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La Russie prétend « sans fondement » avoir chassé l'EIIS de Syrie

Par Waleed Abou al-Khair au Caire

La police militaire russe s'est déployée dans plusieurs régions de Syrie pour superviser les zones de désescalade et assurer la sécurité des installations et du personnel russes. Les troupes russes commencent à se retirer de Syrie après une déclaration de victoire sur « l'État islamique en Irak et en Syrie » prononcée le 7 décembre, que certains jugent prématurée. [Photo fournie par Mohammed al-Abdoullah]

La police militaire russe s'est déployée dans plusieurs régions de Syrie pour superviser les zones de désescalade et assurer la sécurité des installations et du personnel russes. Les troupes russes commencent à se retirer de Syrie après une déclaration de victoire sur « l'État islamique en Irak et en Syrie » prononcée le 7 décembre, que certains jugent prématurée. [Photo fournie par Mohammed al-Abdoullah]

La récente déclaration de victoire sur « l'État islamique en Irak et en Syrie » (l'EIIS) en Syrie faite par les Russes n'est qu'une manœuvre politique, ont expliqué des experts à Diyaruna.

Le 7 décembre, le ministère russe de la Défense avait annoncé que sa mission de chasser l'EIIS hors de Syrie était « accomplie », et que le pays était désormais « totalement libéré » du groupe, a rappelé l'AFP.

« L'objectif des forces armées russes de vaincre les groupes armés de l'organisation terroriste de l'EIIS a été atteint », avait déclaré Sergueï Rudskoi, haut responsable militaire, annonçant que les forces russes allaient pouvoir commencer à se retirer.

« Il n'y a plus aucun village ou district de Syrie sous le contrôle de l'EIIS. Le territoire syrien a été totalement libéré des combattants de cette organisation terroriste », avait-il poursuivi.

Le président russe Vladimir Poutine, son homologue syrien Bachar el-Assad, et le ministre russe de la Défense Sergueï Choïgou (à gauche) posent avec des pilotes de l'armée de l'air russe lors de leur visite sur la base aérienne russe de Hmeimim, dans la province syrienne de Latakia, le 11 décembre. [Mikhail Klimentyev/Pool/AFP]

Le président russe Vladimir Poutine, son homologue syrien Bachar el-Assad, et le ministre russe de la Défense Sergueï Choïgou (à gauche) posent avec des pilotes de l'armée de l'air russe lors de leur visite sur la base aérienne russe de Hmeimim, dans la province syrienne de Latakia, le 11 décembre. [Mikhail Klimentyev/Pool/AFP]

Or, l'EIIS reste enraciné dans plusieurs parties du pays, et a mis la main sur de nouveaux territoires contrôlés par le régime, et des milices appuyées par les Russes et l'Iran.

De récents rapports montrent clairement que l'EIIS n'a pas été vaincu en Syrie, a expliqué le major général Yahya Mohammed Ali, spécialiste des groupes terroristes et ancien officier de l'armée égyptienne.

« C'est à l'opposé de ce qu'affirme la Russie depuis la fin de l'année dernière, lorsqu'elle avait annoncé en grande fanfare que l'EIIS avait été complètement battu et que la mission de l'armée russe avait été accomplie », a-t-il ajouté pour Diyaruna.

« Rien de plus qu'une manœuvre politique »

« On a bien assisté à un transfert temporaire des éléments de l'EIIS des zones où sont survenus des combats entre l'EIIS et l'armée syrienne et ses appuis russes vers d'autres régions, seulement pour y revenir ultérieurement », a expliqué Ali.

Cette situation s'est retrouvée dans des régions comme Deir Ezzor, Albou Kamal, certaines parties d'al-Badiya et des régions de Tadmur (Palmyre), a-t-il précisé.

« Cela nous indique que les frappes aériennes ont contraint l'EIIS à se retirer plutôt que d'être totalement vaincu et éliminé, comme c'est le cas à al-Raqqa », a-t-il déclaré.

Cette déclaration russe n'est rien d'autre qu'une manœuvre politique et une tentative de s'imposer comme le libérateur de la Syrie – délivrant le pays du terrorisme afin de pouvoir y justifier son futur rôle politique, économique et militaire, a ajouté Ali.

Or, vaincre l'EIIS ne se limite pas à chasser le groupe des zones qu'il contrôle, a expliqué Farhad Khoja, officier dans les Forces démocratiques syriennes (FDS).

La victoire est également liée à d'autres types d'opérations, comme le retrait des mines et des résidus explosifs de la guerre, et le soutien aux anciennes zones contrôlées par l'EIIS, qui sont actuellement sous le contrôle du régime syrien, a-t-il expliqué à Diyaruna.

« Il s'agit littéralement de zones de catastrophe qui ont été vidées de leurs populations civiles », a-t-il ajouté.

Un soutien continu est nécessaire

Entre-temps, des actions visant à rétablir la sécurité, restaurer les infrastructures et la gouvernance sont en cours dans les zones où opèrent les FDS et la coalition internationale, a poursuivi Khoja.

« Dans ces zones, en dépit des violents combats pour éliminer l'EIIS, la vie a repris son cours normal et les populations déplacées sont pour l'essentiel revenues », a-t-il indiqué, soulignant que la reconstruction est en cours et que les services publics sont rétablis.

« Les habitants d'al-Raqqa sont revenus, et la ville est administrée par un conseil local dont les membres sont des habitants de la ville et de ses environs », a ajouté Khoja, précisant que même la sécurité est administrée par la population locale.

Une campagne de déminage et de nettoyage est en cours pour permettre le retour de la population, a-t-il poursuivi, ajoutant qu'il en va de même dans la ville voisine d'al-Tabqa.

« La déclaration de victoire sur l'EIIS en Syrie faite par la Russie ne veut rien dire », a affirmé le journaliste syrien Mohammed al-Abdoullah à Diyaruna.

« D'un point de vue militaire, le groupe contrôle encore plusieurs régions de Syrie, notamment des parties de la Ghouta, certaines parties du camp d'al-Yarmouk et des régions stratégiques dans la province de Hama, au nord-est du pays, et des parties des provinces de Homs et d'Idlib », a-t-il précisé, ainsi qu'une petite partie de l'est de Deir Ezzor.

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