Analyse

Le rôle du CGRI dans la chute d'Alep attise les tensions sectaires

Par Waleed Abou al-Khaïr au Caire

Le général de division Qassem Soleimani (à gauche), commandant des forces d'élite al-Qods, parcourt l'est d'Alep sur cette photo largement diffusée. [Photo circulant sur les réseaux sociaux]

Le général de division Qassem Soleimani (à gauche), commandant des forces d'élite al-Qods, parcourt l'est d'Alep sur cette photo largement diffusée. [Photo circulant sur les réseaux sociaux]

Le régime iranien s'estime victorieux dans la bataille d'Alep et a tenté de souligner cela par des déclarations officielles publiées après que la ville syrienne soit tombée aux mains de milices dirigées par son Corps des Gardiens de la révolution islamique (CGRI), ont expliqué des experts à Diyaruna.

L'ingérence de l'Iran, représentée par sa présence dans plusieurs zones syriennes, y compris Alep, attisera les divisions sectaires en Syrie et dans la région, ont-ils affirmé.

Dans plusieurs photos et vidéos largement rediffusées, l'on voit Qassem Soleimani, commandant des forces d'élite al-Qods parcourir Alep et sa citadelle, des images qui révèle clairement l'implication directe de l'Iran en Syrie.

Plusieurs personnalités iraniennes importantes ont aussi publié des communiqués saluant cette victoire.

Le secrétaire général iranien de l'Assemblée mondiale du réveil islamique et conseiller principal en politique étrangère du leader suprême de l'Iran, Ali Akbar Velayati, a déclaré que la « victoire » à Alep changerait de nombreuses « équations régionales ».

« Aujourd'hui, au vu de la victoire des forces de la résistance et la reprise d'Alep, nous voyons à nouveau une conquête manifeste », a indiqué Hossein Salami, commandant adjoint du CGRI.

Le général de brigade Hossein Dehghan, ministre iranien de la Défense, a décrit les « victoires » du régime iranien et de ses alliés à Alep comme « un moment important de la guerre menée par l'axe de résistance contre les terroristes et les extrémistes ».

L'Iran a cherché des gains, pas la paix

« En suivant les événements qui ont eu lieu dans la ville d'Alep, à commencer par son siège mené par des milices affiliées au CGRI et quelques soldats de l'armée régulière syrienne, nous pouvons affirmer que l'Iran était déterminé à faire échouer toute tentative de cessez-le-feu et à poursuivre des combats violents », a déclaré Fathi al-Sayed, chercheur spécialiste des affaires iraniennes au Centre al-Sharq d'études régionales et stratégiques.

« Des informations d'Alep ont confirmé que des milices affiliées au [CGRI] ont fait échouer plusieurs fois le processus d'évacuation, afin de lier le processus à des gains qu'elles voulaient obtenir dans d'autres régions », a-t-il confié à Diyaruna.

Le régime iranien a retardé l'évacuation d'Alep en insistant pour que les civils des villages de Fuaa et Kefraya, tenus par l'opposition, soient évacués en premier, a-t-il indiqué.

Ce fut « une extension de la mascarade iranienne visant à représenter l'intervention de l'Iran et de ses milices comme une guerre sacrée religieuse ayant pour but la protection et le sauvetage des chiites de l'attaque menée contre eux par les milices sunnites », a-t-il ajouté.

Le non-respect délibéré de la trêve à Alep ne sert pas seulement à prolonger la guerre en Syrie, a expliqué al-Sayed, mais également à encourager les groupes extrémistes, en particulier le Front al-Nosra (FAN), qui s'appelle désormais Front Fatah al-Cham, et « l'Etat islamique en Irak et au Levant » (EIIL), à poursuivre leurs atrocités contre les civils.

La commission d'enquête des Nations unies en Syrie a déclaré le 14 décembre avoir reçu des signalements indiquant que des combattants de l'opposition, parmis lesquels des activistes du FAN, empêchaient les civils de quitter Alep, s'en servant comme boucliers humains.

L'ingérence du CGRI dans la trêve syrienne « donnera un prétexte à ces groupes » pour poursuivre leurs opérations terroristes comme moyen de représailles contre le soutien iranien au régime syrien, a-t-il expliqué.

La détermination du régime iranien à reprendre Alep est significative pour plusieurs raisons, a indiqué al-Sayed, notant que cette ville se trouve au centre de l'attention médiatique et politique mondiale.

« Il semblait que quiconque contrôlait la ville contrôlerait aussi l'arène syrienne », a-t-il déclaré, ajoutant que « les déclarations iraniennes qui ont suivi la chute d'Alep visaient sans doute à répandre le message que l'intervention iranienne n'était plus secrète, mais se fait par une présence militaire directe ».

L'Iran a cherché à étendre son influence dans la région « grâce aux milices sectaires qu'il a implantées dans ces pays, menées par le parti du Hezbollah libanais , les forces Qods, la milice irakienne Harakat al-Nojaba et d'autres », a-t-il affirmé.

Le CGRI est devenu un instrument d'instabilité dans ces régions en raison de ce contrôle, a-t-il ajouté, qui se rapproche plus d'une occupation et qui causera une agitation et des tensions constantes dans la période à venir.

Implication directe en Syrie

« La bataille d'Alep a de nombreuses implications, parmi lesquelles la confirmation de l'implication directe de l'Iran dans la guerre syrienne », a déclaré à Diyaruna le chercheur politique Abdoul Nabi Bakkar.

Cela était évident après la chute de l'est d'Alep et les déclarations faites par des commandants du CGRI, a-t-il indiqué, en plus des apparitions publiques de Soleimani dans les rues d'Alep.

Le CGRI cherche à répandre l'idée que « l'Iran a connu la victoire dans la guerre d'Alep, qu'il essaie de faire passer pour la fin de la crise syrienne », a-t-il précisé.

Les déclarations iraniennes publiées à la chute d'Alep aux mains de milices appuyées par le CGRI ont cherché à la représenter comme « une importante victoire religieuse », a affirmé Sheyar Turko, doctorant à l'université du Caire faisant des recherches sur le financement du CGRI.

Ceci est dû au fait que « l'Iran poursuit sa mobilisation sectaire dans la région pour confirmer son déploiement en tant que soutien et protecteur des chiites et des alaouites », a-t-il indiqué à Diyaruna.

« La victoire d'Alep n'est qu'un autre épisode de l'expansion iranienne en Syrie, laquelle est naturellement liée à la prolifération iranienne au Moyen-Orient », a-t-il poursuivi.

Le CGRI était déterminé à obtenir la victoire à Alep, a déclaré Turko, car il avait un besoin urgent d'une « motivation supplémentaire pour améliorer le moral des groupes armés qu'il dirige dans la guerre syrienne ».

De plus, a-t-il indiqué, la déclaration rapide du régime iranien sur la victoire dessine les contours du futur dans la région d'Alep, dans lequel une présence iranienne liera Alep à Latakia, Damas, et la campagne de Damas.

Le régime iranien essaie d'établir une ceinture pour protéger Damas et « garantir sa présence à long terme en soutenant le chef de l'État qui est son allié », a fait savoir Turko.

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1 COMMENTAIRE (S)

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C'était contre les chiites et en faveur du terrorisme.

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