Analyse

Des divisions houthies poussent des leaders yéménites à fuir vers Aden

Nabil Abdoullah al-Tamimi à Aden

Des combattants yéménites des Comités de résistance populaire, qui soutiennent les forces fidèles au gouvernement, assistent à une cérémonie de remise de diplômes dans la ville de Taez le 17 juillet 2018. [Ahmad al-Basha/AFP]

Des combattants yéménites des Comités de résistance populaire, qui soutiennent les forces fidèles au gouvernement, assistent à une cérémonie de remise de diplômes dans la ville de Taez le 17 juillet 2018. [Ahmad al-Basha/AFP]

De nombreux membres du parlement et dirigeants civils et militaires fuient Sanaa vers des régions contrôlées par le gouvernement légitime, alors que les divisions s'accentuent dans les rangs des Houthis (Ansarallah), soutenus par l'Iran, indiquent des experts à Al-Mashareq.

L'incapacité de la branche politique des Houthis à mettre fin à la progression de l'armée yéménite et de la coalition arabe vers al-Hodeidah, ainsi que le nombre grandissant de victimes parmi les combattants houthis ont causé de profondes dissensions au sein de la milice, ont indiqué des sources de Sanaa au journal Asharq al-Awsat.

Celles-ci sont le résultat des « graves défaites subies [par la milice] sur le terrain », a fait savoir le 31 juillet à ce journal le général de brigade et porte-parole de l'armée yéménite Abdo Abdoullah Majali.

Plus de 30 dirigeants importants, dont des députés et des leaders de l'armée et de la sécurité, ont fui en juillet vers des zones contrôlées par le gouvernement légitime en raison des désaccords grandissants entre les chefs des Houthis, a-t-il rapporté.

« Des observateurs à Sanaa prévoient l'augmentation de nombre de leaders fuyant dans la période à venir », a-t-il déclaré, notant que ces dirigeants sont issus de tous les secteurs administratifs et militaires.

Le député Hebatoullah Sharim du district d'al-Durayhimi, dans le sud d'al-Hodeidah, et plusieurs députés de la province de Raymah, affiliés au Congrès général du peuple (CGP), ont fui vers Aden le 18 juillet, selon des médias locaux.

Le 24 mai, Nasser Bajil, vice-président du parlement et membre du CGP, est arrivé dans la province de Shabwa.

Il fait partie des dix députés qui ont fui Sanaa, originaires des provinces d'Ibb, Dhamar, Taiz, al-Jawf, Raymah, al-Hodeidah et Shabwa.

Sécurité et risques accrus

Les Houthis ont mis en place des mesures de sécurité strictes envers les parlementaires afin de les empêcher de s'enfuir, a rapporté Asharq al-Awsat.

Le président du conseil politique des Houthis, Mahdi al-Mashat, a convoqué le dirigeant du parlement Yahya al-Rai et son adjoint à une réunion à Sanaa en juillet, lors de laquelle il a exprimé sa colère face à la fuite continue de députés vers des régions contrôlées par le gouvernement, a indiqué le journal.

Al-Mashat a ordonné à al-Rai d'adopter une loi criminalisant la fuite de députés vers des zones sous le contrôle du gouvernement légitime ou en dehors du Yémen, en en faisant « un acte de trahison », a-t-il déclaré.

Cette loi permettrait également à la milice de confisquer les biens des députés, a-t-il ajouté.

Tous ceux qui ont l'opportunité d'échapper à la milice houthie le font, a déclaré à Al-Mashareq l'avocat et militant Abdoul Rahman Barman.

« À chaque jour et chaque semaine qui passent, nous verrons de plus en plus de dirigeants fuir, et en particulier des députés », a-t-il affirmé.

Fuir Sanaa comporte des risques, a précisé Barman, y compris ceux auxquels sont confrontés les membres de la famille des leaders politiques qui s'enfuient, et la possibilité que leurs biens soient pillés par la milice.

« Certains députés ont été forcés de vendre leurs maisons à des prix très bas, ou à un tiers de leur valeur », a-t-il poursuivi.

Les Yéménites rejettent les Houthis, a-t-il fait savoir, et les « seules personnes qui font partie de la milice » sont celles qui embrassent son idéologie, ou celles qui ont été contraintes de le faire ou le font pour le salaire.

À la recherche de sécurité

« Les dangers auxquels ces députés et ces leaders sont confrontés sont nombreux, et ils comprennent le fait d'être arrêtés ou tués, de voir leurs biens pillés, ou d'être forcés à apparaître dans les médias pour y faire des déclarations qui soutiennent les [Houthis] », a expliqué le politologue Waddah al-Jalil à Al-Mashareq.

Les responsables politiques et les leaders ont commencé à fuir juste après que les Houthis ont pris le contrôle de Sanaa en 2014 avec l'aide du parti du président Ali Abdallah Saleh, aujourd'hui décédé, a-t-il indiqué.

« Ceux qui ne partageraient pas les idées politiques de Saleh et des Houthis ont préféré quitter Sanaa », a-t-il déclaré.

Peu après l'assassinat de Saleh en décembre 2017 par les Houthis, ses fidèles ont commencé à fuir vers des régions contrôlées par le gouvernement pour éviter des représailles par les Houthis, a fait savoir al-Jalil.

Ceux qui fuient les zones des Houthis cherchent « un semblant d'État qui leur apporte la sécurité », a expliqué Adel al-Shogaa, dirigeant du CGP, à Al-Mashareq.

« Leurs souffrances découlent d'un manque de sécurité pour leur personne et leurs moyens de subsistance » sous le règne des Houthis, a-t-il déclaré.

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