Dimanche 21 janvier, le gouvernement légitime du Yémen a approuvé le premier budget du pays depuis que les Houthis (Ansarallah) ont capturé Sanaa en 2014.
Le Premier ministre Obaïd ben Dagher a annoncé le budget pour 2018 lors d'une réunion du gouvernement dans la capitale provisoire d'Aden.
Il a fait savoir que les dépenses du budget devaient s'élever à 1,5 billion de riyals yéménites (3,9 milliards de dollars), et que les revenus étaient estimés à 978 milliards de riyals (2,6 milliards de dollars), a rapporté l'AFP.
Le gouvernement basé à Aden a prévu un déficit de 1,3 milliard de dollars, selon le taux de change de 380 riyals pour un dollar, ce qui est supérieur au marché, qui place le dollar à 450 riyals.
Dans un message publié sur Facebook, le Premier ministre a brossé un tableau dévastateur de l'économie du pays, indiquant que la production de pétrole et de gaz, source principale de revenus avant la guerre, avait cessé.
Il a ajouté que 5 milliards de dollars en réserves étrangères et des stocks de monnaie locale avaient été « pillés » par les Houthis, qui maintiennent une banque centrale séparée à Sanaa.
Ben Dagher n'a pas donné de détails sur les sources de revenus du budget, mais il fait suite à un important sauvetage financier par l'Arabie saoudite, le principal soutien du gouvernement reconnu internationalement.
Le Premier ministre a promis une « utilisation optimale » du dépôt de deux milliards de dollars de l'Arabie saoudite, lequel a aidé la devise nationale ces derniers jours, et a indiqué que ce nouveau « budget de l'austérité » garantirait notamment les salaires des fonctionnaires et de l'armée.
Le budget vise à « normaliser la vie »
Le budget comprend la fourniture en services nécessaires aux citoyens afin de « normaliser la vie dans les provinces libérées », a fait savoir ben Dagher dans un discours lors de la réunion.
Cela sera accompli grâce à l'allocation de budgets opérationnels aux secteurs des services dans les provinces libérées, la réhabilitation des institutions de l'État, et au versement des salaires des employés du secteur public dans le civil et l'armée.
« Le gouvernement travaillera également à chasser les [Houthis] responsables du coup d'État des zones qu'ils contrôlent depuis le 21 septembre 2014 », a déclaré ben Dagher.
Ce coup d'État a affecté l'économie du pays à « tous les niveaux économiques, sociaux, politiques et humanitaires », a-t-il déclaré, ajoutant qu'il a aggravé les phénomènes de pauvreté, de maladies et d'analphabétisme.
« La guerre [instiguée par] les Houthis a largement détruit l'infrastructure du pays, a saboté l'économie, affaibli les institutions de l'État et certaines entreprises du secteur privé », a-t-il rapporté.
Ben Dagher a accusé les Houthis de « piller tout ce qu'ils ont pu, d'avoir mis fin à la production de pétrole et de gaz, principale source de revenus du budget du pays pendant les trente dernières années, et d'avoir érodé les sources de souveraineté financière de l'État ».
Le gouvernement a décidé d'obliger les institutions étatiques de toutes les provinces à transférer les revenus de l'État central sur le compte du gouvernement auprès de la Banque centrale yéménite à Aden, ont rapporté les médias locaux.
Les salaires des employés du secteur public dans les provinces sous contrôle des Houthis seront versés lorsque les revenus de ces régions auront été transférés à la Banque centrale d'Aden, a expliqué ben Dagher.
Ce budget est une « étape positive »
Dans le même temps, des experts en économie ont exhorté le gouvernement à essayer d'étendre la base des revenus gouvernementaux et d'alléger les souffrances des employés du secteur public dans toutes les provinces.
« Le gouvernement doit travailler pour alléger les souffrances des citoyens, notamment des employés du secteur public dans toutes les provinces, plutôt que restreindre le versement des salaires aux provinces libérées », a déclaré l'expert en économie Abdoul Jalil Hassan à Al-Mashareq.
« En essayant de relancer les exportations de pétrole et de gaz, le gouvernement peut augmenter ses revenus », a-t-il expliqué.
Avant la guerre, les exportations de pétrole et de gaz représentaient 90 % des exportations du pays, 70 % de ses revenus et 30 % du PIB, a-t-il précisé.
Hassan a rappelé au gouvernement son engagement lorsqu'il a décidé de déplacer la Banque centrale à Aden le 18 septembre 2016.
« Le gouverneur de la Banque centrale avait promis de payer les salaires des employés du public dans toutes les provinces », a-t-il rappelé.
L'annonce de ce budget est une étape positive dans l'évaluation des performances du gouvernement, a indiqué à Al-Mashareq Moustafa Nasr, directeur du Centre d'études et de médias économiques.
« Le budget comprenait le paiement des salaires des employés du civil dans les secteurs de la santé et de la justice, ainsi que pour les employés des universités et de la Haute commission électorale, dans les régions contrôlées par les Houthis », a indiqué Nasr.
Cependant, il n'a pas inclus les salaires d'autres employés du secteur public dans les zones contrôlées par les Houthis, notamment les enseignants, a-t-il ajouté.
« La souffrance des employés du secteur public dans ces régions se poursuivra jusqu'à ce que l'État puisse reprendre ces provinces », a-t-il fait savoir.