Économie

Le fonds d'investissement saoudien parie gros sur la transformation d'une économie basée sur le pétrole

AFP

Cette photo d'archive datée du 10 mai 2016 montre les bâtiments administratifs du siège de la Saudi Aramco à Dhahran. [Ian Timberlake/AFP]

Cette photo d'archive datée du 10 mai 2016 montre les bâtiments administratifs du siège de la Saudi Aramco à Dhahran. [Ian Timberlake/AFP]

Avec l'arrêt de la cotation sur le marché de sa compagnie pétrolière nationale, l'Arabie saoudite cherche par tous les moyens à renflouer les coffres de ses fonds souverains en mettant l'accent sur un plan de diversification de son économie.

Le Fonds d'investissement public a ainsi cherché à lever des milliards de dollars au travers de l'offre publique initiale présentée par la Saudi Aramco pour financer la transformation du royaume d'une économie d'État pétrolier en une économie technologique.

Mais alors que cette cotation est reportée indéfiniment, le FIP prend des mesures pour renflouer ses coffres avec des liquidités indispensables pour financer une pléthore d'investissements non pétroliers.

« La plus grosse partie de ce plan économique et social ambitieux visant à diversifier l'économie saoudienne, faire décoller son secteur privé et créer des emplois pour les jeunes se base sur le fait que le FIP agit comme un orchestrateur de la croissance économique », a expliqué Karen Young, membre de l'Arab Gulf States Institute à Washington.

« De fait, le FIP est tellement central dans la stratégie de croissance du gouvernement que trouver des ressources pour l'alimenter est devenu une priorité économique nationale », a-t-elle écrit dans un rapport interne.

Sortir l'économie du royaume de sa dépendance au pétrole est une priorité essentielle pour le prince héritier Mohammed ben Salmane.

Lorsque l'introduction en bourse de l'Aramco a été proposée en 2016, les responsables saoudiens avaient espéré qu'elle permettrait de lever jusqu'à 100 milliards de dollars pour financer son programme de réforme, sur la base d'une valorisation de 3 billions de dollars de cette entreprise publique qui, de l'avis de nombreux experts, était irréaliste.

Avec les difficultés de cette introduction, le FIP, dont l'objectif est de faire passer ses actifs d'environ 230 milliards à plus de 2 billions de dollars d'ici 2030, poursuit avec acharnement un ensemble d'investissements lourds, allant d'Uber au projet de mégalopole Neom de 500 milliards de dollars.

Le fonds a également investi dans la société de tourisme spatial Virgin Galactic et a promis des dizaines de milliards de dollars à des fonds administrés par la SoftBank et Blackstone.

« Dépenser pour croître »

Certains analystes ont exprimé des réserves sur la stratégie du « dépenser pour croître » du FIP, car elle se lance dans la recherche d'opportunités qu'ils considèrent comme « tape-à-l'œil » plutôt que comme des investissements de long terme assurant une rentabilité certaine et générateurs d'emplois, à un moment où le chômage est en très nette hausse.

« Le modèle d'investissement du FIP ressemble beaucoup à celui d'un fonds de capitaux à risque, ce qui est préoccupant pour un fonds qui, par nécessité, doit générer une rentabilité régulière à long terme », a expliqué Ellen Wald, auteure du livre « Saudi Inc. »

Depuis 2016, le FIP s'est lancé dans des engagements d'investissement extérieurs pour une valeur de 360 milliards de riyals (95 milliards de dollars), selon le Fonds monétaire international, y compris par le biais de participations dans des sociétés technologiques à haut risque, à l'instar du constructeur de voitures électriques Tesla.

Selon Wald, « les investissements dans des sociétés technologiques ne serviront pas à transformer l'économie de l'Arabie saoudite, pas plus qu'ils ne permettront de diversifier les sources de revenus de l'économie et de la sortir de la dépendance au pétrole ».

Le FIP n'a pas souhaité faire de commentaires.

Pour l'heure, le report de l'introduction en bourse de l'Aramco est perçu comme le reflet de l'amélioration de la position budgétaire du royaume après la récente hausse des prix du pétrole, mais il atténue également l'optimisme concernant les réformes.

« Le report de cette introduction implique que la diversification de l'économie envisagée par le gouvernement doit soit être revue à la baisse, soit être financée par l'émission d'une dette du secteur public directe ou indirecte plus élevée », a indiqué lundi l'agence de notation Moody's.

Moody's a souligné qu'une forte dépendance à la dette augmenterait les risques de responsabilité et exercerait une pression négative sur le profil de crédit de l'Arabie saoudite.

Lever des liquidités

Le mois dernier, le FIP a emprunté 11 milliards de dollars auprès des banques internationales, sa première avance commerciale, pour financer les plans de transformation du royaume, a indiqué cette semaine le magazine Rajhi Capital basé à Riad.

« Si le FIP souhaite concrétiser ses plans ambitieux dans les années qui viennent, il aura besoin d'un financement supplémentaire », a indiqué le FMI dans un récent rapport.

Pour certains investissements, a-t-il poursuivi, le gouvernement aura besoin de puiser dans ses réserves auprès de l'Autorité monétaire arabe saoudienne, qui s'élèvent à un peu plus de 500 milliards de dollars.

Pour lever des fonds, le FIP réfléchit à la vente d'une « participation stratégique » dans le géant saoudien de la pétrochimie SABIC à Aramco.

SABIC, quatrième plus grosse société pétrochimique mondiale d'une valeur en bourse de plus de 100 milliards de dollars, est détenu à 70 % par le FIP.

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