Religion

Les autorités religieuses musulmanes réfutent l'interdiction des prières tarawih par l'EIIL

Par Waleed Abu al-Khair au Caire

Des Syriens prient dans une mosquée à al-Raqa, où « l'État islamique en Irak et au Levant » a interdit la prière tarawih. [Photo fournie par Mohammed al-Abdullah]

Des Syriens prient dans une mosquée à al-Raqa, où « l'État islamique en Irak et au Levant » a interdit la prière tarawih. [Photo fournie par Mohammed al-Abdullah]

« L'État islamique en Irak et au Levant » (EIIL) viole de manière flagrante la charia en décrétant des fatwas comme celle interdisant récemment la prière tarawih, la qualifiant de « mode », ont indiqué d'éminentes autorités religieuses musulmanes à Al-Shorfa.

L'Observatoire égyptien des fatwas Dar al-Ifta a répondu au dernier édit de l'EIIL dans un communiqué daté du 8 juin, déclarant qu'il était contraire à l'Islam et à la sunna du Prophète.

Qualifier la prière tarawih de « mode » est une violation par l'EIIL de la méthodologie établie de la charia sur l'établissement de conclusions à partir des textes religieux, a précisé le communiqué.

L'Observatoire a répété à plusieurs reprises que ce genre de conduite extrémiste « va trop loin en rejetant comme simples modes des coutumes et des formes de dévotion auxquelles les Musulmans sont habitués », a affirmé le communiqué.

Même s'il peut parfois sembler que ce soit une expression d'opinion légitime, cela contrevient de façon évidente à la méthodologie scientifique et de la charia utilisée par Al-Azhar et les institutions analogues dans le monde entier, a déclaré l'Observatoire.

« Al-Azhar a bien fait de répondre rapidement à la fatwa de l'EIIL rejetant et interdisant la prière tarawih comme mode », a déclaré à Al-Shorfa Sheikh Rajeh Sabri, du ministère égyptien des Fondations religieuses.

« Cette prière est autorisée par la plupart des groupes islamiques, et la fatwa de l'EIIL à ce sujet n'a donc aucune valeur, même si elle est appliquée dans les zones sous le contrôle de l'EIIL en Syrie et en Irak », a-t-il indiqué.

Les Musulmans vivants dans des zones sous la coupe de l'EIIL n'adhèrent pas à cette règle par conviction, a-t-il confié, mais par peur de la brutalité et de l'oppression du groupe.

« Cette fatwa disparaîtra sûrement en même temps que le contrôle de l'EIIL sur ces régions », a-t-il ajouté.

Les prières tarawih, une pratique de la sunna

Sabri a estimé que de telles fatwas n'auguraient rien de bon pour les nouvelles générations, que l'EIIL éloigne de « la vraie religion et de la sunna du Prophète, instillant à leur place des enseignements obscurs et des fatwas qui ne servent que ses intérêts et ses desseins terroristes ».

La prière tarawih est établie comme sunna par tous les imams et érudits, a-t-il affirmé, « et la qualifier de mode est un mensonge, un jugement qui n'est pas inattendu de la part d'un groupe terroriste qui a déformé et rendu ridicule tout ce qui est lié à l'Islam ».

« La prière tarawih est une pratique sunna que le Prophète Mahomet a décrétée comme un acte spécifique au mois de Ramadan », a expliqué Sheikh Abdul Thaher Shehata, professeur à la faculté de la charia de l'Université Al-Azhar.

Elle a également été approuvée comme sunna par des érudits des sciences islamiques, et validée dans beaucoup de hadiths du Prophète, a-t-il précisé.

« Il a été convenu qu'elle est préférable mais non obligatoire, et a traversé de nombreuses phases au cours de la longue histoire de l'Islam, où il a été décidé que cette prière doit être effectuée individuellement ou en masse, à la mosquée ou chez soi », a-t-il ajouté.

Shehata a précisé que la tarawih commence après la prière d'isha (la prière du soir) et se poursuit jusqu'à la prière de fajr (la prière de l'aube), et est faite par les hommes et les femmes.

L'EIIL applique cette interdiction issue des mosquées d'al-Raqa

Avant le début du Ramadan, les prédicateurs des mosquées de la ville syrienne d'al-Raqa ont annoncé l'interdiction de la prière tarawih par l'EIIL dans les mosquées de la ville, sous peine de châtiment.

Le groupe a également exigé qu'elle ne soit pas effectuée dans les foyers, prétendant que cette prière est une « mode » qui n'était pas attribuée au Prophète, a expliqué à Al-Shorfa Mahmoud al-Amin, enseignant à la retraite et habitant d'al-Raqa.

Cela a suscité un fort ressentiment parmi les habitants de la ville, dans la mesure où la plupart d'entre eux respectent ce rituel de la prière, parmi beaucoup d'autres rituels sociaux et religieux, pendant le mois de Ramadan.

La prière tarawih est « scrupuleusement respectée par les Musulmans car le Prophète l'effectuait, devenant ainsi un rituel très important », a-t-il ajouté.

Les membres de la communauté avaient pour habitude de se rassembler chaque jour pendant le Ramadan pour prier ensemble, a-t-il relaté, ajoutant que cela leur permettait de se rapprocher les uns des autres.

Des familles entières se rendent à la mosquée pour prier, a-t-il ajouté, créant un magnifique lien social qui vient renforcer l'objectif de la prière elle-même.

L'EIIL veut supprimer ce rituel pour augmenter la désintégration sociale dans les zones qu'il contrôle, a-t-il affirmé, soulignant que le groupe interdit aux gens de se rassembler, car cela les conduirait naturellement à s'unir contre lui.

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