Politique

Le Hezbollah va-t-il suivre l'Iran ou se retirer de Syrie ?

Waleed Abou al-Khair au Caire

Des membres du Hezbollah libanais lors des funérailles d'un des combattants du parti tué en Syrie, sur une photo mise en ligne le 10 mai 2018. [Photo fournie par la Fondation des martyrs]

Des membres du Hezbollah libanais lors des funérailles d'un des combattants du parti tué en Syrie, sur une photo mise en ligne le 10 mai 2018. [Photo fournie par la Fondation des martyrs]

Les pertes du Hezbollah augmentant suite à son alliance avec l'Iran et sa participation militaire en Syrie, le groupe doit recentrer son attention sur la stabilité au Liban, affirment des parties prenantes et des observateurs.

« Le Hezbollah a subi et continue de subir de lourdes et nombreuses pertes dans les opérations militaires qui se poursuivent en Syrie », a fait savoir Salah Mansour, qui est de la même famille qu'un haut responsable du Hezbollah et avait été proche de la direction du parti dans la vallée de la Bekaa avant de se séparer du groupe.

« Les pertes en vies humaines sont très élevées, et les nouvelles de la mort de combattants dans diverses régions de Syrie continuent de nous parvenir », a-t-il indiqué à Al-Mashareq, utilisant un pseudonyme pour sa sécurité.

« Au cours du premier mois de l'année, il a été annoncé qu'au moins cinq combattants du Hezbollah avaient été tués en Syrie, dont deux commandants de terrain. »

Le combattant du Hezbollah Muhib al-Nimr a été tué dans la région d'Alep, a annoncé le parti le 24 janvier 2020. [Photo diffusée sur les réseaux sociaux]

Le combattant du Hezbollah Muhib al-Nimr a été tué dans la région d'Alep, a annoncé le parti le 24 janvier 2020. [Photo diffusée sur les réseaux sociaux]

Parmi les tués figurent Mouhib al-Nimr, Jaafar al-Sadiq, Ammar Darwish, Abbas Younis et Abbas Taha, a-t-il précisé.

En plus des pertes en vies humaines, les pertes matérielles du Hezbollah se sont transformées en « véritable crise financière compte tenu des pressions que subit le Corps des Gardiens de la révolution islamique (CGRI) en Iran et de la crise économique que connaît l'Iran en général », a déclaré Mansour.

Agitations dans les rangs du Hezbollah

Malgré les conséquences négatives, le Hezbollah est toujours activement impliqué dans les opérations militaires à Alep et à Idlib, et se redéploie également dans la région occidentale de Qalamoun, « où il a établi une nouvelle base militaire pour lui-même dans la base du bataillon de défense aérienne près de la ville de Jebaadin », selon Mansour.

« Il contrôle également plusieurs collines stratégiques dans la région et s'est déployé à l'intérieur de la ville elle-même », a-t-il déclaré. « La zone est d'une importance stratégique pour le groupe, car elle se situe le long de la frontière libano-syrienne. »

« L'agitation règne dans les rangs du parti et parmi sa base populaire à cause des pertes continues en vies humaines ainsi que de la grave contraction de ses ressources financières, qui était jusqu'ici un avantage », a-t-il indiqué.

« L'une des conséquences est que les jeunes ne rejoignent plus ses rangs comme ils le faisaient autrefois », a-t-il rapporté.

« Il a ainsi récemment permis à des personnes n'étant pas membres du parti de participer aux opérations militaires en Syrie en échange d'indemnités mensuelles bien inférieures à ce qu'elles étaient et ne dépassant pas 200 dollars, profitant de la situation économique du Liban, du manque d'emplois et du chômage généralisé chez les jeunes », a-t-il fait savoir.

Le Hezbollah doit s'éloigner de l'Iran

La meilleure solution pour le Hezbollah et sa survie en tant que parti est de « s'éloigner de l'axe iranien et de maintenir son activité politique pacifique au Liban », a expliqué Fathi al-Sayed, chercheur spécialisé dans les affaires iraniennes au Centre Al-Sharq d'études régionales et stratégiques de Gizeh.

« Les activités de la branche militaire du Hezbollah au Liban et en Syrie, et la menace constante qu'elle représente pour la sécurité de la région en font une cible ou une raison pour le lancement d'une opération militaire contre elle », a-t-il déclaré.

Cela nuira non seulement au Hezbollah, mais aussi au peuple et à l'État libanais, a-t-il ajouté.

Le Liban « n'a pas besoin de tensions en ce moment étant donné les conditions économiques et politiques critiques qu'il traverse », a indiqué al-Sayed.

« La poursuite de la politique actuelle du parti laisse présager, sur la base des développements en cours, d'autres complications qui pourraient éventuellement mener à une explosion interne », a-t-il déclaré.

La subordination du Hezbollah au CGRI « le met sur la voie d'une confrontation avec les États-Unis et l'expose à des sanctions financières » destinées à l'affaiblir et à mettre fin à ses interventions en Syrie, au Yémen et en Irak, a déclaré al-Sayed.

« Cela a eu d'une manière ou d'une autre un impact sur la situation économique générale de l'État libanais, qui souffre déjà d'une situation financière catastrophique. »

Une menace pour la paix au Moyen-Orient

« Le déploiement militaire continu du Hezbollah en tant que principal bras du CGRI dans la région est la plus grave menace pour la paix au Moyen-Orient et elle touche [de manière négative] tous les efforts déployés pour établir la paix, en particulier entre l'État d'Israël et les pays qui l'entourent, comme le Liban et la Syrie », a affirmé Abdoul Nabi Bakkar, politologue et professeur à l'université Al-Azhar du Caire.

« Ce parti, à travers les déclarations de ses responsables, continue de proférer des menaces et de diffuser une culture de haine et de guerre », a-t-il indiqué à Al-Mashareq.

« La diversité sectaire et politique qui caractérise le Liban lui permet d'établir de bonnes relations avec toutes les parties internationales et régionales afin d'améliorer sa situation économique et financière », a-t-il déclaré.

Mais les « positions encore plus dures qu'adopte actuellement le Hezbollah causent à l'État libanais, et avec lui au peuple libanais, de graves pertes politiques et matérielles », a-t-il ajouté.

Le parti doit « poursuivre la politique de dissociation dans la pratique et ne pas suivre les positions de l'Iran qui sont hostiles à la plupart des pays du monde », a conclu Bakkar.

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