L'Observatoire des fatwas égyptien Dar al-Iftaa a prévenu que les combattants étrangers qui ont combattu dans les rangs de « l'État islamique » (Daech) reviennent chez eux depuis l'Irak et la Syrie, ou partent vers d'autres pays où le groupe dispose d'une présence.
Dans une étude publiée le 8 novembre, l'observatoire a prévenu que certains reviennent dans leur pays natal, alors que d'autres fuient vers des pays voisins ou des zones où Daech reste actif.
Face à une telle situation, l'étude se penche sur les défis que présentent le retour ou l'arrivée des combattants de Daech et émet plusieurs recommandations.
Elle suggère notamment que les combattants étrangers suivent un programme de réhabilitation, afin qu'ils puissent être utilisés pour prévenir les jeunes des dangers qu'il y a à intégrer un groupe terroriste.
Cette étude a également pour but de préciser les défis auxquels les pays sont confrontés à cause de la fuite massive des combattants étrangers venus d'Irak et de Syrie et la menace qu'ils représentent à leur retour, a expliqué Ibrahim Najm, secrétaire général de Dar al-Iftaa.
Outre le fait de revenir dans leurs pays d'origine, a-t-il prévenu, il est possible que les éléments de Daech en fuite s'infiltrent dans les zones contrôlées par le groupe dans d'autres pays.
« On craint que ces combattants en fuite recourent à la violence et au terrorisme dans leur pays d'origine », a-t-il indiqué à Al-Mashareq.
Il est donc impératif que « ces combattants soient maîtrisés et que leurs idées extrémistes soient corrigées », a-t-il affirmé.
Le Bureau de lutte contre le terrorisme des Nations unies a publié en août une enquête comportant des entretiens avec quarante-trois combattants étrangers venus de douze pays différents, a-t-il indiqué.
Cette enquête a révélé que la plupart d'entre eux manquent de connaissances basiques sur l'islam, a-t-il déclaré, ajoutant que Daech les a attirés en exploitant leur passion et en promettant un « califat ».
Quatre types de retours
Selon l'Institut d'études al-Arabiya, il existe quatre types de membres de Daech revenant, dont chacun présente un niveau de menace différent.
L'institut caractérise la menace que présentent ces combattants comme la non-récurrence, la réclusion active, le tourisme djihadiste et le djihad intercontinental.
Dans la catégorie « non-récurrence », les personnes revenant ont été poussées à se battre par un zèle extrême jusqu'à ce qu'elles voient l'horreur des batailles et les tromperies auxquelles elles ont été soumises, avant de décider de fuir, a expliqué l'enquête.
Cette catégorie ne constitue pas une menace, a-t-elle précisé.
Les revenants de la catégorie « réclusion active » ne sont pas seulement isolés et pleins de remords, mais ils essaient également d'empêcher les membres musulmans de leur famille de partir et de traverser les mêmes épreuves, a poursuivi cette enquête.
Ceux appartenant à la catégorie « touriste djihadiste » ont tout d'abord des notions idéalistes sur le combat, jusqu'à ce qu'ils soient confrontés à la réalité, a-t-elle ajouté, mais ils essaient quand même de tromper les autres en diffusant des mensonges sur ce qu'ils ont vécu.
Mais le type de combattant étranger de retour le plus dangereux et le plus courant se situe dans la catégorie du « djihad intercontinental », a expliqué l'enquête.
Ceux-ci sont attachés idéologiquement à la violence et ne reviennent dans leur pays qu'une fois qu'ils ont effectué plusieurs attaques à l'étranger.
Contrer l'idéologie extrémiste
« Les érudits religieux sont essentiels pour contrer Daech », a affirmé Ahmed Ban, spécialiste des mouvances extrémistes. « Sans leurs efforts, les idées extrémistes continueront de grandir et d'évoluer. »
« La dissolution du mensonge du califat n'éliminera pas toutes les idées djihadistes, car celles-ci pourront refaire surface sous la forme d'autres groupes », a-t-il déclaré à Al-Mashareq.
« Il était donc impératif de contrer ces idées et d'éduquer les combattants qui reviennent, afin de les réinsérer dans la société, un rôle que seuls peuvent jouer les érudits religieux modérés », a-t-il indiqué.
Ban a expliqué que les combattants revenus de Daech sont « des bombes à retardement prêtes à exploser ».
« Cette question doit être abordée avec la plus grande prudence, car la plupart d'entre eux reviendront dans leur pays avec un profond sentiment d'échec et de dépression », a-t-il ajouté.
« La plupart des membres de Daech ne connaissaient que superficiellement l'islam, et ils n'en savent pas assez [pour comprendre] qu'il exhorte à l'amitié et à la paix », a-t-il fait savoir. « Or, un simple regard porté sur les décrets publiés par les autorités supérieures de Daech nous permet de leur trouver de grandes failles religieuses. »
La prise initiale de territoires par Daech en Irak et en Syrie a ébloui des milliers de jeunes, a expliqué le major général Talaat Moussa, expert militaire et ancien officier de l'armée égyptienne.
« Le fait que ces jeunes fuient désormais Daech et reviennent dans leurs pays est une preuve évidente que plus personne ne croit au rêve d'un califat ou ne veut rester avec Abou Bakr al-Baghdadi, à part quelques dirigeants », a-t-il affirmé.
« Les campagnes de sensibilisation de l'Al-Azhar réussiront à changer les idées des intégristes se trouvant parmi ceux qui reviennent », a-t-il expliqué à Al-Mashareq, notant que cette approche « pourrait réussir à détruire les fondements idéologiques de Daech ».