Les tribus de la province yéménite d'al-Bayda se sont engagées à lutter contre les groupes extrémistes et à protéger leur région de toute activité d'al-Qaïda ou de Daech, expliquent des responsables locaux à Al-Mashareq.
Ces tribus ont promis d'ostraciser tout membre dont il aura été prouvé qu'il a collaboré à ces groupes ou les a rejoints, s'engageant à les désavouer et à leur retirer la protection de la tribu dont ils bénéficient, a expliqué Cheikh Ali Mohammed al-Mansouri, gouverneur de la province d'al-Bayda.
« Les tribus d'al-Bayda ont accepté de protéger leurs régions et de maintenir les directorats et les villes de la province à l'abri des conflits », a-t-il précisé à Al-Mashareq.
Début avril, les médias locaux ont signalé que Daech avait publié des photos de combattants s'entraînant dans le camp Abou Mouhammad al-Furqan à al-Bayda.
« Ces camps sont situés en bordure de la province, dans des zones voisines de la province de Mareb », a-t-il indiqué, soulignant qu'ils avaient reçu un soutien sous la forme d'armes et de combattants de Mareb, qui n'est éloignée que d'une heure.
Daech n'a pas étendu sa présence au-delà de ces camps, a-t-il poursuivi, parce que les tribus avoisinantes sont les tribus Qayfa, qui lui sont hostiles, ainsi que les tribus Al Ghneim, Mahal Yazeed et Weld Rabih, qui se sont engagées à protéger leurs régions de Daech et d'al-Qaïda.
Daech possède des camps dans un certain nombre de régions de la province d'al-Bayda, a-t-il précisé, notamment « à Yakla, al-Naqaa, al-Arrar et Zaaj ».
Ces régions sont inhabitées, à l'exception de Yakla, peuplée par un faible nombre de Bédouins, a précisé al-Mansouri.
Les tribus prêtes à combattre
Les agences de sécurité surveillent les mouvements des groupes extrémistes, a poursuivi al-Mansouri, « et elles interviendront au moment voulu, avec la coopération des hommes des tribus, qui rejettent la présence de ces éléments dans leur région ».
« Ces tribus sont capables de protéger leurs terres et d'arrêter toute avance des groupes [extrémistes] », a affirmé à Al-Mashareq le politologue Adnan al-Humairi.
« Les camps de Daech sont implantés à la frontière entre les provinces d'al-Bayda et de Mareb, dans des zones inhabitées », a-t-il indiqué, et l'armée ne les a pas démantelés parce qu'elle est occupée par la guerre et ne souhaite pas ouvrir un nouveau front.
Toutefois, si ces éléments extrémistes devaient tenter de faire mouvement ou de s'étendre, les tribus et l'armée les en empêcheraient, a-t-il signalé.
Par ailleurs, la rivalité entre Daech et al-Qaïda pour le contrôle de certaines régions s'exacerbe, a-t-il indiqué.
Daech pense qu'il est dans une phase ascendante, alors qu'al-Qaïda est en recul, a-t-il précisé, ce qui a dressé les deux groupes l'un contre l'autre dans une lutte pour le contrôle de certaines régions.
Il est probable que Daech cherchera à l'avenir à s'implanter dans le directorat de Radaa, a-t-il indiqué, du fait de sa situation stratégique à proximité de la frontière avec plusieurs provinces.
Al-Humairi a mis en garde contre une guerre longue au Yémen, expliquant que cela « donne aux éléments extrémistes et à leurs groupes, Daech en particulier, une occasion de s'étendre ».
Nécessité de mettre un terme à la guerre
L'absence de l'autorité centrale de l'État laisse certaines parties du Yémen vulnérables à une occupation par Daech et d'autres extrémistes, a indiqué le politologue Tareq al-Zuraiqi à Al-Mashareq.
Cela est notamment le cas dans les régions où les combats sont en cours entre les provinces contrôlées par le gouvernement yéménite et celles contrôlées par les Houthis (Ansarallah) appuyés par l'Iran, notamment la province d'al-Bayda, a-t-il poursuivi.
« Du fait de sa puissance et de son contrôle sur ces régions, la tribu yéménite est capable de contrer la propagation de Daech et d'al-Qaïda », a affirmé al-Zuraiqi.
Mais le danger que représente l'attitude de ces groupes extrémistes va bien au-delà du Yémen, a-t-il ajouté, appelant la coalition arabe à viser activement leurs camps.
Par ailleurs, a-t-il poursuivi, l'échec de toutes les parties au conflit à le résoudre avec succès a fourni à Daech un climat favorable à la mise en place de camps d'entraînement et d'une possible expansion géographique.
Alors que la guerre au Yémen n'en finit plus, a-t-il expliqué, Daech a discrètement implanté ses positions militaires et s'est préparé à lancer des attaques-surprises contre les villes, comme cela a été le cas dans la ville irakienne de Mossoul.
« Le danger de la propagation et de l'expansion de Daech menace la sécurité et la stabilité non seulement du Yémen, mais aussi de l'ensemble de la région », a-t-il conclu.