Politique

Alors qu'il se dit publiquement favorable au dialogue, l'Iran continue d'enrichir de l'uranium

Sultan al-Barei à Riyad

L'un des réacteurs nucléaires iraniens dans lequel le régime continue d'enrichir de l'uranium. [Photo diffusée sur les réseaux sociaux]

L'un des réacteurs nucléaires iraniens dans lequel le régime continue d'enrichir de l'uranium. [Photo diffusée sur les réseaux sociaux]

Alors qu'il cherche à affirmer et maintenir son influence dans la région, le régime iranien tente de tirer parti de la diplomatie et de la menace d'utilisation de la force, ont indiqué des experts en affaires iraniennes à Al-Mashareq.

Au milieu des appels publics en faveur d'un dialogue pacifique avec les pays du Golfe, ont-ils rapporté, les partisans de la ligne dure du régime iranien continuent de poursuivre l'enrichissement de l'uranium au-delà des niveaux convenus.

L'annonce faite le 8 mai par l'Iran selon laquelle il compte augmenter sa production d'uranium enrichi et d'eau lourde dans le cadre de sa décision de mettre fin à certains engagements pris selon l'accord nucléaire de 2015 révèle des tensions internes parmi ses dirigeants.

Plus tôt dans le mois, l'Iran a déclaré qu'il dépasserait la réserve convenue de 300 kilos d'uranium enrichi le 27 juin, parce qu'il ne se sentait plus lié par l'accord de 2015 dont les États-Unis se sont unilatéralement retirés en mai 2018, a rapporté l'AFP.

Un spécialiste travaille dans un réacteur d'enrichissement de l'uranium en Iran. [Photo diffusée sur les réseaux sociaux]

Un spécialiste travaille dans un réacteur d'enrichissement de l'uranium en Iran. [Photo diffusée sur les réseaux sociaux]

Mais le jour même, une source diplomatique à Vienne a déclaré que l'Iran ne dépasserait pas la limite des stocks d'uranium convenue dans le cadre d'un accord nucléaire avec les puissances mondiales de l'époque, suggérant qu'il pourrait y avoir une « raison politique » pour cela.

Un responsable iranien qui s'est également exprimé sous couvert d'anonymat a déclaré plus tard que la limite n'avait pas encore été dépassée pour des raisons « techniques ».

Vienne est le siège de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA), l'organisme de surveillance nucléaire de l'ONU, qui est chargé de vérifier si l'Iran respecte les conditions de l'accord nucléaire.

Téhéran a également menacé de commencer à enrichir l'uranium au-delà du niveau de purification convenu de 3,67 % à partir du 7 juillet.

Différends internes

« Les différences d'opinions entre les responsables iraniens sur la question nucléaire découlent de l'existence de deux camps majeurs », a déclaré Sheyar Turko, chercheur en affaires iraniennes, à Al-Mashareq.

Un camp appelle au dialogue comme moyen de parvenir à une solution, a-t-il expliqué.

Ce camp comprend le président iranien Hassan Rohani et plusieurs diplomates proches de lui, ainsi que le ministre des Affaires étrangères, Mohammad Javad Zarif, a-t-il précisé.

L'autre camp est le contingent religieux dur représenté par le chef suprême de l'Iran, Ali Khamenei et son appareil, dirigé par le Corps des Gardiens de la révolution islamique (CGRI), des officiers vétérans et des religieux de la tendance dure.

L'annonce faite par l'Iran de son intention d'augmenter ses stocks d'uranium enrichi indique que « le camp de la ligne dure a le dessus », a déclaré Turko.

Cela est dû au fait que ceux qui ont des opinions plus dures dirigent la politique intérieure et étrangère de l'Iran, utilisant le pouvoir et l'influence provenant de l'autorité de la Wilayat al-Faqih (la Tutelle du Juriste), a-t-il fait savoir.

Celle-ci appelle à l'allégeance à l'al-Wali al-Faqih (Khamenei) et « exige que tout le monde lui obéisse et suive ses ordres », a-t-il expliqué.

Les différences d'opinions entre les dirigeants iraniens révèlent le niveau d'influence exercé par des personnalités proéminentes des unités des opérations extérieures du pays, a affirmé Khairuddin Abdel-Metaal, spécialiste en droit international et maître de conférences à l'université Assiut d'Égypte.

Celles-ci ont tenté d'utiliser leur influence pour « attirer des États du Golfe et les détourner de la voie politique [qu'ils suivent] avec les États-Unis », a-t-il déclaré à Al-Mashareq.

L'Iran cherche à donner l'impression d'être intéressé par le dialogue et les négociations avec l'Arabie saoudite, a-t-il fait savoir, « alors que son véritable objectif est de gagner du temps en négociant pour échapper aux sanctions ou les contourner ».

Son insistance sur l'enrichissement de l'uranium au-dessus du niveau convenu « indique clairement qu'il a l'intention d'utiliser l'excédent à des fins non pacifiques et interdites internationalement », a-t-il ajouté.

Menace pour la stabilité régionale

Le projet nucléaire iranien est « la menace la plus grave pour la stabilité et la sécurité du Moyen-Orient et du monde », a affirmé Fathi al-Sayed, chercheur au Centre al-Sharq d'études régionales et stratégiques et spécialiste des affaires iraniennes.

L'Iran a testé des missiles balistiques à capacité nucléaire au moins dix fois depuis juillet 2015, en dépit d'une résolution du Conseil de sécurité des Nations unies approuvée en même temps l'accord nucléaire et qui demande explicitement à l'Iran de s'abstenir de telles activités.

L'Iran cherche à contourner la résolution en affirmant qu'il développe son programme nucléaire à des fins uniquement pacifiques, a déclaré al-Sayed à Al-Mashareq.

Les soupçons continuent de peser sur l'enrichissement de l'uranium « à des fins non pacifiques, contrairement à ce que les médias iraniens tentent d'affirmer », a-t-il ajouté.

« Les journaux officiels et semi-gouvernementaux affirment régulièrement que l'Iran a le droit d'utiliser l'uranium enrichi à toutes les fins qu'il veut, qu'elles soient militaires ou civiles », a rapporté al-Sayed.

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