L'influence d'al-Qaïda dans la province yéménite de Shabwah est en déclin constant, notamment dans la ville d'Azzan, où une résistance locale féroce a contribué au retrait du groupe de la ville, ont indiqué des responsables et des habitants à Al-Mashareq.
Al-Qaïda avait pris le contrôle d'Azzan en février 2016, profitant du vide de sécurité créé par le conflit au Yémen, et est resté à la tête de la ville jusqu'en août, lorsque les forces de la coalition et du pays l'en ont chassé.
Son plan était de créer un « émirat islamique » à Shabwah, quatre ans après que l'armée yéménite et des membres de tribus aient fait échouer un plan similaire dans la province d'Abyan.
Sous le règne d'al-Qaïda, les projets de développement à Azzan ont périclité, et de nombreux habitants ont été déplacés, a rapporté à Al-Mashareq Nasser al-Qamishi, gouverneur de Shabwah.
« Les habitants désirent la sécurité, la stabilité et le développement », a-t-il déclaré, ajoutant que la population locale n'acceptait pas la présence d'al-Qaïda dans sa ville.
Les régions qui sont tombées sous le contrôle d'al-Qaïda, comme Azzan, ont connu une baisse du développement due à la présence de groupes extrémistes, a-t-il fait savoir.
« Bien que certains services aient continué d'être assurés, le contrôle d'al-Qaïda sur la ville pendant une longue période a eu un impact négatif sur l'achèvement de projets de services », a expliqué Yaslam Bajnoub, secrétaire général du conseil local de Mayfaa.
Les projets des secteurs de l'éducation et de la santé, ainsi que les projets d'infrastructure, ont été particulièrement touchés, a-t-il affirmé à Al-Mashareq.
Embuscades tribales
Les tribus se sont battues pour repousser les dernières poches de combattants d'al-Qaïda à Shabwah , dont on pense qu'ils se cachent dans les zones montagneuses et difficiles d'accès de la région, ont précisé des habitants et des experts.
Azzan a vu des affrontements entre la tribu al-Baouda et al-Qaïda en février 2016, chaque camp montant des embuscades, a fait savoir le politologue Abdoul Razzaq Mohammed, qui a demandé à utiliser un pseudonyme par peur pour sa sécurité.
Une situation similaire à ce qui s'était passé avec la résistance populaire dans les régions de Loder et de Modiya, dans la province d'Abyan, en 2012, a-t-il rapporté à Al-Mashareq.
À cette époque, les comités populaires avaient combattu al-Qaïda, a-t-il rappelé, jouant un rôle crucial dans la libération de leurs régions, après avoir souffert sous son contrôle pendant près d'un an.
En 2014, des affrontements eurent lieu à Ahwar et Mahfad, dans la province d'Abyan, entre al-Qaïda et des bandits de grand chemin, après que ces derniers eurent tué un responsable de la « charia » d'al-Qaïda.
Mohammed a souligné le besoin d'aider les habitants dans leurs actes de résistance contre al-Qaïda, de la même façon que de l'aide avait été fournie aux comités de résistance populaire menés par Abdoullatif al-Sayyid à Abyan en 2012.
Ces comités avaient réussi à libérer les villes de Zinjibar, Jaar, et d'autres directorats de la province d'Abyan, combattant aux côtés de l'armée yéménite, a-t-il fait savoir.
Des membres des tribus mènent des assauts et organisent des embuscades contre al-Qaïda à Azzan, ont déclaré à Al-Mashareq des témoins oculaires habitant la ville.
Lorsque les combats ont éclaté en février 2016, des hommes de la tribu al-Baouda ont mis le feu à un véhicule d'al-Qaïda chargé d'explosifs, a relaté Mohammed Saleh, membre de la tribu.
Dans un autre incident ce même mois, deux éléments d'al-Qaïda ont été tués et huit membres de la tribu al-Baouda ont été blessés après que ces derniers eurent tendu une embuscade à un poste de contrôle du groupe, au carrefour d'al-Houta.
Résistance populaire
Taha Hussein, habitant d'Azzan, a indiqué que des affrontements armés avaient également éclaté entre des membres de tribus et des éléments d'al-Qaïda sur le marché d'Azzan le 3 juillet 2016.
« Une violente bataille a eu lieu entre la [résistance populaire] et al-Qaïda au carrefour d'al-Houta le 5 octobre, causant la mort d'un résistant et en blessant trois, ainsi que la mort de trois éléments d'al-Qaïda », a rapporté Mohammed al-Naamani, natif de Shabwah et militant des droits de l'Homme.
« Les comités populaires, fondés en 2012, ont joué un rôle important dans la libération d'Abyan des mains d'al-Qaïda », a affirmé le politologue Adnan al-Humairi à Al-Mashareq.
Les résidents des zones précédemment contrôlées par al-Qaïda se souviennent des méfaits du groupe à leur encontre et « prennent les armes contre les éléments du groupe pour les empêcher de reprendre le contrôle de leurs régions », a-t-il expliqué.
Les habitants de Shabwah sont désireux de retrouver la sécurité dans leur province et ont favorablement accueilli la présence des forces d'élite chargées de gérer la sécurité, a déclaré le gouverneur al-Qamishi.
L'accueil dont ont bénéficié les forces d'élite révèle « l'étendue de leur désir de sécurité et leur rejet de l'anarchie et du chaos que les groupes terroristes comme al-Qaïda exploitent », a-t-il ajouté.