L'Iran accentue son ingérence en Afghanistan, en ciblant particulièrement la province de Farah, expliquent les responsables afghans.
L'Iran mène une double politique vis-à-vis du gouvernement afghan : alors qu'il prétend être l'ami du peuple afghan, il est en réalité son ennemi, a déclaré le Général Nouroullah Qaderi, commandant du 207e corps de Zafar de l'armée nationale afghane.
« Ne prenez pas [l'attaque] du 15 mai à la légère ni comme une simple affaire lors de laquelle quelques hommes à motos sont venus et ont pris la ville », a-t-il déclaré au Salaam Times, en référence à la tentative manquée des Talibans de prendre Farah en début d'année.
« Cette [agression] a été planifiée et préméditée. Ils avaient élaboré cet [assaut] depuis l'étranger », a-t-il poursuivi.
« Nous avons un ennemi extérieur, que nous combattons sur plusieurs fronts », a précisé Qaderi. » Nous partageons une frontière longue de 290 kilomètres avec l'Iran, un pays que nous appelons notre ami, alors qu'en réalité, l'Iran est notre ennemi. »
Une revanche contre les États-Unis
L'Iran soutient les Talibans pour poursuivre ses propres visées en Afghanistan, expliquent analystes et responsables locaux.
« Le gouvernement iranien dispose d'une grande influence sur les Talibans, et les utilise dans la région occidentale [de l'Afghanistan] », a expliqué Mohammad Rafiq Shahir, politologue de la province de Herat, au Salaam Times. « L'Iran s'ingère dans les affaires de la province de Farah en raison de rivalités sérieuses entre l'Iran et les pays occidentaux, en particulier les États-Unis. »
Le gouvernement iranien tente de saboter les intérêts américains en soutenant les Talibans, a indiqué Dadoullah Qane, membre du conseil provincial de Farah.
Les projets de construction du barrage de Bakhshabad dans la province de Farah et les sanctions américaines contre l'Iran impliquent que Téhéran ne peut rester indifférent, a-t-il ainsi déclaré au Salaam Times.
L'une des manières d'ingérence à Farah consiste à permettre aux Talibans de s'emparer des postes de contrôle aux frontières entre les deux pays, a-t-il expliqué, soulignant la prise d'un poste de sécurité afghan dans la région de Kuh Quch du district de Qala Kah.
La pénurie d'eau alimente le conflit
L'intérêt de l'Iran consiste également à maintenir l'approvisionnement en eau de ses provinces orientales, qu'il craint de voir menacé par le futur barrage de Bakhshabad, indiquent les analystes.
Les autorités iraniennes, notamment le président Hassan Rouhani, ont déjà déclaré que la construction de barrages dans des pays voisins, en particulier l'Afghanistan, était inacceptable.
Le gouvernement iranien fait mention des besoins de ses provinces orientales pour justifier le fait d'empêcher la construction du barrage de Bakhshabad, a poursuivi Shahir.
« L'eau est un sujet important pour l'Iran. Par le passé, l'Afghanistan ne disposait pas d'un gouvernement assez fort pour protéger ses ressources en eau », a-t-il expliqué.
« Maintenant que les premiers projets hydrauliques sont mis en œuvre par le gouvernement afghan, cela prend un tour très sérieux pour l'Iran... Les régions orientales d'Iran sont confrontées à une grave sécheresse, et de nombreuses protestations ont vu le jour en raison des pénuries d'eau », a-t-il poursuivi.
Par ailleurs, le Mouvement populaire pour la paix a mis fin vendredi 27 juillet à un sit-in de protestation de trois jours devant l'ambassade d'Iran à Kaboul, selon TOLOnews.
Les membres de ce mouvement avaient planté leur tente devant l'ambassade et affiché plusieurs banderoles sur les murs de béton de celle-ci.
« Au peuple d'Iran ! Votre gouvernement équipe des groupes militants en Afghanistan », pouvait-on lire sur l'une d'elles.
« Au peuple iranien ! Notre eau vous sauve la vie, mais votre gouvernement prend la nôtre », proclamait une autre.
Entrave au développement
Le gouvernement iranien fait avorter les plans du barrage de Bakhshabad depuis de nombreuses années, a expliqué Jamila Amini, membre elle aussi du conseil provincial de Farah.
Le gouvernement afghan a souhaité à plusieurs reprises ériger ce barrage sur la rivière Farah, mais en a toujours été empêché en raison de l'insécurité et de la présence des Talibans dans la région, a-t-elle déclaré au Salaam Times.
« Lors de mon entretien avec le président [afghan], je lui ai indiqué que le gouvernement iranien ne devrait pas être en mesure d'empêcher la construction du barrage de Bakhshabad », a-t-elle ajouté.
« Autrefois, ce barrage n'était rien d'autre qu'une ambition. Mais aujourd'hui, construire ce barrage est une nécessité de première importance », a poursuivi Amini.
« Le niveau de la nappe phréatique dans la province de Farah s'est considérablement réduit », a-t-elle conclu. « Si la construction de cet ouvrage ne débute pas très prochainement, c'est toute la population de Farah qui devra migrer dans les dix prochaines années en raison de la pénurie d'eau. »