Droits de l'Homme

Liban : de nouveaux centres travaillent à mettre fin aux « pires formes » de travail des enfants

Par Nohad Topalian à Beyrouth

Des enfants jouent devant le centre de protection sociale de Tripoli, l'un des trois centres cherchant à éliminer les « pires formes de travail des enfants ». [Photo fournie par le centre de protection sociale de Tripoli]

Des enfants jouent devant le centre de protection sociale de Tripoli, l'un des trois centres cherchant à éliminer les « pires formes de travail des enfants ». [Photo fournie par le centre de protection sociale de Tripoli]

Le Liban a pris des mesures pour éliminer le travail des enfants et éloigner les enfants des emplois qualifiés par l'Organisation internationale du travail de « pires formes de travail des enfants ».

Selon des estimations non officielles, « des centaines de milliers » d'enfants au Liban travaillent dans l'industrie, l'agriculture et d'autres domaines qui dépassent les heures normales de travail et impliquent un lourd fardeau physique et psychologique.

En plus d'être néfaste pour les enfants, expliquent des travailleurs sociaux à Al-Mashareq, ce type d'environnement peut mener des enfants vulnérables à prendre des chemins dangereux, les exposant au risque de la drogue ou d'être victimes du recrutement extrémiste.

Dans le cadre d'un plan national pour mettre fin au travail des enfants, la Fondation Beyond travaille pour ouvrir des centres de protection sociale en collaboration avec le ministère du Travail et plusieurs organisations internationales.

À la fin du mois dernier, deux centres ont été ouverts dans la ville de Tripoli, dans le nord du pays, et à Saadnayel, dans la vallée de la Bekaa. Un centre a été ouvert l'année dernière dans le district d'Ouzai, à Beyrouth, et un quatrième devrait ouvrir ses portes à Nabatiyeh, dans le sud.

« Ma vie a changé »

Des centaines d'enfants et d'adolescents qui travaillent devraient bénéficier des services fournis par ces trois centres.

Parmi eux, Jibrael Lattash, quinze ans, originaire du quartier de Bab al-Tabbaneh à Tripoli, et Majd Murad, quatorze ans, du camp de réfugiés d'al-Baddawi à Tripoli. Tous deux se sont inscrits au centre Jabal Mohsen de Tripoli en juin 2016, avant son ouverture officielle.

Jibrail a déclaré à Al-Mashareq qu'il a commencé à travailler à l'âge de sept ans.

« Je travaillais dans une usine de verre et d'aluminium chaque jour, de huit heures à 20 heures sans interruption », a-t-il indiqué. « Je rentrais chez moi épuisé. »

« J'ai été privé de mon enfance, d'aller à l'école et de jouer avec mes amis, et j'ai été exposé aux dangers de la rue jusqu'à ce que j'intègre le centre », a-t-il rapporté.

Aujourd'hui il étudie l'arabe, le français et l'anglais, les mathématiques, l'art et la musique, et participe aux activités du centre de protection.

« J'ai retrouvé une vie normale et j'apprends un métier pour en faire ma profession plus tard », a-t-il expliqué.

Majd a déclaré à Al-Mashareq qu'il travaillait dans un magasin de jus de fruits de huit heures à 21 heures, où il était maltraité par les employés et les clients, et il avait peu de temps pour vivre en dehors du travail.

« Aujourd'hui, je n'ai pas besoin de travailler, et je profite des programmes d'éducation du centre », a-t-il fait savoir. « Ma vie a changé et je me sens libre. »

Le jour de son ouverture, le centre du quartier de Jabal Mohsen a reçu 170 enfants âgés de sept à dix-huit ans, a indiqué la travailleuse sociale Ghusoun Yaghi à Al-Mashareq.

Beaucoup de ces enfants souffraient de problèmes psychologiques, a-t-elle confié, notant qu'ils étaient renfermés socialement, qu'ils manquaient de confiance en soi et ne savaient pas comment se débrouiller tous seuls.

Dans ce centre, ils peuvent commencer à se libérer de leurs problèmes, a-t-elle affirmé.

Le centre est ouvert de 8h30 à 12h30 du lundi au vendredi, et reste ouvert pour les sports et les activités créatives durant l'après-midi.

Son but est d'éloigner ces enfants des conditions de travail difficiles et de les réhabiliter en les envoyant à l'école ou à nouveau sur le marché du travail armés de nouvelles compétences, a-t-elle expliqué.

Partie d'un plan national

Les centres de protection sociale font partie d'un plan national conçu par le ministère du Travail en 2005 pour mettre fin au travail des enfants d'ici 2019, a déclaré à Al-Mashareq la directrice exécutive de la Fondation Beyond, Maria Assi.

Ce plan vise à s'attaquer aux pires formes de travail des enfants, à les protéger des dangers de la rue et à les empêcher de suivre un chemin qui pourrait les conduire vers la violence et le terrorisme, a-t-elle fait savoir.

Depuis sa création, le plan a été modifié plusieurs fois, a-t-elle déclaré, et après le déclenchement de la guerre syrienne, il a été mis à jour pour inclure les enfants syriens.

Jusqu'ici, a-t-elle poursuivi, les centres de protection ont sorti de la rue un grand nombre d'enfants libanais, syriens, palestiniens et irakiens, et les ont éloignés de certains emplois dans la partie centrale de la vallée de la Bekaa et certains districts de Beyrouth et Tripoli.

Ceux-ci comprennent des emplois dans l'agriculture et dans l'industrie lourde, comprenant souvent de longues heures de travail, a-t-elle ajouté.

Bien qu'il n'y ait pas de statistiques officielles sur le nombre d'enfants travaillant au Liban, Assi estime qu'ils sont plusieurs centaines de milliers.

Tendre la main

Le centre Saadnayel a officiellement ouvert ses portes le 28 février, après une série de rencontres avec des municipalités, des responsables gouvernementaux et non gouvernementaux de Zahle sur la façon d'atteindre le plus grand nombre d'enfants travaillant, a déclaré Assi.

« Le centre Saadnayel a reçu 400 enfants âgés de deux à dix-huit ans », a-t-elle rapporté. « Comme dans les autres centres, celui-ci leur offre des programmes d'alphabétisation, une protection sociale, un soutien psychologique, de la thérapie par la peinture, de la musique, du théâtre, des cours de langues – dont l'arabe, le français et l'anglais – et des leçons de mathématiques. »

Ces centres empêchent que les enfants de deux à huit ans soient obligés à travailler par leur famille et fournissent aux enfants de huit à quatorze ans des programmes pédagogiques pour leur permettre d'entrer dans des écoles formelles, a-t-elle décrit.

Les enfants âgés de quatorze à 18 ans se voient offrir des formations professionnelles leur apportant des compétences manuelles et d'industrie légère pour les aider dans leur future carrière, a-t-elle ajouté.

« Nous voyons les enfants qui travaillent comme des victimes, et nous travaillons pour les aider, afin que leurs conditions de travail et leurs mauvaises situations économiques ne les mènent pas à l'implication dans des conflits armés ou vers la drogue », a-t-elle indiqué.

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Les conditions de vie forcent les enfants à travailler. Cela est dû à la négligence de l'État libanais, car le Liban est un État de voleurs et de cambrioleurs. Si les responsables avaient le moindre honneur et la moindre conscience, ils alloueraient de l'aide par le biais du ministère des Affaires sociales. Si une telle aide était disponible, les enfants n'auraient pas à travailler et ne se verraient pas refuser leur enfance et leur éducation. Tenez pour responsables ceux qui gouvernent le Liban, y compris les présidents et les chefs du gouvernement.

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