Sécurité

Les milices houthies sectaires et fidèles à l'Iran détruisent l'identité nationale du Yémen

Nabil Abdoullah al-Tamimi à Aden

Des policiers houthis assis à l'arrière d'un véhicule militaire à Sanaa, sur cette photo d'archive du 17 septembre 2019. [Mohammed Huwais/AFP]

Des policiers houthis assis à l'arrière d'un véhicule militaire à Sanaa, sur cette photo d'archive du 17 septembre 2019. [Mohammed Huwais/AFP]

Les Houthis (Ansarallah) ont formé des milices strictement sectaires et orientées vers l'Iran, prêtant allégeance à la République islamique plutôt qu'à l'État yéménite, ont mis en garde des observateurs yéménites.

Par contraste, ont-ils déclaré, le serment militaire yéménite standard exige que les diplômés des académies militaires et de police prêtent un serment d'allégeance à Dieu et à la patrie et jurent de servir le peuple du Yémen.

Des vidéos diffusées par des militants des droits de l'homme montrent des diplômés des écoles militaires et de police des zones contrôlées par les Houthis chantant des slogans sectaires, au lieu de chanter l'hymne national, et jurant fidélité aux Houthis et à l'Iran.

Mouammar al-Eryani, ministre de l'Information, a réagi en mettant en garde contre les efforts de l'Iran pour former des milices sectaires qui suivent les ordres de son Corps des Gardiens de la révolution islamique (CGRI).

Le CGRI cherche à rapprocher le Yémen du giron iranien, a-t-il expliqué, et à étendre l'influence du régime iranien dans la région en contrôlant les voies de navigation proches des eaux yéménites et en menaçant la paix et la sécurité internationales.

S'adressant aux médias le 5 novembre, al-Eryani a accusé les Houthis d'endoctriner les nouvelles promotions de cadets de l'armée et de la sécurité.

Il a déclaré que les nouveaux diplômés avaient dû jurer allégeance à Abdoul Malek al-Houthi et à l'Iran au lieu de prêter le serment militaire traditionnel.

Cela renverse complètement les principes et les valeurs de la République yéménite, a-t-il affirmé, et peut être considéré comme une provocation et un défi envers le peuple yéménite.

Par le biais des Houthis, ses intermédiaires, l'Iran cherche à former des milices sectaires qui doivent jurer fidélité au CGRI et obéir à ses ordres, et à les établir comme une alternative à l'armée nationale et aux services de sécurité, a déclaré al-Eryani.

L'intention est de mettre en œuvre les politiques de l'Iran dans la région sans tenir compte des intérêts du peuple yéménite, a-t-il fait savoir, de la même manière que le Hezbollah cherche à subvertir l'État libanais.

L'Iran cherche ainsi à subvertir l'identité nationale du peuple yéménite et à miner la coexistence traditionnelle entre les différents groupes religieux qui le composent.

Des camps d'entraînement dans les zones contrôlées par les Houthis

Plusieurs chercheurs et analystes politiques ont rapporté que les Houthis utilisent les institutions militaires de l'État pour construire une armée sectaire qui prête allégeance à l'Iran, sous le nom d'Armée nationale.

Les Houthis cherchent ainsi à mettre en place une force régulière, comme une armée d'État, qui serait affiliée à l'Iran et qui le protégerait contre toute résistance sociétale, a expliqué l'analyste politique Waddah al-Jalil à Al-Mashareq.

Lors de leur coup d'État de 2014, a-t-il poursuivi, les Houthis ont pris le contrôle des institutions de l'État et d'une vaste zone géographique qui abrite un fort pourcentage de la population du Yémen.

Ils ont créé une armée milicienne, recrutant de nombreux enfants soldats, qui se concentre sur la défense des intérêts de l'Iran et la mise en œuvre des plans du CGRI.

« Les camps d'entraînement prolifèrent dans les zones contrôlées par les Houthis, et comprennent des camps de l'État et des camps récemment établis, où les Houthis assurent un entraînement idéologique et militaire à leurs éléments », a-t-il fait savoir.

En plus de ces camps, il existe des centres de recrutement et des points de rassemblement dans la plupart des provinces placées le contrôle des Houthis.

« Ces camps sont principalement concentrés dans la province de Saada, et dans une moindre mesure dans les provinces voisines de Hajjah et Amran, et dans une bien moindre mesure encore, à Sanaa et Dhammar et d'autres provinces sous contrôle houthi », a indiqué al-Jalil.

Abdoul Salam Mohammed, directeur du Centre Abaad d'études stratégiques, a également souligné la prolifération des « centres d'endoctrinement sectaire » des Houthis et l'utilisation par le groupe de camps de l'armée nationale.

Ces efforts de recrutement et d'endoctrinement visent à ouvrir la voie à « une armée du CGRI au Yémen ayant une loyauté absolue envers le Wali al-Faqih (le Guide suprême iranien Ali Khamenei) », a-t-il expliqué à Al-Mashareq.

« La mobilisation sectaire au Yémen est menée à tous les niveaux, militaire, culturel, sociétal et même politique, avec pour toile de fond l'objectif iranien », qui est de bâtir un État sectaire fidèle à la République islamique, a-t-il déclaré.

« Destruction de l'identité de la société »

Il est « très dangereux » d'entendre les cadets des académies et instituts militaires yéménites répéter les slogans du régime iranien, a confié à Al-Mashareq l'avocat et militant des droits de l'homme Abdoul Rahman Berman.

« Cela affaiblira la loyauté nationale entre les générations, car leur fidélité ira aux Houthis et à leurs dirigeants, qui prêtent une allégeance totale à l'Iran », a-t-il déclaré.

Berman a ajouté que les Houthis ont rendu la Wilayat al-Faqih et le chant de slogans sectaires « obligatoires dans toutes les institutions civiles et militaires, les universités et les mosquées ».

Cela conduira à une fracture sociale, a-t-il affirmé, « à cause d'un faible sentiment d'appartenance à la patrie » et au renforcement des loyautés sectaires au-delà de la loyauté envers l'État yéménite.

Ce qu'il se passe, c'est une « destruction de l'identité de la société », a-t-il déclaré.

Le politologue Adel al-Shujaa a quant à lui mis en garde contre le danger de ne pas s'opposer au programme sectaire des Houthis, notant qu'ils ont « transformé les zones qu'ils contrôlent en un camp ouvert, où ils recrutent des partisans par tous les moyens ».

« Nous devons agir pour endiguer le danger que représente cette bande et son expansion qui se développe chaque jour, et nous devons avoir un projet national qui serve de rempart contre elle », a-t-il déclaré à Al-Mashareq.

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