Terrorisme

Les femmes du Sinaï restent fortes face aux menaces de l'État islamique

Par Ahmed al-Sharqawi au Caire

Des proches des victimes de l'attentat de la mosquée de Raouda, dans le Nord Sinaï, marchent à côté d'une ambulance devant l'hôpital universitaire du Canal de Suez à Ismaïlia le 25 novembre, où les blessés ont été traités. Les femmes du Sinaï restent fortes face aux menaces de l'État islamique. [Mohamed el-Shahed/AFP]

Des proches des victimes de l'attentat de la mosquée de Raouda, dans le Nord Sinaï, marchent à côté d'une ambulance devant l'hôpital universitaire du Canal de Suez à Ismaïlia le 25 novembre, où les blessés ont été traités. Les femmes du Sinaï restent fortes face aux menaces de l'État islamique. [Mohamed el-Shahed/AFP]

Wilayat Sinaï, groupe affilié à « l'État islamique » (Daech), a tenté de fragiliser la sécurité et la liberté des femmes de la péninsule en distribuant des tracts menaçants et en les harcelant dans la rue.

Malgré ces tentatives, menées sous le prétexte de sauvegarde des traditions religieuses, les femmes du Sinaï restent déterminées à défendre leur droit de vivre et de travailler comme elles le souhaitent, ont indiqué des habitants et des experts à Al-Mashareq.

Cette attitude découle de leur éducation, qui leur a appris à travailler dur et à soutenir leur pays, ont-elles déclaré.

« De temps à autre, le groupe distribue des tracts aux femmes qui marchent dans la rue, les menaçant de hududs si elles ne respectent pas ses décrets », a fait savoir Abeer Ibrahim, une habitante d'al-Arish.

« Cela ne dissuadera pas les femmes du Sinaï d'aller travailler et de continuer à vivre leur vie, même si les menaces contre leurs vies proférées par Daech sont sérieuses », a-t-elle affirmé à Al-Mashareq.

Les femmes ont joué un rôle important dans le développement de la société du Sinaï, a-t-elle indiqué, et elles se sont regroupées pour créer des associations pour la production et la vente d'objets artisanaux et traditionnels.

Domination et menaces

Ibrahim a rapporté qu'elle entendait presque tous les jours des affrontements près de chez elle, dans le district d'al-Zuhour, entre les forces égyptiennes et les éléments de Daech.

Elle a ajouté qu'elle se sentait toutefois plus en sécurité aujourd'hui qu'en 2015, lorsque Daech avait tué son cousin dans le village d'Abou Zarai à Cheikh Zuweid, où le groupe exécutait les habitants qu'il accusait de coopération avec l'armée. Cette dernière a depuis lors repris le contrôle du village.

« Nous espérons que l'armée pourra éliminer complètement le groupe, qui est désormais éparpillé dans de toutes petites poches qui ne représentent pas de menace réelle », a-t-elle confié.

En février dernier, des éléments de Daech équipés d'armes automatiques ont intercepté un bus scolaire qui allait d'al-Arish à Rafah.

Les militants ont remis aux enseignantes du bus un tract exigeant qu'elles portent le niqab et qu'elles se déplacent avec un mahram (gardien masculin), sous peine d'encourir des châtiments d'hudud, notamment la flagellation, la lapidation, l'amputation, et même la mort.

Le gouverneur du Nord Sinaï, Abdel-Fattah Harhour, est intervenu pour protéger les enseignantes, permettant au bus d'emprunter l'autoroute internationale, plus sûre et parsemée de postes de contrôle.

En décembre, des hommes armés ont ouvert le feu sur un bus transportant des enseignants et des enseignantes dans le Nord Sinaï, blessant deux d'entre eux.

Des éléments de Daech distribuent de temps à autre des tracts dans plusieurs villages, loin des forces de sécurité, a fait savoir Ahmed Ban, spécialiste des groupes extrémistes.

« Ils se filment [distribuant les tracts] puis s'enfuient et envoient les vidéos à Daech », a-t-il raconté à Al-Mashareq. « Cela prend à peine dix minutes, après quoi ils repartent vers les montagnes. »

Les tribus unies pour combattre Daech

Daech cible de plus en plus les femmes alors que les forces égyptiennes progressent contre le groupe et que les tribus de la région s'unissent sous la bannière de l'Union tribale du Sinaï pour le combattre, a déclaré le major général et expert militaire Moukhtar Qandeel.

Les éléments de Daech au Sinaï pensent qu'ils peuvent augmenter leur nombre de cibles en incluant les civils, a-t-il expliqué à Al-Mashareq, et que les gens obéiront à leurs ordres parce qu'ils seront intimidés par la menace de punitions.

L'un des décrets publiés par Daech interdit aux femmes de travailler dans des écoles publiques gérées par le gouvernement, a-t-il déclaré.

Mais malgré les menaces, les habitants du Sinaï restent « insoumis », a-t-il rapporté, notant que les femmes vont travailler comme avant, sans s'en soucier.

« Les femmes du Sinaï ont grandi dans une société qui valorise le travail, l'amour du pays et ne cède pas aux menaces d'organisations terroristes », a fait savoir le major général et expert militaire Ayman Hobbeddin.

« Les femmes élèvent leurs enfants selon les principes de la lutte, de l'intégration et de la coexistence dans l'État égyptien, afin que le Sinaï ne soit pas séparé de sa patrie », a-t-il déclaré à Al-Mashareq.

« Les menaces proférées par les groupes terroristes au Sinaï contre les femmes ne peuvent pas entraver leur participation à la vie sociale et la poursuite de leurs moyens de subsistance », a-t-il affirmé.

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