Selon une décision perçue par de nombreux Yéménites comme politique plutôt que religieuse, les Houthis (Ansarallah) ont annoncé que l'Aïd el-Fitr sera célébré mercredi 5 juin, au lieu de mardi, comme l'avait proclamé le gouvernement.
La décision prise par les Houthis, soutenus par l'Iran, va à l'encontre de celle du gouvernement légitime et a provoqué des désaccords au sein des familles dans certaines parties du Yémen contrôlées par la milice, ont déclaré certains Yéménites.
Certains veulent célébrer l'Aïd mardi, ont-ils rapporté, tandis que d'autres appellent à la poursuite du jeûne ce jour-là.
Certains habitants de Sanaa se sont préparés pour les prières de l'Aïd mardi, mais les Bureaux des dotations religieuses et de l'orientation, contrôlés par les Houthis, ont ordonné aux guides religieux et aux miliciens de surveiller les mosquées « en infraction » et de les signaler, a rapporté Mohammed Moghni, habitant de Sanaa.
Selon l'imam de la mosquée où se rend Moghni, des mesures punitives pourraient être prises contre ceux qui supervisent ces lieux de culte, a-t-il ajouté.
Ces décisions contradictoires ont suscité la colère de nombreux habitants de Sanaa.
« Le commandement de la milice a donné cet ordre simplement pour se différencier de l'Arabie saoudite », a expliqué le fonctionnaire Saleh Muhsin à Al-Mashareq. « Ils manipulent même la religion pour leur propre intérêt. »
Festivités de l'Aïd à échelle réduite
Alors que certains Yéménites se préparent à célébrer l'Aïd el-Fitr avec la joie habituelle, la souffrance de la population déplacée et de la population en général ne peut être cachée.
« La plupart des festivités de l'Aïd ont disparu, en particulier les festivités populaires pour lesquelles la plupart des provinces du Yémen sont connues », a fait savoir la militante civile Ibtessam Abdoul Aziz à Al-Mashareq.
Malgré les circonstances, certaines festivités de l'Aïd sont encore visibles, a-t-elle indiqué, « comme la décoration des maisons par les femmes et la préparation de certains plats et gâteaux ».
Mais il est devenu plus difficile pour certains hommes de perpétuer la coutume « d'Asab el-Aïd », une somme d'argent offerte lorsqu'ils rendent visite à leurs proches et aux enfants, a-t-elle précisé.
« Cela est devenu quasiment impossible pour beaucoup de personnes, car les salaires ne sont pas versés, et parce que l'activité commerciale est à l'arrêt en raison de la guerre », a déclaré Abdoul Aziz.
Elle a exhorté les hommes à rendre visite à leurs proches, même s'ils ne leur donnent pas de l'argent pour l'Aïd.
« C'est très important, et l'islam nous encourage à le faire », a-t-elle affirmé, soulignant que « rendre visite à des proches est la manifestation la plus importante de l'Aïd dans la plupart des provinces du pays ».
« Je ne me sens pas en sécurité »
« Pour la deuxième année consécutive, je vais passer l'Aïd hors de ma ville à cause de la guerre que les Houthis ont menée contre les Yéménites pour servir les intérêts de l'Iran dans la région », a déploré Hammoud Qayed, qui a été déplacé d'al-Hodeidah.
« Je vis avec ma famille sous une tente dans une rue de Sanaa », a-t-il fait savoir à Al-Mashareq. « Bien que des personnes bienveillantes m'aient offert des vêtements de l'Aïd pour mes enfants, je ne me sens pas en sécurité. »
Qayed a expliqué que sa famille ne bénéficie d'aucune aide alimentaire régulière, et a accusé les Houthis d'interférer dans la distribution de l'aide alimentaire pour la distribuer à ses partisans.
Le non-versement des salaires du secteur public a exacerbé les souffrances du peuple yéménite, a déclaré l'économiste Abdoul Aziz Thabet à Al-Mashareq.
De plus, le nombre de déplacés internes (DI) en provenance des provinces où ont eu lieu des combats a augmenté, notamment Al-Hodeidah, Taez, Ibb, Al-Daleh et Saada.
« Des rapports des Nations unies indiquent que les deux tiers des Yéménites ont besoin d'aide », a-t-il conclu. « Cependant, l'aide affectée aux personnes touchées par la guerre, telles que les DI et les pauvres, est manipulée et ne parvient pas aux bénéficiaires. »