'État, ainsi qu'à nous, leurs représentants. »

Le personnel de l'armée pris pour cible

Mohammed Saadeddine Ezzeddine, chef de communauté du district d'Aloula, dans le nord d'Arsal, a indiqué à Al-Mashareq avoir reçu cinq messages de menaces depuis le 25 mars.

« Toutes les menaces me qualifiaient d'apostat et disaient que mon meurtre était permis parce que j'ai coopéré avec l'État libanais », a-t-il rapporté.

Il a transmis aux agences de sécurité les menaces qu'il a reçues, lesquelles venaient d'un numéro de téléphone bien connu ayant déjà menacé d'autres personnes à Arsal.

Ezzeddine a déclaré que ces messages « avaient été envoyés par une personne connectée à l'EIIL ou au FAN ».

L'EIIL a déjà tué cinq membres de sa famille, le dernier étant Khalid Ezzeddine, tué en octobre « parce qu'il faisait partie de l'armée », a-t-il relaté, ajoutant qu'il a entendu des habitants d'Arsal dire que « l'EIIL veut me liquider ».

Ces menaces l'ont poussé à être prudent, a-t-il indiqué, notamment car ses trois fils sont dans l'armée.

« Je reste chez moi, et quand je dois sortir, des hommes de ma famille m'accompagnent », a-t-il rapporté.

Ezzedine a déclaré qu'il espère que « la sécurité puisse être établie à Arsal afin de mettre fin à l'anarchie qui permet aux activistes d'infiltrer la ville ».

Menaces voilées à l'État

La plupart de ces menaces peuvent être attribuées aux bonnes relations qu'entretiennent les autorités locales d'Arsal avec les agences de sécurité libanaises, a expliqué le général de brigade Naji Malaeb, spécialiste en stratégie de sécurité retraité de l'armée libanaise.

« Les élections locales et municipales qui ont eu lieu en mai 2016 ont mené à l'élection d'un grand nombre de membres du conseil municipal [...] ayant de bonnes relations avec l'État et ses agences officielles et de sécurité », a-t-il rapporté à Al-Mashareq.

Ces responsables nouvellement élus coopèrent avec les agences de sécurité dans l'intérêt de leur ville, a-t-il fait savoir, car celle-ci est à la frontière avec la Syrie et est régulièrement prise pour cible par des éléments extrémistes.

Bien que les menaces aient été envoyées à des responsables locaux d'Arsal, a-t-il poursuivi, « elles étaient indirectement destinées aux agences de l'État et de sécurité ».

Il est aussi possible que ces menaces aient été une tentative par certains extrémistes de regagner leur influence, a-t-il ajouté, surtout à la lumière de l'escalade de la violence en cours dans les faubourgs d'Arsal et dans la région syrienne d'al-Qalamoun.

« Récemment, nous avons connu une escalade entre l'EIIL et l'Armée syrienne libre (ASL) et la retraite de l'EIIL de quatorze villes [syriens] près de la frontière libanaise pour se repositionner en préparation de la bataille pour al-Raqqa », a-t-il rapporté.

L'EIIL sait qu'il perd son influence à cause des pertes successives qu'il a subies, a-t-il ajouté, et pourrait donc envoyer des menaces pour tenter de montrer son influence dans des zones comme Arsal.

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