Jeunesse

Les Houthis utilisent la Journée des Martyrs pour endoctriner les enfants

Nabil Abdoullah al-Tamimi à Aden

Des enfants yéménites accompagnés de leurs pères tiennent des armes lors d'un rassemblement à Sanaa le 27 septembre 2018 destiné à soutenir les Houthis. [Mohammed Huwais/AFP]

Des enfants yéménites accompagnés de leurs pères tiennent des armes lors d'un rassemblement à Sanaa le 27 septembre 2018 destiné à soutenir les Houthis. [Mohammed Huwais/AFP]

Des écoliers de Sanaa et d'autres régions du Yémen contrôlées par les Houthis (Ansarallah) soutenus par l'Iran ont à nouveau été endoctrinés et préparés à devenir des combattants en étant obligés de participer aux célébrations de la « Journée des Martyrs ».

Cet événement annuel, organisé à une date apparemment aléatoire définie par les Houthis, s'inspire des célébrations similaires de la Journée des Martyrs du Hezbollah et de l'Iran.

Avant la fête de cette année, qui a commencé le 19 janvier et s'est poursuivie par une série d'événements et d'activités dans les écoles et les bâtiments gouvernementaux, les Houthis ont recueilli des fonds en imposant des taxes aux marchands locaux, ont rapporté des observateurs.

En glorifiant leurs combattants morts et en les traitant comme des héros, les Houthis espèrent pousser les jeunes des zones qu'ils contrôlent à s'enrôler.

Le programme a inclus des visites scolaires obligatoires aux tombeaux des combattants morts de la milice, appelés « Riyadh al-Shuhada » (les Jardins des Martyrs), a fait savoir l'agence de presse Khabar le 15 janvier.

Ces sanctuaires affichent les portraits de combattants houthis tombés au combat et glorifient leur sacrifice, ainsi que celui des leaders de la milice, a indiqué l'agence.

Les marchands locaux ont dû payer

Les Houthis soutenus par l'Iran ont contraint les chefs d'entreprises et les marchands locaux à payer des sommes importantes pour financer les activités de la Journée des Martyrs, a rapporté Khabar.

La collecte d'argent menée par la milice pour cette cause a été particulièrement amère pour les enseignants des écoles publiques, les Houthis ne leur ayant pas versé leurs salaires depuis des années.

Les Houthis « dépensent des millions dans des célébrations de ce genre juste sous le nez des instituteurs affamés qui ont arrêté d'enseigner parce qu'ils ne reçoivent pas leurs prestations et leurs salaires », a déclaré le journaliste yéménite Munir Talal.

La milice utilise la Journée des Martyrs comme moyen pour se faire de l'argent sur le dos des commerçants, et elle détourne aussi des fonds des budgets gouvernementaux pour couvrir la dépense, a-t-il expliqué à Al-Mashareq.

« Les Houthis voient la Journée des Martyrs comme une opportunité permettant d'envoyer à la mort des écoliers transformés en combattants », a-t-il déclaré.

Cette fête est de toute évidence une imitation de la Journée des Martyrs du Hezbollah, a-t-il continué, qui est également conçue pour glorifier les combattants morts et encourager de nouvelles recrues à s'enrôler.

« Les Houthis ont replacé la majorité des directeurs d'école par des personnes qui leur sont affiliées et qui ne viennent pas du domaine de l'éducation », a fait savoir Amin Mohammed, ancien directeur d'une école publique de Sanaa ayant demandé à utiliser un psendonyme.

Ces personnes ont été mises à ces postes pour servir les objectifs de la milice plutôt que pour éduquer les enfants du Yémen, a-t-il indiqué à Al-Mashareq.

Les écoles sont obligées de respecter cette fête

Le ministère de l'Éducation à Sanaa, qui est dirigé par Yahya al-Houthi, frère du leader des Houthis Abdoulmalik al-Houthi, a ordonné aux écoles de « continuer à organiser des activités pour la Journée des Martyrs pendant plus d'une semaine », a rapporté Mohammed.

Plusieurs écoles ont reçu pour ordre d'organiser des célébrations publiques auxquelles doivent participer des dirigeants houthis, et lors desquelles les directeurs des écoles qui suivent la directive de la milice ont été honorés, a-t-il ajouté.

Le refus des Houthis d'approuver le versement d'une subvention saoudienne pour les enseignants et de leur verser leurs salaires a privé les écoles publiques de leur rôle, a-t-il affirmé.

En conséquence de ces actions, a-t-il poursuivi, toute une génération a été condamnée à l'ignorance et a été poussée vers les champs de bataille.

« Les Houthis entravent le fonctionnement des écoles en leur imposant des taxes et des tributs sous prétexte 'd'effort de guerre' », a déclaré la directrice d'école Sabria Saleh, s'exprimant elle aussi sous couvert d'un pseudonyme.

« Ces pratiques augmentent la pression sur la communauté et les écoles privées, et ont donc une influence [négative] sur l'enseignement », a-t-elle expliqué à Al-Mashareq.

Les événements de la Journée des Martyrs ont été précédés par la prolifération des fresques et des posters sur le campus de l'université de Sanaa représentant des combattants houthis tombés au combat, ce qui a provoqué l'indignation de nombreux membres du corps enseignant.

Le comité des professeurs et des universitaires a publié une déclaration dénonçant l'utilisation par les Houthis des places de l'université pour l'organisation d'événements et de rassemblements sectaires destinés à mobiliser des combattants.

Préparer les jeunes à servir les desseins de l'Iran

Dans un message publié le 25 janvier sur les réseaux sociaux, le ministère yéménite de l'Information Muammar al-Eryani a qualifié de « déplorable » la décision d'autoriser la milice à afficher ces fresques et ces posters à l'université de Sanaa.

« Malheureusement, au lieu de devenir des docteurs, ingénieurs et avocats qui serviront de bonnes fondations à la société, les milices ont impliqué ces jeunes égarés dans des guerres futiles contre le peuple yéménite pour servir les plans subversifs de l'Iran », a-t-il indiqué.

En plus de cibler les étudiants avec leur propagande, les Houthis ont obligé les fonctionnaires des zones qu'ils contrôlent à se rendre aux cimetières où sont enterrés les combattants houthis morts afin d'y déposer des fleurs.

Naji Mohsen, employé du secteur des télécommunications, a déclaré à Al-Mashareq qu'il avait été contraint de visiter la tombe du dirigeant du conseil politique des Houthis, Saleh al-Samad, tué en avril 2018.

« Ceux qui n'obéissent pas s'exposent à des sanctions financières et administratives », a ajouté Mohsen.

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