Analyse

Le nouveau commandement du CGRI manque d'expérience militaire, affirment des analystes

Waleed Abou al-Khair au Caire

Saeed Mohammed, âgé de 50 ans, dirige actuellement la société de construction Khatam al-Anbiya, principale source de financement du CGRI. [Photo fournie par Sheyar Turko]

Saeed Mohammed, âgé de 50 ans, dirige actuellement la société de construction Khatam al-Anbiya, principale source de financement du CGRI. [Photo fournie par Sheyar Turko]

Une nouvelle génération d'officiers dispose désormais d'une grande influence dans la chaîne de commandement du Corps des Gardiens de la révolution islamique (CGRI), et ils supplantent progressivement la génération fondatrice, ont expliqué des experts à Al-Mashareq.

L'âge a commencé à rattraper la première génération d'officiers, ont-ils fait savoir, ajoutant que les noms et les identités de beaucoup d'officiers importants ont également été révélés, ce qui fait qu'ils peuvent difficilement se déplacer et mener des opérations de façon efficace.

Beaucoup d'eux ont été placés sur des listes de sanctions ou des listes de surveillance et sont surveillés ou traqués par des agences de renseignements, selon Sheyar Turko, un chercheur spécialisé dans le CGRI et ses méthodes de financement et de déploiement.

Cela complique leurs déplacements dans des zones comme l'Irak, la Syrie et le Yémen, a-t-il rapporté, et c'est l'une des raisons pour lesquelles le CGRI s'est tourné vers un nouveau leadership, nommant des officiers encore inconnus des médias et des agences de renseignements internationales.

D'anciens généraux du CGRI au côté du major général Qassem Soleimani, commandant de la Force Qods. [Photo diffusée sur les réseaux sociaux]

D'anciens généraux du CGRI au côté du major général Qassem Soleimani, commandant de la Force Qods. [Photo diffusée sur les réseaux sociaux]

De jeunes officiers du CGRI participent à une fête à Téhéran, capitale de l'Iran. [Photo diffusée sur les réseaux sociaux]

De jeunes officiers du CGRI participent à une fête à Téhéran, capitale de l'Iran. [Photo diffusée sur les réseaux sociaux]

Cela s'est « particulièrement vérifié avec la nomination de commandants de la Force Qods du CGRI (FQ-CGRI) dans les régions d'Alep et de Deir Ezzor », a poursuivi Turko.

Les officiers FQ-CGRI « contrôlent le processus de formation des nouvelles milices qui leur sont affiliées, et les moyens de financement qui reposent sur les taxes imposées aux civils, la contrebande, le trafic de drogue, et tout type d'activité illégale », a-t-il déclaré.

« L'avidité, les besoins, et les exigences des membres de cette nouvelle génération, qui sont différentes des exigences de l'ancienne génération, l'ont conduit à mener des activités et des accords spéciaux douteux pour recevoir une partie des fonds », a-t-il ajouté.

Ils le font en « profitant de leurs privilèges », a-t-il expliqué, et sont aidés en cela par leur relation directe avec leurs homologues des milices irakiennes affiliées au CGRI et du Hezbollah libanais.

Les jeunes officiers remplacent les vétérans de la guerre Iran-Irak

« Les officiers vétérans et vieillissants du CGRI qui ont participé à la guerre Iran-Irak et ont fondé le corps ont constitué un important dilemme pour le CGRI », a déclaré Fathi al-Sayed, chercheur au Centre Al-Sharq d'études régionales et stratégiques.

Le départ d'officiers aguerris, avec leur connaissance approfondie du fonctionnement interne du CGRI et de ses secrets, « laisse un grand vide, ce qui est la dernière chose dont le CGRI a besoin alors qu'il essaie de s'étendre dans la région », a-t-il expliqué à Al-Mashareq.

« Il semble que la décision ait été prise de se tourner vers le deuxième échelon de la chaîne de commandement, les jeunes officiers », a-t-il rapporté.

Les méthodes utilisées par le CGRI pour former et financer des milices hors d'Iran a « placé de jeunes éléments et officiers dans des rôles opérationnels vitaux », a-t-il indiqué.

Les stratégies de financement impliquent de transférer de l'argent illégalement « et de conclure des accords de trafic de drogue et de contrebande », a-t-il poursuivi, les nouveaux officiers étant utilisés « pour remplir des rôles essentiels à la place d'officiers à la retraite ou de ceux dont les noms et les activités ont été exposés au grand jour ».

« La preuve la plus évidente de l'influence dont dispose la nouvelle génération est la nomination de Saeed Mohammed, âgé de 50 ans, au poste de président de l'entreprise Khatam al-Anbiya (KAA-CGRI) », a affirmé al-Sayed.

Cette nomination s'est faite sur l'ordre direct du commandant du CGRI Mohammed Ali Jafari, a-t-il indiqué, et elle « reflète la nouvelle réalité du CGRI, considérant que KAA-CGRI est la branche de financement principale du CGRI ».

KAA-CGRI bénéficie d'une présence plus vaste dans la région et est devenue « l'une des entreprises de construction les plus importantes et les plus omniprésentes au Moyen-Orient », a-t-il déclaré, qui contrôle des centaines de sociétés en Iran et à l'étranger.

« Mohammed est un officier du CGRI qui a occupé des positions importantes dans des entreprises affiliées à KAA-CGRI, ce qui lui a permis de progresser et d'atteindre le poste le plus élevé dans la société », a-t-il fait savoir.

Depuis la création de l'entreprise, ce poste est « réservé aux généraux importants appartenant à la première génération ayant fondé le CGRI », a-t-il ajouté.

Division entre deux générations de commandants

« Malgré le fait que les commandants du premier échelon trouvent en général le comportement et les idées de la nouvelle génération d'officiers, [leur ascension au pouvoir] est devenue une réalité », a affirmé le major général Yahya Mohammed Ali, analyste en stratégie et ancien officier de l'armée égyptienne.

C'est inévitable, a-t-il déclaré à Al-Mashareq, et cela s'est produit, malgré l'existence de nombreuses peurs, « comme la possibilité d'infiltration d'idées plus modérées prônant le changement et la réforme chez ces officiers ».

L'arrivée de nouvelles idées et attitudes portant sur le financement plutôt que l'expérience militaire est le reflet de ce qui se passe dans la société iranienne en général, et est le résultat de « la difficile situation économique actuelle ».

Ces nouvelles idées et façons de faire des affaires pourraient constituer un obstacle à « la mise en œuvre des projets d'expansion politique et militaire de l'ancienne génération », a-t-il expliqué.

Elles auront aussi « un impact direct sur la façon de penser du CGRI dans toutes ses composantes, notamment la Force Qods et toutes les entreprises qui gravitent autour d'elle », a-t-il ajouté.

« Il est naturel que les idées extrémistes s'adoucissent et soient supplantées par des idées moins extrêmes qui acceptent davantage autrui », a déclaré Mohammed Ali.

« Mais cela a déclenché une vague d'opposition dans les rangs du CGRI entre les partisans de la pensée historique [du CGRI] et ceux qui ont de nouvelles idées ; un conflit qui va sans nul doute ébranler l'image stéréotypée du groupe et sa capacité à influencer le peuple iranien », a-t-il poursuivi.

Le blocage médiatique appliqué activement est une conséquence naturelle de ces changements, a-t-il affirmé, et est une tentative pour préserver l'aura du CGRI et l'héritage qu'il s'est si durement efforcé de maintenir depuis sa création au début des années 1990.

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