Le ressentiment s’accroît parmi les chiites libanais, la base du Hezbollah, beaucoup tenant maintenant le parti pour responsable de la crise économique du pays.
Des chiites de différentes régions du pays qu’Al-Mashareq a rencontrés, ont indiqué que leur vision du Hezbollah s’était fortement détériorée ces derniers mois.
Ils se méfient du parti, ont-ils expliqué, parce qu’il est puissant et constitue un obstacle aux réformes nécessaires pour que le Liban puisse accéder à l’aide financière internationale.
De plus, la crise économique à laquelle le Liban est actuellement confronté a été aggravée par les sanctions américaines contre les membres et les agents du Hezbollah.
Le Hezbollah n’est plus un parti de « résistance », ont-ils noté, mais plutôt « un complice de la corruption et une des raisons de l’effondrement [économique] du Liban ».
« J’étais l’un des plus fervents partisans du Hezbollah, mais depuis cet effondrement économique, je me suis rendu compte que le groupe est responsable des problèmes économiques du pays », a déclaré Suleiman, un cuisinier de la vallée occidentale de la Bekaa.
« Sa politique et sa participation aux guerres de la région ont conduit à des sanctions contre le Liban, et nous en payons le prix », a-t-il affirmé à Al-Mashareq, demandant que son nom de famille ne soit pas divulgué.
« Je suis aujourd’hui sans travail », a-t-il déclaré. « Mes économies sont épuisées. J’ai trois enfants. Comment puis-je subvenir aux besoins de ma famille ? Que fait le parti pour nous aider ? »
« Le parti sert ses propres intérêts »
Bien qu’il se soit présenté comme un « sauveur » devant le peuple libanais, le Hezbollah n’a servi que ses propres membres et sympathisants, a déclaré Mohsen Qassem, un habitant de la ville de Nabatiyeh, dans le sud du pays.
« Nous réalisons maintenant combien le parti nous a trompés avec ses slogans », a-t-il indiqué à Al-Mashareq. « La crise économique et financière ronge nos dernières ressources. Maintenant, le parti ravage ce qui reste du Liban. »
Selon Hussein Ezzeddine, membre du Mouvement de réforme chiite, la situation économique actuelle au Liban a brisé le « statut de saint » d’Hassan Nasrallah, le leader du Hezbollah.
« Nous nous souvenons tous du discours de Nasrallah lorsqu’il a dit que son argent, ses armes et tout ce qu’il possède viennent d’Iran et que son peuple n’aura pas faim, quoi qu’il arrive. Tout le monde, même ses adversaires, l’ont cru », a-t-il rapporté.
Mais au fil des événements, ses propos ont progressivement perdu de leur crédibilité et sont désormais considérés comme de la simple rhétorique politique, a déclaré Ezzeddine à Al-Mashareq.
« La majorité des chiites libanais détestent maintenant le Hezbollah », a-t-il affirmé. « Après le 17 octobre (date à laquelle les manifestations populaires ont commencé), le statut de Nasrallah a changé, passant de celui de dirigeant chiite libanais à celui de dirigeant d’un parti ultra-extrémiste. »
Les chiites libanais descendent dans la rue
« À l’exception de ceux qui sont directement associés au Hezbollah, environ 80 % des chiites au Liban expriment maintenant ouvertement leur colère », a rapporté un dissident chiite, qui a demandé à conserver l’anonymat.
Ils subissent les conséquences de la saisie de leurs comptes bancaires et de la baisse de 70 % de la valeur de leurs salaires, a-t-il confié à Al-Mashareq.
Ils imputent une grande partie de la responsabilité de cette situation au Hezbollah, a-t-il ajouté, notant que les gens se demandent maintenant ce qui va se passer en hiver, avec les prix élevés du carburant et la distribution de l’aide sociale.
Le journaliste Ali Badreddine, qui dirige l’Association Wai (Sensibilisation) basée à Nabatiyeh, a également noté que le mécontentement augmente chez les chiites libanais.
« C’est la première fois depuis 1984 qu’un nombre aussi important de chiites descendent dans la rue dans les régions du sud du Liban pour exprimer leur colère contre les autorités et le Hezbollah », a-t-il déclaré à Al-Mashareq.
« La principale raison est que la pauvreté augmente chez les chiites », a-t-il expliqué.
Le Hezbollah n’a tenu aucune de ses promesses d’améliorer les conditions de vie de la population, et n’a rien fait pour empêcher l’effondrement économique au Liban ou assurer le développement économique, a conclu Badreddine.