Santé

Au Liban, le coronavirus aggrave les problèmes de Tripoli, ville frappée par la pauvreté

Nohad Topalian à Beyrouth

Les membres de la Task Force Utopia participent à une campagne de désinfection des rues après que la ville libanaise de Tripoli a enregistré quatorze cas d'infection au nouveau coronavirus. [Task Force Utopia]

Les membres de la Task Force Utopia participent à une campagne de désinfection des rues après que la ville libanaise de Tripoli a enregistré quatorze cas d'infection au nouveau coronavirus. [Task Force Utopia]

Samir al-Hassan, originaire du district de Bab al-Tabbaneh à Tripoli, a déclaré qu'il préférait prendre le risque de contracter le nouveau coronavirus (COVID-19) que de voir sa famille mourir de faim.

Cette attitude est partagée par de nombreux habitants de Tripoli, qui ont souffert du terrorisme, de l'extrémisme et des violences sporadiques qui ont ravagé la ville entre 2007 et 2014, laissant de nombreuses personnes démunies.

Pour les habitants pauvres de la ville, la mise en quarantaine signifie une mort certaine, car ils subissent la pauvreté depuis avant le début de la pandémie mondiale de coronavirus.

Aujourd'hui, ils se retrouvent confrontés à la menace du coronavirus les poches vides, ce qui les oblige à enfreindre les règles de confinement à domicile et à descendre dans la rue à la recherche de leur subsistance quotidienne.

Des bénévoles de la Task Force Utopia pulvérisent du désinfectant dans les rues de Tripoli pour protéger contre le nouveau coronavirus. [Task Force Utopia]

Des bénévoles de la Task Force Utopia pulvérisent du désinfectant dans les rues de Tripoli pour protéger contre le nouveau coronavirus. [Task Force Utopia]

Une campagne de stérilisation est en cours dans les rues et les quartiers de Tripoli pour protéger contre le nouveau coronavirus. [Task Force Utopia]

Une campagne de stérilisation est en cours dans les rues et les quartiers de Tripoli pour protéger contre le nouveau coronavirus. [Task Force Utopia]

Cette situation a poussé des organisations de la société civile à mener des campagnes pour distribuer des rations alimentaires et du matériel de stérilisation aux familles des quartiers les plus pauvres de la ville.

Obligés de travailler

Al-Hassan, père de trois enfants, a raconté qu'il avait dû quitter la maison à la recherche d'un travail quotidien pour compléter les rations alimentaires qu'il reçoit de la part d'organisations d'aide.

« Sans les rations alimentaires, nous serions littéralement morts de faim », a-t-il affirmé à Al-Mashareq.

« Nous avons réussi à vivre pendant des années de combat, et avons été témoins de la prolifération des groupes extrémistes dans nos quartiers, ce qui a exacerbé nos malheurs », a-t-il déclaré. « Dès que cela s'est terminé, nous avons été frappés par la crise économique, le chômage, et maintenant le coronavirus ».

« Mais peu importe à quel point je m'enfonce dans la pauvreté, je ne tomberai jamais dans le piège des groupes extrémistes, et cela est vrai pour tous les jeunes pauvres, qui savent maintenant que ces groupes nous mèneront à notre perte », a-t-il ajouté.

Le COVID-19 a jusqu'à présent infecté quatorze personnes à Tripoli, avec un total de 632 cas et 20 décès dans le pays.

Mohammad Yakan, vendeur de kaak (pain), a également du mal à respecter les mesures de confinement, « parce que ma situation financière est très difficile, et j'ai cinq enfants que je dois nourrir, sans autre revenu que celui que je tire de ce chariot », a-t-il déclaré.

Aide aux zones à faibles revenus

Le maire de Tripoli, Riad Yamaq, a déclaré que la municipalité avait alloué trois milliards de livres libanaises (2 millions de dollars) à distribuer « très prochainement » dans les zones à faibles revenus, sous forme de bons d'achat échangeable dans les petits commerces.

Chaque bon vaut 75 000 livres (50 dollars), a-t-il fait savoir, ajoutant que la municipalité a également contribué à hauteur de 150 millions de livres (99 000 dollars) pour l'achat d'une machine de test de coronavirus pour l'hôpital gouvernemental.

« Nous sommes conscients de la souffrance de la classe ouvrière pauvre, dont le travail quotidien a été perturbé par le coronavirus, car beaucoup d'entre eux ont des chariots de kaak et de légumes, ou travaillent dans des cafés pour 20 000 livres (13 dollars) par jour », a-t-il déclaré à Al-Mashareq.

Yamaq a également minimisé la possibilité que des groupes extrémistes exploitent la situation du virus pour recruter les pauvres avec des incitations financières.

« Je ne suis pas du tout inquiet, car ces groupes sont finis dans la ville », les gens ont pris conscience « qu'ils ne leur ont apporté que des malheurs et des souffrances », a-t-il expliqué.

Chadi Nachabe, président et fondateur de l'association Utopia, a déclaré que Tripoli, qui compte plus de 800 000 habitants, est « la ville des pauvres, car plus de 60 % de sa population vit dans des conditions très difficiles, et le taux de chômage y dépasse les 35 % ».

Utopia et beaucoup d'autres organisations de la société civile et la Croix-Rouge libanaise ont lancé la campagne Utopia Task Force pour distribuer des rations alimentaires et du matériel de stérilisation aux habitants de Tripoli « pour qu'ils restent chez eux », a-t-il déclaré.

Ces rations se composent de suffisamment de riz, de sucre, de lentilles, de pois chiches, de haricots, d'huile, de fromage, de halva, de conserves et de matériel de stérilisation et de nettoyage pour 10 jours, a-t-il fait savoir à Al-Mashareq.

Nachabe a déclaré que le COVID-19 « va probablement augmenter le taux de pauvreté, ce qui nécessite que nous unissions nos efforts pour aider les habitants et faire en sorte qu'ils restent chez eux et respectent la distanciation sociale ».

Dans le même temps, l'association Azm and Saade a mobilisé ses services sociaux et sanitaires pour répondre à la pandémie de coronavirus, a indiqué à Al-Mashareq un responsable de l'association qui a demandé à conserver l'anonymat.

En coopération avec la municipalité de Tripoli, Azm a lancé une « campagne de sensibilisation et a distribué du matériel de stérilisation, des masques et des rations alimentaires, tout en continuant à désinfecter les rues et les quartiers », a-t-il déclaré.

L'organisation a également contribué à hauteur de 80 millions de livres (53 000 dollars) à l'achat de la machine de test de coronavirus pour l'hôpital gouvernemental, a-t-il ajouté.

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