Droits de l'Homme

Yémen : une commission enquête sur les atteintes aux droits de l'homme

Par Faisal Darem à Sanaa

La militante des droits de l'homme Ishraq al-Maqtari effectue une visite de terrain avec une équipe d'observateurs et de spécialistes enquêtant sur les atteintes aux droits de l'homme au Yémen. [Photo fournie par Ishraq al-Maqtari]

La militante des droits de l'homme Ishraq al-Maqtari effectue une visite de terrain avec une équipe d'observateurs et de spécialistes enquêtant sur les atteintes aux droits de l'homme au Yémen. [Photo fournie par Ishraq al-Maqtari]

La commission nationale chargée d'enquêter sur les atteintes aux droits de l'homme au Yémen se prépare à remettre près de 3 000 cas terminés à la justice.

Pendant les mois de juillet et d'août, a fait savoir la commission, ses équipes ont pu identifier 608 cas de violation des droits de l'homme s'étant produits depuis 2015.

Les kamikazes affiliés aux extrémistes comptent pour douze de ces cas. Il y a eu 189 cas de disparitions et de détentions forcées, ainsi que 99 cas de victimes civiles à cause d'attaques à la bombe contre des zones résidentielles.

Parmi les autres atteintes figurent des assassinats, le recrutement d'enfants pour servir de combattants, et des attaques à la bombe contre des résidences et des lieux de culte.

Al-Mashareq s'est entretenu avec Ishraq al-Maqtari, membre de la commission et militante des droits de l'homme à propos du travail de la commission et des défis auxquels elle est confrontée.

Al-Mashareq : Quels sont les résultats des travaux de la commission au cours des dernières années ?

Ishraq al-Maqtari : Selon le rapport périodique de la commission, celle-ci a pu identifier 17 123 allégations de violation des droits de l'homme dans toutes les provinces yéménites entre septembre 2016 et juillet 2017 et impliquant toutes les parties du conflit armé.

La commission a terminé son enquête sur 10 594 allégations, et les observateurs et enquêteurs de la commission ont mené des visites sur le terrain dans toutes les provinces presque tous les jours.

La commission a interrogé 16 191 plaignants, victimes et témoins, a examiné des milliers de documents, de photos et de vidéos, et a effectué plusieurs visites sur le terrain dans les différentes zones du conflit.

La commission se prépare actuellement à remettre plus de 3 000 atteintes documentées au procureur général et au président du Conseil supérieur de la magistrature, dont 60 % concernent des morts civiles.

Al-Mashareq : Quelle est la procédure pour l'enregistrement de ces violations ?

Al-Maqtari : Les plaignants peuvent soumettre directement un rapport à la commission dans ses bureaux à Aden ou Taez, ou rencontrer des observateurs de la commission qui sont envoyés dans différentes parties du pays.

La commission reçoit également des signalements provenant d'organisations [des droits de l'homme] opérant dans tout le Yémen.

Cependant, nous nous appuyons principalement sur nos observateurs dans les provinces et les directorats, qui sont eux-mêmes sur le terrain et rencontrent les victimes, inspectent les lieux, prennent des photos, documentent et obtiennent des dossiers d'hôpitaux et des preuves médicolégales.

Les enquêteurs inspectent ensuite le dossier judiciaire et fournissent une description de chaque incident. Ils mènent également des visites sur le terrain et s'entretiennent à nouveau avec les témoins.

La commission dispose ainsi désormais d'une base de données électronique et manuscrite actuelle sur tous les incidents perpétrés par toutes les forces en présence du conflit, y compris les groupes extrémistes.

Al-Mashareq : Comment est-ce que la commission surveille et identifie les atteintes aux droits de l'homme, et est-ce que des actions juridiques seront entreprises contre les coupables ?

Al-Maqtari : La commission a publié une déclaration pour la période juillet-août indiquant que nous avons identifié plus de 600 incidents et que nous avons fini d'enquêter sur plus de 300 cas de violations.

Le rôle principal de la commission est d'enquêter à l'aide d'outils, de méthodes et de mesures semi-juridiques, suivis d'une description juridique des violations et une identification des coupables.

Nous accomplissons cela grâce à un ensemble de différents mécanismes, comme des experts militaires, des examens judiciaires d'explosifs et l'inspection des lieux où des civils ont été tués et pris pour cible.

Ensuite, ces cas sont référés au système judiciaire pour que s'ensuive un procès pour les accusations, qui ne sont pas soumises à prescription.

Al-Mashareq : Quels sont les problèmes et les défis majeurs auxquels la commission doit répondre ?

Al-Maqtari : Le problème et les défis auxquels la commission doit faire face sont la poursuite de la guerre et des opérations militaires associées, ainsi que les pertes quotidiennes dans les zones de conflit. [...]

Il y a également la réticence de certaines parties à coopérer avec la commission et la difficulté d'atteindre les victimes dans les zones que ces parties contrôlent.

De plus, la détérioration des institutions publiques et privées dans les zones de conflit, qui sont constamment prises pour cible, ainsi que leurs faibles ressources font qu'elles ne peuvent pas fournir des documents médicaux et des rapports médicolégaux.

La commission connaît également comme problème le fait que différentes parties sont responsables de ces atteintes, notamment de détentions illégales, de torture et de déplacements [...], sans parler de la difficulté des déplacements et de l'accès aux informations, ainsi que les ressources limitées de la commission.

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