Sécurité

Les organisations affiliées au CGRI sont « incapables » de gérer la crise du COVID-19

Sina Farhadi

Le général de brigade du CGRI Gholamreza Jalali dirige l'Organisation de défense passive, qui a été critiquée pour sa mauvaise gestion de la réponse à la crise du COVID-19. [Archive]

Le général de brigade du CGRI Gholamreza Jalali dirige l'Organisation de défense passive, qui a été critiquée pour sa mauvaise gestion de la réponse à la crise du COVID-19. [Archive]

Les dirigeants iraniens subissent une pression accrue en raison de leur réaction à l'épidémie du nouveau coronavirus (COVID-19). Le pays a en effet annoncé jeudi 19 mars que le virus avait tué 149 personnes de plus, un nouveau record en une journée.

Sans confinement, le virus s'est répandu dans les 31 provinces du pays, suscitant de vives critiques de la part du public.

Le 1er mars, le Corps des Gardiens de la révolution islamique (CGRI) a annoncé une « Campagne contre le coronavirus », officialisant ainsi son rôle dans la réponse à la crise.

La Force de résistance Basij, un groupe paramilitaire affilié au CGRI « sera préparée et active dans l'arène de la coopération et de l'assistance, jusqu'à la victoire complète sur cette maladie et le retour à une situation normale », a-t-il déclaré dans un communiqué.

Le général de brigade du CGRI Gholamreza Jalali accompagne le Guide suprême iranien Ali Khamenei lors de sa visite au personnel de l'Organisation de défense passive, sur une photo diffusée en ligne en octobre 2018. [Archive]

Le général de brigade du CGRI Gholamreza Jalali accompagne le Guide suprême iranien Ali Khamenei lors de sa visite au personnel de l'Organisation de défense passive, sur une photo diffusée en ligne en octobre 2018. [Archive]

L'Organisation de défense passive (ODP) d'Iran est également chargée de diriger la réponse de la nation au COVID-19.

L'ODP est responsable de « l'élaboration des politiques, de la planification, de la direction, de l'organisation, de la coordination, du contrôle et du fonctionnement des activités de défense passive et de protection civile [...] des organismes chargés de l'application de la loi ».

Son mandat comprend des efforts pour faire face aux menaces cybernétiques, biologiques, radioactives, chimiques et économiques.

Les Iraniens dénoncent le double objectif de l'ODP

Malgré son rôle civil, l'ODP est progressivement devenue une organisation militaire opérationnelle dont le personnel est principalement composé de membres du CGRI et de Basij, indiquent des analystes.

Ce double objectif et ce changement d'orientation s'inscrivent dans un contexte de méfiance croissante du peuple iranien envers la capacité du CGRI à faire face à l'épidémie de COVID-19.

« La création de l'ODP [en 2004], comme toutes les autres organisations qui ont été formées hors du gouvernement au fil du temps sous la direction d'Ali Khamenei, faisait en fait partie de son plan pour former un organisme parallèle », a expliqué le politologue Amir Reza Taghipourian.

« Comme le Guide suprême estime que les agences gouvernementales ne lui sont pas totalement fidèles, il a toujours cherché à créer des organisations relevant de son propre contrôle », a-t-il déclaré à Diyaruna.

« Il a mis en place des actions similaires en ce qui concerne le parlement et a soutenu des institutions parallèles comme le Conseil de discernement de l'intérêt supérieur du régime et le Conseil suprême de la révolution culturelle. En fait, le CGRI lui-même est une institution militaire parallèle. »

« Khamenei ne fait confiance qu'aux agences placées sous son propre contrôle et il s'appuie surtout sur les membres du CGRI pour mettre ces agences en place », a-t-il déclaré. « Pour cette raison, l'ODP est aussi une agence qui est contrôlée par le CGRI. »

L'Union européenne a annoncé des sanctions contre l'ODP en 2010, accusant l'organisation d'avoir des liens avec le développement par l'Iran de systèmes d'armement nucléaire.

Depuis 2015, le général de brigade Gholamreza Jalali est à la tête de l'ODP. Un comité présidé par le major général Mohammad Bagheri, chef de l'état-major général des forces armées, supervise l'organisation.

Jalali ne rend des comptes qu'à Khamenei et Bagheri.

Le secret et les mensonges prolongent la crise

La raison pour laquelle l'ODP a raté la réponse au COVID-19 est que ces dernières années, son objectif a porté sur la répression et la restriction des citoyens iraniens sur internet, la mise en place d'une guerre psychologique et le développement des infrastructures technologiques de l'Iran pour faire face à l'influence étrangère, indiquent des analystes.

Comme d'autres agences dépendantes de l'armée, l'ODP est accusée d'avoir gardé des secrets et d'avoir menti sur la propagation de la maladie en Iran et, par conséquent, de prolonger et d'aggraver la crise.

Le 4 février, par exemple, l'ODP a publié une déclaration affirmant que « les enquêtes sur le terrain et les preuves existantes montrent que la possibilité d'une épidémie de la maladie en Iran est faible ».

Un mois plus tard, l'épidémie de COVID-19 en Iran est l'une des plus meurtrières en dehors de la Chine, d'où est originaire la maladie.

Un total de 18 407 personnes ont contracté la maladie en Iran, et 1046 nouveaux cas ont été confirmés au cours des dernières 24 heures.

Pourtant, le président Hassan Rohani a continué de défendre la réponse du gouvernement.

« Certains se demandent pourquoi le gouvernement n'intervient pas, mais je pense que nous sommes intervenus de manière significative », a-t-il déclaré dans un discours télévisé de mercredi, après la réunion hebdomadaire de son gouvernement.

« De grandes choses ont été accomplies, [y compris] des mesures qu'aucun autre pays n'a prises », a-t-il indiqué, entouré de ministres portant des masques.

Critiques sévères à la réponse au COVID-19

Les Iraniens sont sceptiques, surtout au vu des dissimulations et des mensonges récents du régime.

« Toutes les institutions gouvernementales et publiques ont été mobilisées pour lutter contre le coronavirus », a déclaré sur Twitter début mars Farid Modarres, journaliste à Qom. « Je me demande où se trouve l'ODP, l'agence la plus importante en ces temps ; qu'a-t-elle prévu de faire et qu'a-t-elle fait ? »

Hadi Yazdani, médecin en Iran, avait des préoccupations similaires.

« Nous avons deux organisations, l'Agence de gestion de crise et l'ODP ; s'il y a une raison pour qu'elles aient été créées, c'est pour jouer un rôle dans des moments comme la crise du coronavirus », a-t-il écrit sur Twitter le 8 mars. « Voyez-vous maintenant des traces ou des effets des dirigeants de ces deux organisations ? Ne doivent-ils être dans les médias qu'en temps de calme ? »

Mohammad Delavari, animateur de l'émission Téhéran 20 diffusée sur la chaîne de télévision iranienne Channel 5, a sévèrement critiqué le rôle de Jalali dans la gestion de la crise.

Dans un entretien accordé à l'agence de presse Fars le 3 mars, Jalali a mentionné l'affirmation absurde selon laquelle le COVID-19 pourrait être une attaque biologique contre l'Iran.

« Jalali, le dirigeant de l'ODP, devrait venir nous répondre et nous dire si nous avons été attaqués biologiquement ou non, et si nous avons été attaqués, que font les groupes sous son contrôle », a demandé Delavari lors de l'émission du 7 mars.

La lutte pour le pouvoir met des vies en danger

Le conflit et la lutte de pouvoir sur la question de savoir quelle entité devrait prendre en charge la gestion de la crise du COVID-19 deviennent chaque jour plus évidents.

« L'ODP a déclaré un 'état blanc' début février, alors que plusieurs citoyens de Qom sont morts du coronavirus », a déclaré à Diyaruna Ali Zanjani, un militant politique en Iran.

« Ce n'est pas seulement un signe de son inadéquation, mais cela révèle aussi que contrairement à ses statuts et à ses revendications, la principale priorité de l'organisation n'est pas la préservation de la vie des gens, mais comme d'autres institutions militaires et gouvernementales, elle donne la priorité aux intérêts du pouvoir des dirigeants », a-t-il affirmé.

« Le manque de professionnalisme de l'organisation dans la lutte contre le coronavirus se poursuit et aujourd'hui, même au plus fort de la crise, [l'ODP] et ses partisans luttent pour le pouvoir avec les établissements de santé et disent sans honte que personne ne prend d'ordre d'un médecin et que, pour cette raison, le centre de gestion devrait être retiré des mains du ministère de la Santé. »

Le 11 mars, Jalali avait critiqué le gouvernement de Rohani pour son transfert de la gestion de crise au ministère de la Santé, affirmant que personne « n'a l'habitude d'accepter les ordres du directeur d'une école de médecine ».

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1 COMMENTAIRE (S)

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Ce sont tous des mots des ennemis de l'Iran islamique, point.

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