Économie

Les chauffeurs de taxi de Damas, déjà touchés par la guerre, doivent rationner l'essence

AFP

De longues files d'attente dans les stations-service de Damas sont le dernier signe d'une crise pétrolière touchant les régions de Syrie contrôlées par le régime, le gouvernement y ayant imposé une limite à la consommation quotidienne d'essence subventionnée. [AFP]

Une fois son réservoir vide, le chauffeur de taxi syrien Abou Sammy a dû sortir pour pousser son véhicule avec l'aide d'un passant, jusqu'à une longue file d'attente à une station-service de Damas.

« C'est très fatigant », a déclaré le chauffeur après avoir poussé son taxi jusqu'à la pompe dans l'est de la capitale, avec une main sur le volant.

Les files d'attente aux stations-service sont le dernier signe en date d'une crise pétrolière qui frappe les régions syriennes contrôlées par le régime, où le gouvernement a imposé une limite à la consommation quotidienne d'essence subventionnée.

Abou Sammy a indiqué que ses problèmes de voiture étaient normaux après des mois de files d'attente interminables pour acheter du gaz naturel et du fioul qui se sont faits rares.

Des taxis et d'autres véhicules civils font la queue à une station-service de Damas le 8 avril. Le régime a été confronté à toute une série de sanctions internationales depuis le début du conflit en 2011, y compris concernant l'importation de produits pétroliers. [Louai Beshara/AFP]

Des taxis et d'autres véhicules civils font la queue à une station-service de Damas le 8 avril. Le régime a été confronté à toute une série de sanctions internationales depuis le début du conflit en 2011, y compris concernant l'importation de produits pétroliers. [Louai Beshara/AFP]

Des Syriens font la queue pour faire le plein à une station-service de Damas le 8 avril. Les files dans ces stations sont le dernier signe en date d'une crise pétrolière qui touche les régions de Syrie contrôlées par le régime. [Louai Beshara/AFP]

Des Syriens font la queue pour faire le plein à une station-service de Damas le 8 avril. Les files dans ces stations sont le dernier signe en date d'une crise pétrolière qui touche les régions de Syrie contrôlées par le régime. [Louai Beshara/AFP]

« Notre destin est de faire la queue », a-t-il affirmé, assis dans son taxi à la station-service du district de Zablatani dans la capitale.

« Après le gaz [naturel], ça a été le fioul. Après le fioul, c'est maintenant [l'essence]. Je ne sais pas ce que ça sera demain », a-t-il déclaré.

Le gouvernement syrien est confronté à une vague de sanctions internationales depuis le début du conflit en 2011, y compris contre l'importation de produits pétroliers.

Samedi, le ministère du Pétrole et des Ressources minérales a fait savoir qu'il réduisait temporairement de moitié le plafond quotidien d'essence subventionnée, le faisant passer de 40 à 20 litres par véhicule.

Lundi, des stations-service ont déclaré avoir reçu une autre note du ministère, leur ordonnant de limiter encore plus la distribution de carburant à hauteur de 20 litres toutes les 48 heures.

« C'est loin d'être suffisant »

Abdou Masrabi, chauffeur de taxi de 67 ans, regardait avec anxiété le pistolet remplir le réservoir de son taxi jaune, en attendant qu'il s'arrête, indiquant qu'il avait atteint son quota.

Il a fait la queue pendant quatre heures pour remplir son réservoir avec la quantité autorisée.

« C'est loin d'être suffisant », a-t-il déploré. « Je travaille avec ce taxi, je le conduis toute la journée. Maintenant que j'ai réussi à y mettre cette quantité minuscule, je vais rentrer chez moi et reprendre le travail demain. »

La réduction de carburant disponible va limiter sa capacité à transporter des passagers, a indiqué Masrabi ; or, il a besoin de travailler tous les jours.

« Si j'arrête de travailler, je ne pourrais pas nourrir mes enfants ou moi-même. »

Lundi soir, Ali Ghanem, ministre du Pétrole et des Ressources minérales, a déclaré que le plafond temporaire ne concernera pas l'allocation mensuelle de carburant subventionné.

Les automobilistes ont toujours droit à 200 litres d'essence subventionnée chaque mois, a-t-il fait savoir.

La récente décision a pour but de limiter la quantité de carburant que chaque véhicule peut consommer quotidiennement, « pour que davantage de citoyens puissent faire le plein chaque jour », a-t-il déclaré lors d'une visite des stations-service de Damas.

Mais les habitants de Damas craignent que l'allocation gouvernementale mensuelle baisse.

Samedi, le Premier ministre Emad Khamis a déclaré que la majorité des Syriens consommaient en moyenne 120 litres par mois.

« C'est cette quantité qui doit être subventionnée [...], tout ce qui dépasse sera vendu au prix normal », a-t-il affirmé.

« J'achète du temps"

Depuis l'intervention militaire de la Russie dans le conflit syrien en 2015, le régime contrôle près des deux tiers de la Syrie. Mais ses champs pétroliers et gaziers principaux dans le nord-est restent hors de son contrôle.

En novembre, le Trésor des États-Unis a publié un nouvel avis menaçant de sanctionner les personnes « impliquées dans le transport de pétrole avec le gouvernement syrien ».

Il a également pris des mesures pour perturber un réseau « à travers lequel le régime iranien, travaillant avec des entreprises russes, fournit des millions de barils de pétrole au gouvernement syrien ».

Des files d'attente longues de centaines de mètres se sont créées ces derniers jours près des stations-service, car les Syriens se précipitent pour obtenir leur part subventionnée.

Mais alors que certains chauffeurs se plaignaient car ils ont besoin de plus d'essence à bas prix, d'autres ont indiqué que leur inquiétude principale était le temps perdu dans ces files.

Hussam Antabli a préféré récemment faire le plein avec de l'essence non subventionnée pour le double du prix, 9000 livres syriennes (environ 20 USD), plutôt que d'avoir à attendre pendant des heures.

« À ce prix-là, j'achète du temps », a-t-il déclaré. « Je préfère travailler qu'attendre. »

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