Terrorisme

L'attentat terroriste de Tripoli suscite un débat sur la condamnation des activistes au Liban

Junaid Salman à Beyrouth

Le président libanais Michel Aoun rencontre des ministres et des responsables de la sécurité pour discuter du renforcement des mesures de sécurité et de l'amélioration des efforts d'échange de renseignements après l'attentat du 3 juin à Tripoli. [Photo fournie par Dalati et Nohra]

Le président libanais Michel Aoun rencontre des ministres et des responsables de la sécurité pour discuter du renforcement des mesures de sécurité et de l'amélioration des efforts d'échange de renseignements après l'attentat du 3 juin à Tripoli. [Photo fournie par Dalati et Nohra]

La récente attaque de « loup solitaire » dans la ville de Tripoli, dans le nord du Liban, a suscité un grand débat sur les condamnations prononcées à l'encontre d'activistes reconnus coupables d'avoir rejoint des groupes extrémistes tels que « l'État islamique en Irak et en Syrie » (EIIS).

De nombreuses voix s'élèvent pour réclamer des peines plus lourdes contre les terroristes reconnus coupables et un meilleur suivi des anciens détenus terroristes.

D'autres appellent à une réforme du système carcéral libanais et à la réhabilitation des détenus pour éviter qu'ils ne soient happés par l'idéologie extrémiste qui se serait installée dans certaines prisons libanaises.

Le 3 juin, à la veille de l'Aïd el-Fitr, un ancien élément de l'EIIS ayant combattu en Syrie a commis une fusillade qui a entraîné la mort de deux militaires et deux membres des Forces de sécurité intérieure (FSI).

Abdoul-Rahman Mabsout avait quitté le Liban pour la Turquie en 2015, dans l'espoir de rejoindre l'EIIS, et y était demeuré un mois, mais il n'avait pas réussi à franchir la frontière pour rejoindre les zones contrôlées par l'EIIS.

Il avait ensuite réussi à se rendre à Idlib et à y rejoindre l'EIIS. Quelques mois plus tard, Mabsout était revenu au Liban, où il avait été arrêté en 2016.

Renvoyé devant un tribunal militaire, il avait été condamné à un an et demi de prison, mais fut libéré début de 2017.

Système judiciaire militaire

Au Liban, les crimes liés au terrorisme relèvent de la compétence des tribunaux militaires.

« Les tribunaux militaires prononcent des verdicts au cas par cas contre les personnes accusées de terrorisme », a fait savoir le général de brigade Ibrahim Khalil, ancien responsable du Tribunal militaire permanent.

« Des peines plus sévères sont infligées à celles qui commettent des actes contre l'État libanais ou portent atteinte à ses institutions », a-t-il expliqué à Al-Mashareq.

Des peines sont également prononcées à l'encontre des personnes qui appartiennent à des groupes interdits par la loi libanaise, a-t-il déclaré à Al-Mashareq, à l'instar de l'EIIS.

Cependant, les tribunaux militaires prennent en compte au cours du procès la repentance de ceux qui ont quitté le Liban pour combattre aux côtés de groupes terroristes avant de rentrer chez eux, a-t-il précisé.

« D'autre part, ceux qui ont été de plus en plus impliqués dans le terrorisme avant de revenir au Liban ont été jugés à leur retour, et un grand nombre d'entre eux languissent en prison », a ajouté Khalil.

Surveiller les extrémistes

« Le Liban n'a aucun programme de réhabilitation pour ceux qui ont combattu avec des groupes terroristes en Syrie ou ont été affiliés avec eux », a indiqué à Al-Mashareq Mona Alami, membre non résidente du Centre Rafiq Hariri pour le Moyen-Orient du Conseil atlantique.

Avant le début des événements en Syrie, beaucoup de gens au Liban « étaient emprisonnés pour des délits mineurs, comme la sympathie envers les groupes extrémistes », a-t-elle rapporté, ajoutant qu'elles croupissent en prison avec des extrémistes purs et durs en attente de leur procès.

La situation économique désastreuse dans les régions où vivent ces personnes, ainsi que l'influence accrue du Hezbollah, qui les a marginalisées, « ont alimenté leur motivation à rejoindre des groupes terroristes en Syrie », a expliqué Alami.

« Plusieurs d'entre elles ont déclaré ouvertement que si elles ne peuvent pas combattre le Hezbollah au Liban, elles iront en Syrie pour le combattre là-bas », a-t-elle rapporté.

Alami a souligné la nécessité de mettre ces individus, même s'ils ne se sont pas battus, avec leurs familles, « sous la surveillance des agences de sécurité [libanaises], ce qui n'a pas été fait pour un grand nombre d'entre eux ».

Par ailleurs, l'ingérence des responsables politiques dans le système judiciaire rend les peines prononcées à l'encontre des terroristes et de ceux qui se livrent à des activités terroristes critiquables, a déclaré à Al-Mashareq l'ancien président de l'Ordre des avocats libanais Antoine Klimos.

L'indépendance du système judiciaire « garantit que des peines appropriées soient prononcées contre les personnes impliquées dans des attentats terroristes ou associées à des groupes extrémistes », a-t-il affirmé.

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