Des militants des droits de l'Homme expliquent à Al-Mashareq qu'il est important de mieux sensibiliser la population sur les tentatives faites par al-Qaïda de recruter des femmes et sur les dangers que cela fait courir à la société yéménite.
Les récents événements font ressortir le besoin pour les agences gouvernementales de mener des campagnes de sensibilisation en partenariat avec des organisations de la société civile pour alerter les femmes sur les efforts de recrutement des extrémistes, ont-ils déclaré.
Les combattantes féminines d'al-Qaïda ont attiré l'attention le mois dernier lorsque plusieurs d'entre elles ont été abattues lors d'une opération des forces spéciales américaines visant al-Qaïda dans la région de Yakla, dans la province d'al-Bayda .
« Plusieurs femmes combattantes faisaient partie de ces groupes », a rapporté le porte-parole du Pentagone Jeff Davis, ajoutant que certaines avaient été tuées lors des combats.
Ces femmes avaient été vues courant vers des positions de combat lors de ce raid, destiné à mettre la main sur des renseignements pour empêcher de futures attaques terroristes, a-t-il précisé.
Les femmes prises pour cible
« Le recrutement des femmes par les groupes terroristes, al-Qaïda en particulier, est un désastre en raison des nombreux dangers que cela fait courir aux femmes elles-mêmes, à leurs familles et à la société en général », a indiqué Lamia al-Eryani, secrétaire générale du Conseil supérieur yéménite de la mère et de l'enfant.
« Le recrutement de femmes est une chose nouvelle dont nous entendons parler ces jours-ci », a-t-elle déclaré à Al-Mashareq, décrivant ce phénomène comme « une affaire sérieuse ».
Les agences gouvernementales et les organisations de la société civile concernées par les affaires féminines ont une responsabilité commune, qui est de mener des campagnes de sensibilisation en direction des femmes, soulignant les dangers des efforts de recrutement d'al-Qaïda, a-t-elle affirmé.
Ces campagnes pourraient réussir à contenir cette tendance avant qu'elle ne gagne en intensité et devienne quelque chose d'encore plus dangereux, a-t-elle ajouté.
Les femmes yéménites courent le danger de devenir la proie de groupes tels qu'al-Qaïda car le taux d'analphabétisme chez les femmes au Yémen est de 80 %, les 20 % restants étant des femmes peu éduquées et qui ne sont pas suffisamment conscientes de ce qui se passe autour d'elles, a-t-elle poursuivi.
« Cela fait qu'elles comprennent mal ce qui est dans leur intérêt, et cela est un désastre », a-t-elle déclaré.
Mensonges et manipulation
Les femmes recrutées par al-Qaïda ont probablement été conduites à penser qu'en prenant les armes, elles accomplissaient un devoir religieux, a expliqué al-Eryani, ce qui est la même technique que celle utilisée par le groupe pour recruter de jeunes hommes.
« Al-Qaïda a réussi à duper et à recruter des femmes en utilisant tromperie, lavage de cerveau, religion, et en leur faisant croire que le djihad leur conférait une grande stature, comme cela a été le cas avec de nombreux jeunes hommes qui avaient été influencés par la religion et la promesse du paradis », a-t-elle rapporté.
Des groupes comme al-Qaïda « se présentent comme d'ardents défenseurs de la charia, et ces femmes subissent un lavage de cerveau sur la base de cette même logique », a-t-elle poursuivi.
L'Union des femmes yéménites et d'autres groupes travaillant sur les affaires des femmes « ont la responsabilité commune de mieux sensibiliser sur la question du recrutement des femmes, le danger que cela représente et les problèmes sociaux que cela entraîne », a-t-elle expliqué.
L'effort de lutte contre le recrutement des femmes doit être entrepris en accord avec une structure légale et législative qu'il convient de formuler maintenant, a-t-elle ajouté.
L'Union des femmes s'efforce de stimuler la participation des femmes dans les sphères politiques, sociales et culturelles, a indiqué à Al-Mashareq Lamis al-Arashi, membre de cette union.
Ces efforts sont toutefois entravés par la guerre dans le pays, qui affecte négativement la vie d'hommes et de femmes, a-t-elle déclaré.
Des groupes extrémistes comme al-Qaïda dans la péninsule arabique et « l'État islamique en Irak et au Levant » (EIIL) ont exploité cette guerre pour étendre leur contrôle sur plusieurs parties du pays.
Un sérieux problème
Alors que la situation se détériore par suite de la guerre , le phénomène du recrutement de femmes par les groupes terroristes s'est considérablement développé, a signalé Layla Asda, chercheuse au Centre de recherche et d'études sur le développement des genres de l'université de Sanaa.
« Cela constitue un problème sérieux », a-t-elle déclaré à Al-Mashareq.
« Ce qui conduit ces femmes à rejoindre et à travailler avec ces groupes ? La raison la plus importante et la plus difficile est peut-être la misère, car si ce n'était à cause de la pauvreté, aucune femme ne plongerait ainsi dans l'enfer », a-t-elle affirmé.
Et d'ajouter : une autre raison est « l'ignorance », expliquant que les groupes extrémistes ont exploité ce manque de connaissances en présentant leur idéologie déviante « comme une manière de racheter les pêchés et de gagner l'au-delà et le paradis ».
« Le caractère sérieux de la menace posée à la société par le recrutement des femmes vient de l'importance de leur rôle et de leur grande influence dans la société », a-t-elle poursuivi.
Il est nécessaire de lutter contre cette menace en s'efforçant de mieux sensibiliser aux dangers de l'extrémisme, a-t-elle conclu, et en veillant à ce que tous les enfants reçoivent une éducation religieuse correcte afin de ne pas être dupés par l'idéologie déviante de ces groupes.