Santé

Sinaï: les femmes utilisent la broderie bédouine pour combattre le virus

AFP

Une bédouine égyptienne porte un enfant au village d'al-Hamada à Wadi el-Sahu su Sud-Sinaï le 31 mars 2019, dans le premier « circuit du Sinaï » mené par des femmes guides bédouines. [Khaled Desouki/AFP]

Une bédouine égyptienne porte un enfant au village d'al-Hamada à Wadi el-Sahu su Sud-Sinaï le 31 mars 2019, dans le premier « circuit du Sinaï » mené par des femmes guides bédouines. [Khaled Desouki/AFP]

A al-Arich, capitale pronviciale du Nord-Sinaï, un groupe de femme brodent des motifs bédouins colorés sur les masques pour combattre le coronavirus, alors que les forces égyptiennes se battent pour expulser les extrémistes de la péninsule dans le cadre d'une campagne continue.

L’Égypte a enregistré plus de 28.600 cas de COVID-19, dont plus de 1.000 décès alors que le Nord-Sinaï est au centre d'une campagne militaire pour éliminer « l'État islamique en Irak et en Syrie » (EIIS).

« J'ai appris à broder quand j'étais jeune, en observant ma mère », confie Naglaa Mohamed, femme au foyer de 36 ans, parlant d'une ligne fixe, vu que les réseaux de téléphones mobiles sont souvent perturbés.

Une brodeuse versatile, elle décore aussi les vêtements avec des perles et réalise des bagues et bracelets.

Maintenant avec la pandémie, elle conçoit des masques mettant en évidence son patrimoine bédouin.

Les bédouins sont des tribus nomades qui habitent traditionnellement les zones du désert à travers le monde arabe, de l’Afrique du Nord à l'Irak. Beaucoup ont aujourd'hui intégré une mode de vie plus urbain.

La tradition textile bédouine égyptien 'tatriz' -- tissage et broderie de perles de designs et motifs géométriques et abstraits riches sur les vêtements, coussins et sacs à main -- a été transmise au fils des générations pendant des siècles.

Elle a survécu dans la péninsule du Sinaï, dont le nord est infligé par des années d'activité militaire et attaques terroristes menées par l'EIIS.

Préserver le patrimoine

En février 2018, les autorités égyptiennes ont lancéune opération à travers le pays contre les combattants armés, axée sur le Nord-Sinaï.

Environ 970 combattants suspects ont été tués depuis lors dans la région, ainsi que des dizaines de membres du personnel de sécurité, selon les chiffres officiels.

Mais pour Amany Gharib, fondatrice de l'association al-Fairouz à al-Arich en 2010, la violence ne l'a pas empêché de préserver le patrimoine bédouin tout en autonomisant les femmes locales.

Elle emploie maintenant environ 550 femmes comme Mohammed -- dont la plupart occasionnellement ou à temps partiel -- dans l'atelier du textile.

« Les masques sont faits de deux couches: une première aseptique, en contact direct avec le visage, et une seconde, brodée de perles et colorées, à l'extérieur », a expliqué Gharib.

Toutes les femmes prennent les précautions nécessaires en travaillant, en portant des gants et masques alors qu'elles utilisent les machines à coudre.

Les produits finis sont lavés, emballés et transportés vers les centres de distribution au Caire, où ils sont vendus en-ligne en partenariat avec Jumia -- le géant de l'e-commerce en Afrique -- à environ 40 livres ($2.50) l'unité.

Le processus de broderie en perles prend environ deux jours pour chaque masque, a expliqué Gharib.

Vivre avec la terreur

Face à une situation de sécurité volatile, Mohammed lutte pour assurer un revenu modeste avec ses capacités de broderie.

« Nous travaillons et réalisons des profits sur la base de commandes reçues... Avec les masques, c'était un tout nouveau défi que nous abordons», a-t-elle dit.

Les conditions économiques difficiles en Égypte sont aiguës pour les femmes au Sinaï depuis l'éruption de la pandémie mondiale de coronavirus.

« Les temps sont vraiment durs pour les femmes mais nous nous sommes adaptées », confie Gharib.

Alors que les attaques des combattants sur les points de contrôle de la sécurité continuent, Gharib a exprimé qu'elle avait confiance dans l'armée.

« Nous avons un sentiment de sécurité et de stabilité avec la présence militaire. Nous leur faisons confiance», a-t-elle confié.

La région a vécu une attaque terroriste la plus mortelle dans l'histoire moderne de l’Égypte lorsque des combattants ont tué plus de 300 personnes dans une mosquée en novembre 2017.

Gharib a affirmé que la communauté au Nord-Sinaï est soudée, chaque famille connait quelqu'un qui est mort dans l'attaque.

« Quand l'un de nous est tué, nous le considérons comme un martyr», a-t-elle souligné. « Nous sommes en guerre contre le terrorisme... mais les gens ont appris à vivre avec».

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