Sécurité

Embourbés dans la crise, les habitants de Beyrouth s’insurgent contre le Hezbollah

Nohad Topalian à Beyrouth

Des bâtiments entiers ont été détruits lors de l’explosion du 4 août qui a secoué le port de Beyrouth et a fait au moins 171 morts. [Nohad Topalian/Al-Mashareq]

Des bâtiments entiers ont été détruits lors de l’explosion du 4 août qui a secoué le port de Beyrouth et a fait au moins 171 morts. [Nohad Topalian/Al-Mashareq]

Les habitants de Beyrouth qui se sont entretenus avec Al-Mashareq ont déclaré qu’ils accusent le Hezbollah d’être à l’origine des récentes calamités qui ont frappé le Liban et ses habitants, y compris l’explosion dévastatrice du 4 août dans le port de Beyrouth.

Confrontés à cette catastrophe, qui a tué au moins 171 personnes, blessé 6000 autres et creusé un cratère de 43 mètres de profondeur, les Libanais se sont mobilisés pour aider les habitants des zones les plus touchées.

Sur la Place des Martyrs, des habitants ont participé à une manifestation pour le « Jour du jugement », organisant des funérailles symboliques pour les victimes, demandant la privation des droits de la classe politique dirigeante et disant « Non aux armes du Hezbollah ».

Certains ont demandé que le chef du Hezbollah, Hassan Nasrallah, soit jugé.

Sur la Place des Martyrs de Beyrouth, des manifestants ont participé à une manifestation du « Jour du jugement » le 8 août afin de demander la privation de droits de la classe politique au pouvoir et dire « Non aux armes du Hezbollah ». [Nohad Topalian/Al-Mashareq]

Sur la Place des Martyrs de Beyrouth, des manifestants ont participé à une manifestation du « Jour du jugement » le 8 août afin de demander la privation de droits de la classe politique au pouvoir et dire « Non aux armes du Hezbollah ». [Nohad Topalian/Al-Mashareq]

Les décombres de maisons et de magasins détruits jonchent les rues des quartiers sinistrés de Beyrouth après l’explosion survenue le 4 août dans le port de la ville. [Nohad Topalian/Al-Mashareq]

Les décombres de maisons et de magasins détruits jonchent les rues des quartiers sinistrés de Beyrouth après l’explosion survenue le 4 août dans le port de la ville. [Nohad Topalian/Al-Mashareq]

L’explosion dévastatrice du 4 août dans le port de Beyrouth a tué au moins 171 personnes, en a blessé 6000 autres et a creusé un cratère de 43 mètres de profondeur sur le littoral. [Nohad Topalian/Al-Mashareq]

L’explosion dévastatrice du 4 août dans le port de Beyrouth a tué au moins 171 personnes, en a blessé 6000 autres et a creusé un cratère de 43 mètres de profondeur sur le littoral. [Nohad Topalian/Al-Mashareq]

« Ça suffit », a déclaré la manifestante Mirna Sibai à Al-Mashareq. « Il est temps que le Hezbollah réalise qu’il est la cause de notre ruine et de nos innombrables crises ».

« Le Hezbollah a prouvé qu’il n’est pas qualifié pour être un partenaire positif dans la construction du pays », a-t-elle déclaré. « Au contraire, il est la cause de sa destruction et de nos crises économiques, financières et sociales ».

« Son ingérence dans les affaires politiques libanaises par le biais d’un gouvernement qu’il soutient a exacerbé nos problèmes intérieurs et extérieurs », a-t-elle ajouté.

Lien entre le Hezbollah et le port

« Peu importe à quel point le Hezbollah nie sa connexion au port de Beyrouth, le fait est qu’il contrôle toutes ses artères et tout ce qu’il s’y passe », a indiqué Sibai. « Il l’administre comme bon lui semble. »

De ce fait, « son refus d’assumer la responsabilité de l’explosion est ridicule », a-t-elle ajouté. « Celle-ci a causé la mort de personnes innocentes et la destruction de Beyrouth, une ville qui était autrefois source d’une grande fierté. »

Les accusations selon lesquelles c’est le « Hezbollah qui a fait exploser le port de Beyrouth » ont résonné dans les quartiers sinistrés de Beyrouth, a rapporté Naji al-Jbeili, qui a survécu à l’explosion mais dont la maison dans la zone de la Medawar-Électricité du Liban s’est effondrée.

« La divine providence a sauvé ma famille, qui rendait visite à des proches dans les montagnes », a-t-il raconté à Al-Mashareq, debout au milieu des décombres et du toit effondré de la maison que lui et ses trois frères avaient construite avec les gains de leur vie.

« Nous avons tous, dans notre quartier et dans les quartiers adjacents, perdu les toits des maisons qui nous abritaient et que nous avions gagnées une vie durant à la sueur de notre front », a-t-il ajouté. « Où est le Hezbollah pour nous aider à faire face à notre désastre ? »

« Le Hezbollah doit cesser de prétendre qu’il n'a rien à voir avec le port », a-t-il déclaré. « Tous les habitants de la région savent bien qu’il contrôle entièrement le port et toutes ses installations, tout comme il contrôle le gouvernement et s’immisce dans tous les aspects de la vie politique et économique. »

« Il fait passer toute la contrebande qu’il veut par le port et par des points de passage illégaux sans que personne ne l’arrête », a-t-il ajouté.

« Non qualifiés pour construire la nation »

« Depuis des mois, nous payons le prix des politiques du Hezbollah avec l’effondrement économique et financier, car c’est un parti touché par des sanctions », a déclaré al-Jbeili.

« Il n’est pas qualifié pour porter la responsabilité de construire une nation, car il s’est avéré antipatriotique », a-t-il ajouté.

Les habitants des zones sinistrées de Beyrouth tiennent le Hezbollah pour responsable non seulement de la catastrophe portuaire et des crises économique et financière du pays, mais aussi des tensions dans les relations du Liban avec les pays arabes et le reste de la communauté internationale.

« Le Hezbollah a tué le Liban il y a des années en intervenant dans les guerres de la région et en commettant des actes terroristes », a déclaré Jamil Freyha, qui inspectait la maison effondrée de ses proches près d’Électricité du Liban.

« Cela a fini par ruiner les relations du Liban avec le monde entier et a poussé les Arabes et les citoyens du Golfe à nous boycotter et à nous priver de nos moyens de subsistance », a-t-il expliqué à Al-Mashareq, notant que ces pays sont maintenant « solidaires avec nous ».

Le Hezbollah est par nature et par conception une organisation militaire, et en tant que tel, il a joué un rôle direct dans les conflits dans au moins trois pays, a déclaré à Al-Mashareq Mohammed Barakat, directeur d’Asas Media.

« Le Liban est un véritable aquarium d'eau chaude pour le Hezbollah, qui y contrôle tous les points d’entrée, l’aéroport, les ports maritimes et les frontières terrestres au sud, à l’est et au nord », a-t-il déclaré. « Le fait qu’il contrôle entièrement le port n’est qu'un détail. »

Pour corriger la situation, le Liban doit revenir à sa position de neutralité, comme proposé par le patriarche maronite Beshara Boutros al-Rahi, et le Hezbollah doit se désengager des conflits régionaux, a-t-il affirmé.

Les Libanais meurent de faim

L’effondrement économique du Liban s’est étendu à tous les secteurs de production, et la population a commencé à mourir de faim, a expliqué l’économiste Sami Nader à Al-Mashareq.

Il a accusé le Hezbollah d’être le principal facteur de la crise économique du pays, car il a entravé la capacité du Liban à conclure un accord avec le Fonds monétaire international (FMI) et à obtenir une aide internationale.

La milice « porte une énorme responsabilité dans la crise économique au Liban, à cause de son engagement envers le programme iranien au détriment des moyens de subsistance des Libanais », a indiqué Nader.

Le système politique en vigueur au Liban permet au Hezbollah d’exercer son influence, et le parti utilise le pays comme un outil dont il se sert quand il le souhaite, a déclaré Makram Rabah, qui enseigne au département d’Histoire de l’Université américaine de Beyrouth

« Le parti porte la responsabilité d’avoir exposé le Liban aux sanctions internationales qui ont conduit à la rupture de l’aide », a-t-il déclaré à Al-Mashareq, ce qui a provoqué un effondrement économique qui menace tous les foyers libanais.

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2 COMMENTAIRE (S)

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Car ils ont déçu les gens politiquement.

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Il y des problèmes avec ses rapports. Par exemple, ne croyez-vous pas que votre référence aux manifestations civiles en Iran et en Irak est un peu étrange? Ce que nous avons vu jusqu'à présent ne sont pas des manifestations. [Savez-vous] le nombre de victimes [de la répression des manifestations]? Ceux-ci sont appelés des carnages. Les manifestations et autres actions sont propres à un gouvernement légitime. Est-ce que vous voyez un [règne de la] loi en Iran ou en Irak? Parfois, il y [une forme de loi]; mais, [elle est] en faveur de la minorité qui règne. Elle ressemble à la loi mais elle sert la minorité, et non le peuple. Est-ce que vous voyez une trace du gouvernement en Iran au cours de la pandémie de coronavirus? Au cours des manifestations de novembre, ou le massacre de novembre 2019, en Iran, toutes les communications étaient coupées et une loi martiale en bonne et due forme a été établie. Je pouvais entendre le son des balles tirées [toute la nuit] et jusqu'au matin. Ni les manifestations civiles, ni les élections ni les réformes, n'ont une place en Iran et dans les pays similaires. Ceux-ci sont appelés des meurtres et carnages. C'est très proche de l’œuvre la plus récente du groupe de milice libanaise, que vous avez mentionné dans le texte. Ils doivent accepter la responsabilité pour les meurtres. Des centaines d'innocents. Ils ont lié le [le nom] "Allah" à eux [une référence au nom Hezbollah, signifiant le parti de Dieu] pour duper les gens. Je le répète, je ne crai

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