Les Houthis (Ansarallah) interfèrent avec l'administration et le fonctionnement des instituts d'enseignement supérieur au Yémen de plusieurs façons, ont déclaré à Al-Mashareq des universitaires et des chercheurs.
Cette milice soutenue par l'Iran s'est mêlée de l'administration des universités publiques en nommant des membres du corps enseignant ne répondant pas aux exigences académiques, et en ajoutant des programmes servant leurs propres intérêts, ont-ils fait savoir.
Les nominations effectuées par les Houthis dans les universités d'al-Hodeidah et d'Ibb menacent l'avenir des générations futures, ont-ils affirmé, car la milice a apporté des changements académiques qui auront des conséquences sur le long terme pour le Yémen.
À l'université de Sanaa, les Houthis ont modifié certains cours, notamment ceux sur la culture islamique, a indiqué Hisham Naji, membre du conseil d'administration du Syndicat des membres du corps professoral de l'université de Sanaa.
Ces changements n'ont pas été approuvés par le conseil de l'université de Sanaa, car leur contenu n'a pas été examiné par des commissions spécialisées, a-t-il fait savoir, et ils n'ont pas été approuvés par le Bureau des affaires étudiantes.
De plus, aucun atelier n'a été organisé pour discuter de leur contenu, a-t-il poursuivi, ce qui est la procédure habituelle pour l'ajout de nouveaux programmes ou cours.
« Un atelier composé de professeurs de l'université est occupé à clarifier ces amendements et leur contenu », a rapporté Naji.
Le 28 février, la chaîne de télévision Al-Arabiya et des organes de presse locaux ont signalé que les Houthis avaient apporté des ajouts et des amendements au cours de culture islamique, qui est enseigné à l'université de Sanaa depuis des décennies.
Manipulation idéologique
Selon les sites d'actualités et les étudiants yéménites, les Houthis ont instauré en octobre de nouveaux programmes « d'éducation nationale » dans toutes les facultés et tous les départements de l'université d'al-Hodeidah.
Cela comprend des conférences sur les événements politiques selon la perspective des Houthis, en plus de nouveaux cours visant à propager l'idéologie du groupe.
Les Houthis ont également placé de nouveaux membres dans les universités d'al-Hodeidah et d'Ibb qui ne satisfont pas aux exigences académiques ou légales, installant un allié comme vice-président de l'université d'Ibb, a rapporté al-Masdar Online le 21 septembre.
Le Conseil politique suprême a publié un décret nommant Fouad Abdoul-Rahman Hassan, professeur adjoint du département de nutrition de la faculté d'agriculture, au poste de vice-président de l'université d'Ibb, ce qui enfreint les règlements de l'université.
Selon ces derniers, le candidat à ce poste doit en effet être au moins professeur agrégé avec dix ans d'expérience de travail universitaire, alors que celui qui a été nommé n'est que professeur adjoint et qu'il ne satisfait pas aux autres critères.
Le journaliste yéménite Nabil al-Assidi a publié sur internet une copie de la décision du Conseil politique suprême début janvier nommant le président et le vice-président de l'université d'al-Hodeidah, avec le commentaire suivant : « Ces nominations sont illégales ».
« Ce qu'il se passe en ce moment dans les universités publiques sous l'autorité des Houthis est la destruction de ce qui reste du travail universitaire et de la poursuite de l'éducation supérieure », a-t-il affirmé.
À la place de cela, a-t-il expliqué, l'accent est désormais mis sur une « éducation doctrinale pour faire progresser l'idéologie d'un groupe en particulier » qui cherche à modifier les concepts de savoir et d'éducation en fonction de ses propres ambitions politiques.
« L'ajout de nouveaux programmes consacrant le sectarisme ne fait que détruire le tissu social au Yémen, qui est épuisé depuis des années », a-t-il indiqué.
Mauvais classement pour l'éducation
Le Yémen est dernier du classement de 137 pays régionaux et internationaux examinés dans l'Indice de compétitivité mondiale du Forum économique mondial 2017-2018.
Le Yémen est également classé très bas (154 sur 187) dans l'Indice d'éducation du Programme de développement de l'ONU, publié en 2016.
Dans le cas de l'éducation, la mauvaise place obtenue par le Yémen « est le résultat des politiques imposées aux universités par les Houthis », a expliqué à Al-Mashareq l'auteur et chercheur Mounir Talal.
« Depuis mars 2015, les Houthis ont fermé plus de quinze universités privées, sous prétexte qu'elles ne répondent pas aux exigences académiques », a-t-il rapporté. « Dans le même temps, nous constatons l'ouverture de dizaines d'universités par des personnes affiliées au groupe ».
Avec ces mesures, les Houthis veulent « détruire le processus d'éducation, afin de mettre fin aux progrès effectués dans ce domaine », a-t-il déploré.
À cause de ces mesures, a-t-il prévenu, les universités deviendront « des coquilles vides de tout contenu, à cause de la cupidité, de l'opportunisme et de l'attitude [des Houthis], selon lesquels l'éducation est une chasse gardée ».