Selon le ministère de l'Agriculture, les pertes encourues par le secteur de l'agriculture au Yémen depuis le début de la guerre représentent plus de seize milliards de dollars.
Celles-ci comprennent des pertes directes de 2,25 milliards de dollars, notamment des pertes d'infrastructures, d'installations, de récoltes, de cheptel, d'équipement, de moyens de transport, et d'intrants pour la production.
Les pertes indirectes représentent quant à elles 13,76 milliards de dollars, et comprennent des pertes encourues par des institutions et fermes gouvernementales et coopératives, ainsi que des pertes de récoltes et de production, d'exportation et des pertes de main d'œuvre.
Ces pertes indirectes représentent la part la plus importante du total des pertes, parce qu'elles affectent près de 75 % des Yéménites, a précisé le responsable du secteur des services au ministère de l'Agriculture, Mohammed al-Humairi, à Al-Mashareq.
Elles incluent les pertes d'emplois, la suspension des opérations des installations agricoles, la cessation des investissements agricoles et la baisse de la production, a-t-il expliqué.
Les pertes directes sont une conséquence immédiate de la guerre, a-t-il poursuivi, car de nombreuses installations agricoles et des bâtiments détenus par des institutions et des établissements agricoles publics et privés ont été fortement endommagés.
Les dommages occasionnés aux infrastructures routières et aux ponts ont également affecté les opérations de commercialisation agricole, a-t-il ajouté.
Les habitants des zones rurales comptent sur l'agriculture
« Les pertes indirectes sont diverses et variées, et incluent les pertes d'emplois, car les populations rurales dépendent de l'agriculture pour vivre », a expliqué al-Humairi.
Les habitants des régions rurales constituent 75 % du total de la population yéménite, a-t-il rappelé, ce qui représente une menace très importante pour leur subsistance et leur sécurité alimentaire.
Parmi les pertes indirectes résultant de la guerre se trouve une hausse du prix et de la rareté des produits dérivés du pétrole, a-t-il précisé, car le conflit a entraîné une augmentation du coût des opérations agricoles, qui dépendent du diesel pour l'irrigation.
« Les prix élevés des dérivés de pétrole ont également causé la hausse des prix des produits agricoles, à cause du triplement des coûts de transport par rapport à la situation d'avant la guerre », a-t-il expliqué.
Les centres de services agricoles qui conditionnent et préparent les produits pour les marchés locaux et étrangers ont eux aussi été affectés par le conflit, a également indiqué al-Humairi.
Le secteur agricole a été négativement affecté par la cessation totale des exportations effectuées par les ports terrestres et les aéroports, a expliqué Abdoullah Nasher, professeur d'agriculture à l'université de Sanaa.
« La rareté et les prix élevés des dérivés de pétrole ont eu un impact négatif sur les processus de planification des agriculteurs », a-t-il précisé à Al-Mashareq.
Le pouvoir d'achat au niveau le plus bas
Nasher a expliqué que la guerre avait engendré une hausse des prix des matières premières nécessaires à la production agricole, tandis que le pouvoir d'achat atteignait son niveau le plus bas.
Cette combinaison d'événements a occasionné des pertes financières pour les agriculteurs, ce qui les a contraints à suspendre leurs opérations, a-t-il indiqué.
L'économiste Abdoul Jalil Hassan a expliqué à Al-Mashareq que les pertes encourues par le secteur agricole impactent directement 75 % des Yéménites, qui sont des agriculteurs ou qui travaillent dans des industries liées à l'agriculture.
Cela représente une menace pour la sécurité alimentaire de la plupart des Yéménites, a-t-il ajouté.
Trois agences des Nations unies, la FAO, le PAM et l'UNICEF ont mis en garde sur le fait que la note IPC (Integrated Food Security Phase Classification) des Yéménites atteint désormais un niveau critique, a-t-il rapporté.
« Deux tiers de la population sont aujourd'hui face à la menace de la faim et ont besoin d'une aide d'urgence pour sauver leurs vies et préserver leurs moyens de subsistance », a-t-il indiqué, appelant les organisations humanitaires à aider les Yéménites et à œuvrer à l'arrêt des hostilités.